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Reçu aujourd’hui — 3 novembre 2025 L'Express

Le FBI secoué par une nouvelle affaire, et c’est encore à cause de son patron Kash Patel

3 novembre 2025 à 19:19

Le FBI est encore dans la tourmente. Selon plusieurs médias américains, dont Bloomberg Law, l’agence fédérale a limogé un haut fonctionnaire. Son départ serait lié à la publication dans la presse des registres de vol d’un jet du FBI, que le directeur de l’agence, Kash Patel, a emprunté pour aller rendre visite à sa petite amie, la chanteuse de country Alexis Wilkins lors de l’une de ses prestations à un match de catch.

"Licenciement abusif"

Selon The Guardian, l’agent licencié s’appelle Steven Palmer. Il travaillait au FBI depuis 1998. Il dirigeait une unité chargée de gérer les grandes crises liées à la sécurité et de la gestion de la flotte aérienne du FBI. Son départ, officialisé vendredi, est le troisième d’un responsable de cette unité stratégique depuis la nomination de Kash Patel, en février dernier, souligne The Guardian. Wes Wheeler a été licencié en mars et Brian Driscoll en août. Ce dernier poursuit d’ailleurs l’administration de Donald Trump pour "licenciement abusif", affirmant qu’il a été ciblé pour avoir fait preuve d’un manque de loyauté envers le président.

Selon Bloomberg, qui a révélé l’affaire, le licenciement de Steven Palmer est intervenu alors que Kash Patel était furieux face au tollé médiatique sur ses déplacements personnels. "Peu de temps après, on a dit à Steven Palmer qu’il pouvait démissionner immédiatement ou être licencié", précise le journal économique citant trois sources anonymes. Mais comme le soulignent de nombreux journaux, les enregistrements de vol du FBI sont publics et montrent ce jour-là l’un de ses avions voyageant à destination et en retour du petit aéroport du State College, en Pennsylvanie, le 25 octobre. Un voyage qui correspond à la performance de sa petite amie Alexis Wilkins.

"Rumeurs infondées"

Ce déplacement a d’autant plus fait polémique que le directeur du FBI, un proche de Donald Trump, s’en était pris à son prédécesseur Chris Wray en 2023 pour ses déplacements personnels "aux frais du contribuable". Dans une déclaration, son porte-parole, Ben Williamson, a souligné que le directeur du FBI est tenu, en vertu des règles gouvernementales, de payer un remboursement pour son voyage en jet privé et a affirmé que Kash Patel avait "considérablement limité" les voyages personnels par rapport à ses prédécesseurs Chris Wray et James Comey. Comme l’a noté The Daily Beast, avant d’être directeur du FBI, Kash Patel était très critique à l’égard de l’utilisation par Chris Wray des jets du gouvernement à des fins personnels lorsque. En 2023, il avait même surnommé Chris Wray de manière cinglante "#GovernmentGangster".

"Nous ne nous laisserons pas distraire par des rumeurs infondées ou le bruit des anarchistes d’internet mal informés et des fausses informations, a réagi Kash Patel sur son compte X dimanche. J’ai toujours dit — critiquez-moi tant que vous voulez. Mais s’en prendre aux personnes qui font un excellent travail, à ma vie personnelle, ou à ceux qui m’entourent est une honte totale." Et d’ajouter : "Les attaques dégoûtantes et sans fondement contre Alexis — une vraie patriote et la femme que je suis fier d’appeler ma partenaire de vie — sont plus que pathétiques."

De son côté la chaîne MSNBC remarque que ce limogeage qui passe mal n’est que l’épilogue d’une semaine de bourdes cumulées pour le patron du FBI. Vendredi 31 octobre, jour d’Halloween aux Etats-Unis, il avait ainsi annoncé que ses équipes ont déjoué un "complot terroriste" imminent, avant même d’avoir des détails concrets sur l’arrestation de cinq jeunes dans le Michigan. Des responsables du ministère de la Justice "ont exprimé des préoccupations selon lesquelles Patel semblait avoir agi à la hâte sur l’enquête sans l’approbation du juge principal, dans le but apparent de demander un certain crédit pour le FBI, mais d’une manière qui pourrait interférer avec l’enquête". L’incident a rappelé un faux pas en septembre lorsque Kash Patel a publié de fausses informations sur les réseaux sociaux sur la mort par balle de l’activiste conservateur Charlie Kirk. Il avait notamment annoncé l’arrestation de son meurtrier présumé, alors qu’une traque de 33 heures débutait à peine, avait rapporté Fox News.

