La Chine profite des sanctions contre la Russie pour lui vendre au prix fort ses fournitures de guerre
Les exportateurs chinois ont nettement augmenté les prix des biens essentiels qu’ils vendent au secteur militaro-industriel russe, profitant de la dépendance accrue du Kremlin face aux sanctions occidentales. C’est la conclusion d’une étude récente de l’Institut des économies émergentes de la Banque de Finlande (Bofit), citée notamment par le Financial Times.
Selon celle-ci, les prix des produits soumis au contrôle des exportations expédiés depuis la Chine vers la Russie ont augmenté de 87 % en moyenne entre 2021 et 2024. À titre de comparaison, le prix de produits similaires expédiés ailleurs n’a augmenté que de 9 % sur la même période.
Par conséquent, ces hausses de prix restreindraient la capacité de Moscou à acquérir des technologies sensibles, alors même que la Russie parvient à contourner une partie des sanctions en s’appuyant sur des fournisseurs chinois. Un haut responsable occidental chargé des sanctions a confirmé cette dynamique au Financial Times. Il estime que le fait que des entreprises chinoises "exploitent" les acheteurs russes peut être considéré comme "un résultat plutôt positif". Selon lui, "augmenter le prix d’un bien de 80 % revient à presque diviser par deux ce que les clients peuvent réellement acheter".
"Parfois il s’agit tout simplement de vol"
Alors que les échanges bilatéraux entre les deux pays sont passés de 146,9 milliards de dollars en 2021 à un niveau record de 254 milliards de dollars en 2024, le Bofit indique que cette hausse est principalement due à l’augmentation des prix plutôt qu’à une hausse des volumes. "Les importations de roulements à billes chinois ont progressé de 76 % en valeur, mais ont reculé de 13 % en volume", reprend ainsi le Moscow Times.
De quoi donner raison à cette source proche du gouvernement russe, qui constatait cet été auprès de Reuters que Pékin agit avant tout dans son propre intérêt : "La Chine ne se comporte pas comme une alliée […] Parfois, elle profite de la situation, parfois il s’agit tout simplement de vol." Une autre source anonyme, toujours auprès de Reuters, souligne que la Russie demeure fortement dépendante de la technologie chinoise. "Sans eux, nous n’aurions pas pu fabriquer un seul missile, encore moins un drone […]. S’ils avaient voulu, la guerre serait terminée depuis longtemps."
Des sanctions qui ont "limité les capacités technologiques de la Russie"
Les auteurs de l’étude du Bofit, Iikka Korhonen et Heli Simola, se sont concentrés sur le commerce des "machines et appareils mécaniques", une catégorie clé pour l’industrie de défense russe. Ils concluent que les sanctions ont "limité les capacités technologiques de la Russie en faisant grimper le prix des importations de biens essentiels", rapporte le Financial Times.
Moscou cherche activement à faire lever les sanctions occidentales - un sujet présent dans le plan de paix en 28 points récemment discuté entre les États-Unis et la Russie — présenté à l’Ukraine. De son côté, Pékin nie fournir des armes létales à Moscou et affirme s’opposer aux sanctions "unilatérales" freinant le commerce entre entreprises chinoises et russes. Reste à savoir si cette alliance russo-chinoise résistera à cet aléa économique.

© AFP