© afp.com/Jim WATSON

Le directeur du FBI, la police fédérale américaine, Kash Patel, lors d'une audition devant la commission judiciaire du Sénat, à Washington, le 16 septembre 2025

Dans les Caraïbes, les Etats-Unis modernisent une base navale près du Venezuela

3 novembre 2025 à 16:38

C’est l’histoire d’une base navale américaine implantée à Porto Rico, dénommé Roosevelt Roads et largement exploitée pendant la guerre froide. Fermés en 2004, il y a 21 ans, les 8 700 hectares du complexe militaire de Roosevelt Roads, qui fut l’un des plus grands au monde, s’apprêtent à être de nouveau opérationnels. "Depuis deux décennies, la base languissait dans les mauvaises herbes et la rouille. Puis les avions de chasse ont rugi", décrit le journal économique Bloomberg. Tandis que, selon des images aériennes capturées par l’agence de presse Reuters, dès le 17 septembre dernier, du personnel a commencé à défricher et à repaver les voies de circulation menant à la piste principale.

Selon les observateurs, la réactivation de cette base dans les Caraïbes, à moins de 800 kilomètres du Venezuela n’a rien d’anodin. Depuis plusieurs semaines, les relations entre Washington et Caracas sont très tendues, alors que Donald Trump a déclaré les Etats-Unis en "conflit armé" avec les narcotrafiquants, dont il accuse le Venezuela d’alimenter le trafic de drogue. Ces dernières semaines, quatorze frappes américaines sur des navires au large du Venezuela ont tué 61 personnes présentées comme des membres d’organisations criminelles sud-américaines.

Un "terrain d’étape"

"La base occupe un emplacement stratégique et offre une grande quantité d’espace pour la collecte d’équipement", a déclaré un responsable américain auprès de Reuters. Depuis septembre, la base de Roosevelt Roads de Porto Rico, est devenue un terrain d’étape pour les opérations militaires américaines dans la région, y compris les chasseurs furtifs F-35B et les avions-cargos C-17 Globemaster III, souligne Bloomberg. A Porto Rico, la tension militaire est désormais à son comble alors que le Pentagone a déployé près de 10 000 dans les bases militaires du petit territoire américain des Caraïbes, selon The New York Times.

En outre, des images satellites ont montré qu’au moins trois destroyers de missiles guidés, un groupe d’assaut amphibie et des navires de combat en eau peu profonde sont d’ores et déjà stationnés au large des côtes du Venezuela. Et le plus grand porte-avions de la marine américaine, l’USS Gerald R. Ford, est actuellement en route pour les Caraïbes. "Toutes ces choses sont, je pense, conçues pour effrayer le régime Maduro et les généraux qui l’entourent, dans l’espoir que cela créera des fissures", a déclaré à Reuters Christopher Hernandez-Roy, chercheur principal au Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS) à Washington.

Alors qu’une grande partie de l’accumulation militaire américaine s’est jusqu’à présent faite en haute mer, hors de la vue du public, ce qui se passe à Roosevelt Roads, mieux connue sous le nom de Rosy Roads, est plus visible. De quoi inquiéter les états de la Communauté des Caraïbes, dont 14 membres ont récemment rappelé que la région est une "zone de paix", où les questions de sécurité devraient être résolues "grâce à une coopération internationale continue et au sein du droit international".

Appel à l’aide à Moscou et Pékin

Alors que les Etats-Unis augmentent la pression, le Venezuela implore Moscou et Pékin pour obtenir de l’aide, rapporte un article du Washington Post. Selon des documents internes au gouvernement américain, dont certains médias comme le Washington Post ont eu accès, le président vénézuélien Nicolás Maduro aurait demandé de l’aide à la Chine, la Russie et l’Iran. Les demandes à Moscou ont été faites sous la forme d’une lettre destinée au président russe Vladimir Poutine. Le Kremlin a refusé de commenter la lettre, mais le ministère des Affaires étrangères a déclaré vendredi soir que Moscou soutenait le Venezuela "dans la défense de sa souveraineté nationale" et est "prêt à répondre de manière appropriée aux demandes de nos partenaires à la lumière des menaces émergentes". Dimanche, un Ilyushin Il-76 - l’un des avions russes sanctionnés en 2023 par les Etats-Unis pour avoir participé au commerce des armes et transporté des mercenaires - est arrivé à Caracas après une route détournée au-dessus de l’Afrique pour éviter l’espace aérien occidental, selon le site Flightradar24.

Le président vénézuélien aurait également adressé une lettre au président chinois Xi Jinping demandant une "coopération militaire élargie" entre leurs deux pays pour contrer "l’escalade entre les Etats-Unis et le Venezuela". Les mêmes documents, du gouvernement américain, indiquent en outre que le ministre des Transports Ramón Celestino Velásquez a également récemment coordonné une expédition d’équipement militaire et de drones en provenance d’Iran tout en y planifiant une visite. Selon le Washington Post, il aurait déclaré à un responsable iranien que le Venezuela avait besoin d'"équipement de détection passive", de "scramblers GPS" et "presque certainement des drones d’une portée de 1 000 kilomètres". L’accumulation militaire américaine dans les Caraïbes présente peut-être le plus grand défi pour Nicolás Maduro, le successeur d’Hugo Chávez, depuis son arrivée au pouvoir en 2013.

© afp.com/Martin BERNETTI

Le navire de guerre lance-missile américain USS Gravely arrive à Port d'Espagne, capitale de Trinité-et-Tobago, petit archipel situé à une dizaine de kilomètres du Venezuela, le 26 octobre 2025

Israël : l’ex-procureure générale de l’armée arrêtée après la fuite d’une vidéo de sévices envers un Palestinien

3 novembre 2025 à 13:34

L’ex-procureure générale de l’armée israélienne, Yifat Tomer-Yeroushalmi, a été arrêtée dans la nuit du dimanche 2 au lundi 3 novembre dans le cadre d’une enquête sur la fuite d’une vidéo suggérant des violences sur un détenu palestinien dans une prison israélienne près de Gaza. Cinq réservistes israéliens sont inculpés dans cette affaire hautement médiatisée, qui a suscité l’indignation à l’international.

La juriste la plus haut gradée de la hiérarchie militaire avait annoncé sa démission vendredi. Elle avait reconnu dans une lettre avoir autorisé ses services à diffuser les images auprès des médias. La magistrate avait ensuite brièvement disparu dimanche, soulevant des craintes quant à une possible tentative de suicide. Elle a ensuite été retrouvée vivante puis placée en garde à vue dans un centre de détention, a indiqué ce lundi sur Telegram le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir. Il a souligné l’importance de "mener l’enquête de manière professionnelle afin de découvrir toute la vérité concernant l’affaire qui a conduit à une accusation" contre des soldats.

Plusieurs médias israéliens ont ensuite indiqué qu’un tribunal de Tel-Aviv avait décidé de prolonger la détention de Yifat Tomer-Yeroushalmi jusqu’à mercredi à la mi-journée. Selon la radio-télévision publique Kan, elle devra répondre de "fraude, abus de confiance, abus de fonction, entrave à la justice et divulgation d’informations par un fonctionnaire".

"Grande violence"

La démission puis l’arrestation de "l’avocate militaire en chef" de l’armée israélienne relancent les débats sur la poursuite judiciaire des soldats accusés d’apparaître dans la vidéo qui a fuité.

L’affaire remonte à l’été 2024, lors de la diffusion par la chaîne israélienne Channel 12 d’images issues d’une caméra de surveillance du centre de détention de Sdé Teiman, près de la bande de Gaza. Sans les montrer clairement, la vidéo suggérait de graves violences exercées par des soldats israéliens sur un détenu palestinien. Les images avaient éclaboussé l’armée israélienne en plein conflit dans l’enclave et avaient finalement conduit, en février 2025, à l’inculpation de cinq soldats israéliens pour mauvais traitements.

"Le procureur militaire a inculpé cinq soldats réservistes pour avoir commis des agressions dans des circonstances aggravantes et causé des blessures à un détenu" avait précisé l’armée dans un communiqué. Selon l’acte d’accusation, qui mentionne de nombreuses preuves dont des documents médicaux et des images de vidéosurveillance, les soldats ont "agi contre le détenu avec une grande violence". Ces brutalités "ont causé de graves blessures physiques au détenu, notamment des côtes fracturées, un poumon perforé et une déchirure rectale interne".

Appel à annuler le procès

Selon le New York Times, Yifat Tomer-Yeroushalmi a écrit dans sa lettre de démission qu’elle avait autorisé la publication des images "dans le but de contrer la fausse propagande dirigée contre les autorités militaires chargées de l’application de la loi" et pour protéger ses équipes d’une campagne de délégitimation menée par des Israéliens qui s’opposaient aux poursuites judiciaires de ces soldats.

La démission de la procureure générale donne justement du grain à moudre à ces opposants, qui utilisent les révélations sur la fuite volontaire de la vidéo pour remettre en cause les poursuites judiciaires. Le New York Times rapporte une conférence de presse de certains avocats des accusés demandant une annulation du procès de leurs clients. "Aujourd’hui, malheureusement, nous savons que nous avons été témoins d’un processus judiciaire défaillant, biaisé et entièrement fabriqué de toutes pièces", a déclaré l’un d’eux à la presse, précisant que tous les réservistes rejetaient les accusations qui pèsent contre eux. Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a quant à lui demandé une enquête "indépendante et impartiale", précisant que l’affaire avait causé un "préjudice immense" à l’image de l’Etat d’Israël.

© Anadolu via AFP

L'affaire remonte à l'été 2024, lors de la diffusion d'images issues d'une caméra de surveillance du centre de détention de Sdé Teiman, près de la bande de Gaza.

Gaza : le Hamas "semble déterminé" à respecter la trêve, dit Recep Tayyip Erdogan

3 novembre 2025 à 14:05

Le décombre macabre se poursuit, alors que le Hamas continue de rendre au compte-goutte à Israël les dépouilles d’otages qu’il détient toujours. Les corps de trois soldats enlevés le 7 octobre 2023 ont été restitués dimanche 2 novembre, ce qui porte à 20 le nombre d’otages morts rendus par le mouvement islamiste sur un total de 28 qu’il doit remettre. Si le sujet est à l’origine de nombreuses tensions, la trêve fragile négociée par les Etats-Unis, en vigueur depuis le 10 octobre, tient toujours. Pour tenter de peser sur l’avenir de Gaza, la Turquie réunit ce lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de pays musulmans : "Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a déclaré en amont de ce sommet le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan, insistant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Les infos à retenir

⇒ Le guide suprême iranien exclut une coopération avec Washington en raison de son soutien à Israël

⇒ Le Hamas "semble déterminé" à respecter la trêve, dit Recep Tayyip Erdogan

⇒ Israël a rendu 45 corps de Palestiniens après avoir récupéré les corps de trois nouveaux otages

Le guide suprême iranien exclut une coopération avec Washington en raison de son soutien à Israël

Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a exclu ce lundi toute coopération avec les États-Unis tant que Washington ne changerait pas sa politique dans la région, y compris en matière de soutien à Israël. "S'ils abandonnent complètement leur soutien au régime sioniste, retirent leurs bases militaires (de la région) et s'abstiennent d'intervenir dans cette région, alors (une coopération) pourra être envisagée", a-t-il déclaré. "La nature arrogante des États-Unis n'accepte rien d'autre que la soumission", a-t-il ajouté, lors d'une réunion avec des étudiants à Téhéran commémorant la prise de l'ambassade américaine en 1979 à la suite de la révolution islamique qui a renversé le chah d'Iran soutenu par l'Occident.

L'Iran et les Etats-Unis, ennemis depuis quatre décennies, avaient entamé en avril des négociations sous la médiation du sultanat d'Oman autour du programme nucléaire iranien, objet de tensions avec les pays occidentaux. Mais ces discussions sont au point mort depuis l'attaque surprise d'une ampleur inédite lancée par Israël contre l'Iran le 13 juin, qui a déclenché un conflit de 12 jours entre les deux pays, au cours duquel les Etats-Unis ont aussi frappé trois importants sites nucléaires iraniens.

Pour Ali Khamenei, la seule solution pour l'Iran est de "devenir fort", y compris sur le plan militaire. "Si le pays devient fort et que l'ennemi se rend compte qu'entrer en confrontation avec cette nation forte ne lui apportera aucun bénéfice mais lui causera des pertes, le pays gagnera certainement en immunité", a-t-il commenté.

Le Hamas "semble déterminé" à respecter la trêve, dit Recep Tayyip Erdogan

Le Hamas "semble déterminé" à respecter l’accord de cessez-le-feu à Gaza, a affirmé lundi le président turc Recep Tayyip Erdogan, quelques heures avant une réunion de pays musulmans à Istanbul sur Gaza. "Le Hamas semble déterminé à respecter l’accord. Cependant, nous constatons tous que le bilan d’Israël sur ce sujet est extrêmement mauvais", a déclaré le chef de l’Etat turc à Istanbul devant le Comité permanent pour la coopération économique et commerciale (COMCEC) de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) qu’il souhaite voir "jouer un rôle moteur" dans la reconstruction du territoire.

La Turquie réunit aujourd’hui à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie) pour tenter de peser sur l’avenir de Gaza. Ces ministres avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l’Assemblée générale de l'ONU. Le président américain avait présenté six jours plus tard son plan pour mettre fin au conflit dans la bande de Gaza.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi à Istanbul une délégation du bureau politique du Hamas, emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien. "Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a-t-il déclaré lors d’un forum à Istanbul, insistant de nouveau pour une solution à deux Etats. "Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc.

Israël a rendu 45 corps de Palestiniens après avoir récupéré les corps de trois nouveaux otages

Le ministère de la Santé opérant à Gaza sous le contrôle du Hamas a annoncé lundi qu'Israël avait rendu 45 corps de Palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre dans le territoire palestinien. Selon les termes de cet accord, Israël doit remettre les corps de 15 Palestiniens pour chaque dépouille d'otage israélien restituée de Gaza.

Les autorités israéliennes ont annoncé lundi avoir identifié les dépouilles rendues par le Hamas la veille comme étant celles de trois soldats enlevés le 7 octobre 2023, ce qui porte à 20 le nombre d’otages morts rendus par le mouvement islamiste sur un total de 28 qu’il doit remettre.

Les défunts ont été identifiés comme le capitaine américano-israélien Omer Neutra, 21 ans lors de son enlèvement, le caporal Oz Daniel, 19 ans, et le colonel Assaf Hamami, 40 ans, l’officier le plus gradé tombé aux mains du Hamas. Selon le Forum des familles d’otages, les trois ont été tués dans des combats lors de l’attaque du Hamas sur le sol israélien du 7-Octobre qui a déclenché la guerre à Gaza, et leurs corps ensuite enlevés dans le territoire palestinien.

Israël : l’ex-procureure générale de l’armée arrêtée sur des soupçons de fuites

L’ex-procureure générale de l’armée israélienne Yifat Tomer-Yeroushalmi a été arrêtée dans le cadre d’une enquête concernant la fuite d’une vidéo montrant des violences en 2024 contre des détenus palestiniens par des soldats israéliens dans une prison de haute sécurité, a indiqué lundi le ministre de la Sécurité intérieure.

Après avoir annoncé sa démission vendredi, Yifat Tomer-Yeroushalmi avait brièvement disparu dimanche, déclenchant des spéculations dans la presse sur une possible tentative de suicide.

Dans un message sur Telegram, le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a annoncé lundi qu’il "a été convenu qu’à la lumière des événements de la nuit dernière, le Service pénitentiaire agirait avec une vigilance accrue pour assurer la sécurité de la détenue dans le centre de détention où elle a été placée en garde à vue".

© afp.com/Adem ALTAN

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, le 24 avril 2024 à Ankara

Donald Trump pointe du doigt la Chine et la Russie pour justifier ses essais nucléaires

3 novembre 2025 à 08:58

Le président américain Donald Trump a affirmé que la Russie et la Chine mènent des essais nucléaires "mais n’en parlent pas", sans toutefois préciser leur nature, dans une interview à la chaîne américaine CBS diffusée dimanche 2 novembre. "La Russie fait des essais, et la Chine fait des essais, mais ils n’en parlent pas", a assuré le président américain. "On va faire des essais parce que d’autres font des essais. La Corée du Nord fait des essais. Le Pakistan fait des essais", a-t-il aussi dit.

"Vous savez, aussi puissantes que soient (les armes nucléaires), le monde est grand. Vous ne savez pas nécessairement où ils font des essais", a-t-il poursuivi. "Ils font des essais souterrains, en profondeur, où les gens ne savent pas vraiment ce qui se passe. Vous sentez une petite vibration. Ils font des essais et on n’en fait pas. Nous devons en faire".

"Ce que je dis, c’est qu’on va faire des essais nucléaires comme d’autres pays le font", a insisté Donald Trump, sans répondre précisément à une question portant sur la détonation même de charge nucléaire, que les Etats-Unis n’ont plus pratiquée depuis 1992.

En réponse aux accusations du locataire de la Maison-Blanche, Pékin a assuré lundi ne plus effectuer aucun essai nucléaire. "La Chine a toujours adhéré à la voie du développement pacifique, mène une politique de non-utilisation en premier des armes nucléaires, adhère à une stratégie nucléaire basée sur l’autodéfense et respecte son engagement de suspendre les essais nucléaires", a indiqué lors d’une conférence de presse régulière Mao Ning, une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Des explosions "non nucléaires" selon le ministre de l’Energie

Le ministre américain de l’Energie Chris Wright a lui indiqué dimanche sur Fox News que les Etats-Unis ne procéderaient pas à des "explosions nucléaires". "Ce sont ce qu’on appelle des 'explosions non critiques', c’est-à-dire que vous testez toutes les autres parties d’une arme nucléaire pour vous assurer qu’elles composent la géométrie appropriée et qu’elles déclenchent l’explosion nucléaire", a-t-il expliqué. "Les essais que nous allons faire sont sur des nouveaux systèmes, et une fois de plus, il s’agit d’explosions non nucléaires", a insisté le ministre.

Donald Trump a suscité vives inquiétudes et protestations dans le monde entier quand il a annoncé jeudi avoir ordonné au Pentagone de "commencer à tester nos armes nucléaires sur un pied d’égalité" avec la Russie et la Chine. Depuis, il a réitéré son intention de reprendre les essais d’armes nucléaires, sans dire ce qu’il projetait exactement. Le doute demeure sur son propos : parle-t-il d’essais d’armes capables de porter une tête nucléaire ou bien de la détonation même d’une charge nucléaire ?

Cette décision choc intervient dans un contexte géopolitique incandescent, à un moment où la rhétorique nucléaire revient périodiquement au premier plan depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022. Aucune puissance n’a procédé officiellement à un essai nucléaire depuis trois décennies - à l’exception de la Corée du Nord (à six reprises entre 2006 et 2017). La Russie (alors Union soviétique) n’en a plus conduit depuis 1990 et la Chine depuis 1996. Mais de nombreux pays, Etats-Unis en tête, effectuent régulièrement des tests de vecteurs - missiles, sous-marins, avions de chasse ou autres. Washington est signataire du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (Tice). Procéder à une explosion nucléaire en constituerait une violation flagrante.

© afp.com/Anna Moneymaker

Le président américain Donald Trump s'exprime dans le bureau ovale de la Maison Blanche, à Washington, le 9 octobre 2025

L’Allemagne et la Belgique touchées par de nouveaux survols de drones

3 novembre 2025 à 07:50

Un mois après le survol de l’aéroport de Munich par des drones, un nouvel appareil a causé l’interruption du trafic aérien dimanche 2 novembre à l’aéroport de Brème, au nord de l’Allemagne. Le drone a été repéré "aux abords immédiats de l’aéroport" vers 19h30 heure locale, a indiqué la police. Le trafic a ensuite été suspendu pendant près d’une heure, occasionnant des retards selon le site Flightradar. La police allemande n’a pas encore pu identifier clairement l’origine du drone.

Vendredi soir, l’apparition d’un autre appareil aux abords de la capitale allemande avait également entraîné l’interruption du trafic à l’aéroport de Berlin, et ce pendant près de deux heures. Les autorités allemandes ont à plusieurs reprises mis en garde contre la menace croissante posée par les drones, et tentent de mettre en place des mesures pour s’en prémunir après une série d’incursions d’appareils non identifiés dans des aéroports et sites militaires cette année. Berlin, l’un des principaux soutiens de l’Ukraine face à la Russie, soupçonne Moscou d’être à l’origine de certaines de ces activités.

Une base de l’Otan survolée

La Belgique a également été victime d’incursions dans son espace aérien pendant le week-end du 1er novembre. Des appareils ont été aperçus trois soirs de suite au-dessus de la base aérienne de Kleine-Brogel, dans le nord-est du pays. Selon le quotidien belge La Libre, quatre engins ont survolé dimanche soir cette base utilisée par l’Otan, qu’un hélicoptère de la police a tenté de poursuivre. Ils ont finalement disparu en direction des Pays-Bas. La nuit précédente, des drones suspects "de type plus grand et volant à haute altitude" avaient également été signalés au-dessus de la base, selon le ministre de la Défense Theo Francken. Les autorités belges avaient également tenté de prendre en chasse le drone et d’utiliser un brouilleur, sans succès.

"Il ne s’agissait pas d’un simple survol, mais d’une commande claire visant Kleine-Brogel", a affirmé Theo Francken sur le réseau social X. Si une enquête des services de renseignements belges est encore en cours pour déterminer l’origine de cette incursion, auprès de la RTBF, le ministre a privilégié la piste de l’espionnage militaire. La base de Kleine-Brogel est en effet utilisée par l’Otan et a même accueilli des exercices de l’Alliance transatlantique en octobre, rassemblant près de 2 000 militaires, selon le journal allemand Der Spiegel. L’armée américaine y stocke par ailleurs des munitions, et la base fait depuis plusieurs années l’objet de spéculations quant à la présence d’armes nucléaires - des informations non confirmées, rappelle le journal.

"Il est strictement interdit de faire voler des drones au-dessus des quartiers militaires. La Défense doit tout mettre en œuvre pour abattre ces drones", avait insisté Theo Francken samedi. Début octobre, des drones non identifiés avaient déjà survolé le camp militaire belge d’Elsenborn, situé non loin de la frontière avec l’Allemagne.

Un "mur de drones" d’ici 2027

D’ici à 2027, l’Union européenne veut mettre en place un "mur" antidrones, après une série d’incursions dans le ciel européen fin septembre, notamment au-dessus de l’aéroport de Copenhague (Danemark), en Roumanie, en Pologne et en Norvège. En septembre, la réponse de l’Otan à l’entrée d’une vingtaine de drones russes dans l’espace aérien de la Pologne avait mis en évidence les lacunes dans l’arsenal européen. L’Alliance atlantique avait dû recourir à de coûteux missiles pour abattre ces appareils.

Afin de mettre en œuvre ce nouveau système de défense, plus adapté et plus économique, l’UE entend s’appuyer sur l’expérience acquise par l’Ukraine depuis son invasion par l’armée russe en février 2022. Ce pays, qui dispose désormais d’une industrie de fabrication de drones et surtout d’intercepteurs de drones unique en Europe, a promis son aide.

© dpa Picture-Alliance via AFP

Le trafic a été interrompu pendant près d'une heure à l'aéroport de Brème, dans le nord de l'Allemagne, après l'incursion d'un drone.

Accord de 1968 : l’Algérie reste de marbre après le vote des députés français

3 novembre 2025 à 07:35

Le ministre algérien des Affaires étrangères Ahmed Attaf a affirmé dimanche 2 novembre que l’adoption à l’Assemblée nationale française d’une résolution visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 était, pour le moment, une affaire "franco-française".

"C’est attristant de voir un pays aussi grand que la France faire de l’histoire d’un autre pays, indépendant, souverain, l’objet d’une compétition électorale anticipée en France", a dit Ahmed Attaf dans un entretien à la chaîne d’information algérienne AL24. "Très sincèrement, j’ai beaucoup de respect pour l’Assemblée nationale française, mais lorsque j’ai vu ce vote […], la première pensée qui m’est venue à l’esprit (est) 'la course à l’échalote se poursuit'", a-t-il déclaré.

Jeudi, les députés français ont adopté une proposition de résolution du Rassemblement national (RN, extrême droite) visant à "dénoncer" l’accord franco-algérien de 1968, dans un geste symbolique. Ce texte, non contraignant, a été adopté à une majorité d’une voix par la chambre basse du Parlement français, grâce à l’appui de députés des partis de droite LR et Horizons.

"Sur le fond, cette affaire est une affaire entre l’Assemblée nationale française et le gouvernement français. C’est une affaire intérieure, c’est une affaire franco-française. Elle ne nous concerne pas pour le moment", a souligné le chef de la diplomatie algérienne.

"Nous espérons ne rien voir venir"

Ahmed Attaf a toutefois précisé qu'"elle pourrait nous concerner si ça devient une affaire de gouvernement à gouvernement parce que l’accord de 68 est un accord intergouvernemental. C’est un accord international et le gouvernement français ne nous a rien dit à ce sujet et donc sur le fond, nous ne réagissons pas." "Nous n’avons rien vu venir et nous espérons ne rien voir venir", a conclu le ministre algérien.

Cet accord, signé six ans après la fin de la guerre d’Algérie (1954-1962), crée un régime d’immigration favorable pour les Algériens, qui n’ont pas besoin de visa spécifique pour rester plus de 3 mois en France et accèdent plus rapidement que les autres étrangers aux titres de séjour pour 10 ans, y compris dans le cadre du regroupement familial.

Paris et Alger sont empêtrés depuis plus d’un an dans une crise diplomatique, à la suite de la reconnaissance à l’été 2024 par la France d’un plan d’autonomie "sous souveraineté marocaine" pour le Sahara occidental.

© afp.com/Philemon HENRY

Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot serrant la main de son homologue algérien Ahmed Attaf le 6 avril 2025 à Alger.

Au Mexique, Claudia Sheinbaum joue les équilibristes face à Donald Trump

3 novembre 2025 à 06:00

Tout juste nommé aux Affaires étrangères par Donald Trump, Marco Rubio entame sa première tournée diplomatique fin janvier dernier. Et les destinations n’ont pas été choisies au hasard : Panama, Guatemala, Salvador. Que des pays d’Amérique latine.

Les liens entre Marco Rubio et cette région, ça vous dit peut-être quelque chose. On en avait parlé dans un précédent épisode de La Loupe.

Dans un ancien podcast, Axel Gyldèn, du service monde de L’Express, nous expliquait qu’avec ce secrétaire d’Etat d’origine cubaine, l'Amérique latine pourrait bien redevenir une priorité pour Washington.

Même si l'agenda international du président américain est chargé, il est clair désormais que Donald Trump ne veut pas lâcher l'Amérique latine. Mais la tâche s'annonce difficile.

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Cet épisode a été écrit et présenté par Solène Alifat et réalisé par Jules Krot.

Crédits : France 24, VisualPolitik, The Guardian

Musique et habillage : Emmanuel Herschon/Studio Torrent

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Donald Trump II, jour 1 : comment il a dessiné les contours de l'Amérique qui vient

Entre Donald Trump et Hugo Chavez, de troublantes similitudes

© afp.com/CHARLY TRIBALLEAU, Rodrigo Oropeza

Montage photo montrant le président élu américain Donald Trump et la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum
Reçu hier — 2 novembre 2025 L'Express

Donald Trump, un an à la Maison-Blanche : ce que disent les derniers sondages

2 novembre 2025 à 17:31

Un an après la réélection de Donald Trump, les sondages suggèrent que la cote de popularité du président et multimilliardaire américain est globalement mauvaise. Mais les instituts nuancent l’ampleur de son impopularité. D'après les chiffres, l’immense majorité des études réalisées depuis début octobre situent Donald Trump dans un taux d’approbation négatif, allant de -1 à -18 points. Sur le long terme, toutefois, ces résultats ne traduisent pas une chute significative pour le président républicain.

Entre un léger redressement…

Selon le dernier sondage ActiVote, publié le 1er novembre, la popularité de Donald Trump demeure négative, mais connaît un léger redressement par rapport aux mois précédents. Sa cote d’approbation est passée de 43,5 % à 46 %, tandis que son taux de désapprobation a reculé de 51,5 % à 50,6 %, portant sa cote nette à – 4,6 %. Soit un peu mieux que lors des derniers sondages.

Ces chiffres représentent, selon ActiVote, les meilleurs résultats de Donald Trump depuis quatre mois, supérieurs à sa moyenne de 41 % durant son premier mandat, ainsi qu’à celle de Joe Biden sur l’ensemble de sa présidence (41 %) et dans sa dernière année (40 %). Le sondage, réalisé auprès de 574 Américains (c’est l’un des échantillons de votants les moins fournis) entre le 1er et le 31 octobre, repose sur un système de notation par étoiles converties en pourcentages d’approbation et de désapprobation — une méthode indicative, mais peu précise.

ActiVote détaille par ailleurs le profil habituel des soutiens du président parmi les participants au sondage : hommes, électeurs ruraux, plus de 50 ans, blancs, républicains, foyers aisés et personnes ayant suivi des études supérieures courtes. Sur le plan politique, son appui reste massif à droite (87 %) et quasi nul à gauche (96 %). Les centristes, avec une cote nette de + 11 points, constituent la principale source de cette amélioration.

… et une baisse par rapport au début du mandat

Un autre sondage, plus sévère, dresse un tableau différent. Réalisé sur plus de 2 000 personnes par YouGov pour CBS News, il estime que la cote d’approbation nette du président s’établit désormais à – 18, soit son plus bas niveau depuis son investiture et trois points en dessous du minimum atteint lors de son premier mandat. Contrairement à la plupart de ses prédécesseurs, "les deux mandats de Donald Trump ont commencé avec une opinion publique divisée de manière égale", note le grand quotidien économique britannique The Economist, qui a analysé les résultats de l’étude.

Réélu sur une vague de pessimisme économique, Donald Trump avait promis aux électeurs que "les revenus allaient s’envoler, l’inflation disparaîtrait complètement, les emplois reviendraient en force et la classe moyenne prospérerait comme jamais auparavant" pendant son second mandat. "Jusqu’ici, les Américains sont déçus", conclut The Economist. Pour le journal, la gestion de l’économie et de l’inflation, du président américain, jugée positive à ses débuts, est désormais largement désapprouvée, en raison notamment de la guerre commerciale et de la réaction négative des marchés. Selon YouGov, les électeurs rejettent également sa politique migratoire, pourtant un pilier central de sa campagne de réélection.

© afp.com/CHIP SOMODEVILLA

Les sondages suggèrent que la cote de popularité du président réélu est globalement mauvaise.

La "diplomatie d'orfèvre" du Maroc : comment Rabat a conquis l'ONU sur le Sahara occidental

2 novembre 2025 à 16:05

Certains textes portent en eux le souffle des grandes mutations. Le projet de résolution du Conseil de sécurité sur le statut du Sahara occidental, voté ce 31 octobre 2025 aux Nations unies, est de ceux-là. Adopté par 11 voix sur 15, zéro voix contre (l’Algérie ayant refusé de voter), le texte valide pour la première fois le plan d’autonomie marocain de 2007, marquant un tournant en faveur de Rabat plus de cinquante ans après le début du conflit opposant le Maroc au Front Polisario soutenu par l’Algérie.

Portée par les Etats-Unis, la résolution devait recueillir au moins neuf voix sur quinze au Conseil de sécurité et éviter tout veto des cinq puissances permanentes : Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Russie, Chine. Les trois premiers étaient déjà acquis à la cause marocaine, les deux autres, opposants historiques, se sont finalement abstenus après avoir entretenu le flou. "Le Maroc espérait faire basculer la Chine avec ses intérêts économiques, mais celle-ci ne veut pas se fâcher avec l’Algérie", commente Emmanuel Dupuy, président de l’Institut de prospective et de sécurité en Europe. Pékin, refusant toute ingérence dans le conflit, compte effectivement à la fois sur le Maroc et l’Algérie pour intégrer le marché maghrébin et développer son projet d’extension de la route de la soie vers le continent américain.

Le Sahara, priorité diplomatique

Pour l’Algérie, c’est un coup dur. Malgré une meilleure prise en compte des revendications indépendantistes, sous la pression algérienne, le texte "ne reflète pas suffisamment la doctrine onusienne en matière de décolonisation", a réagi l’ambassadeur algérien Amar Bendjama, qui a refusé de participer au vote. Le Front Polisario a de son côté qualifié le plan de Rabat de "parodie" qui ne "vaut pas plus que le papier sur lequel il est écrit".

Le texte appelle le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres et son émissaire sur ce dossier, Staffan de Mistura, à mener des négociations "sur la base" de ce plan pour parvenir à un accord mutuellement acceptable. "Nous ouvrons un nouveau chapitre victorieux dans le processus de consécration de la marocanité du Sahara, destiné à clore définitivement ce dossier", a réagi le roi du Maroc Mohammed VI, saluant un "changement historique" du Conseil.

En réalité, ce tournant diplomatique n’est pas le fruit du hasard, mais plutôt d’un long travail d’influence mené tous azimuts par Rabat depuis plus d’un demi-siècle. Depuis son indépendance en 1956, le Maroc estime avoir perdu injustement des territoires et revendique des liens anciens avec les tribus sahariennes et l’Afrique de l’Ouest. En 1975, alors que la Cour internationale de justice réfute "tout lien de souveraineté territoriale" avec le Sahara occidental, Hassan II fait de sa marocanité une cause nationale, mobilisant l’essentiel des efforts diplomatiques du Royaume. Il lance la "marche verte" la même année et négocie secrètement avec l’Espagne les accords de Madrid, qui cèdent le nord du Sahara au Maroc et le sud à la Mauritanie. Exclu des négociations, le Front Polisario, armé par l’Algérie, entre en guerre contre les deux occupants. En 1980, le Maroc construit un mur des Sables de 2 700 kilomètres et lance des investissements massifs dans ces "provinces du sud", construisant des mosquées, des hôpitaux, des hôtels, des écoles, afin de rallier la population à la marocanité du territoire (politique du "fait accompli").

À son arrivée au trône en 1999, Mohammed VI fait du dossier saharien sa priorité, s’impliquant personnellement et étendant le réseau diplomatique et économique du Royaume vers la Chine, la Russie, les puissances du Golfe, et l’Amérique latine, tout en consolidant ses liens avec les Etats-Unis et l’Europe, selon Pierre Vermeren, historien spécialiste du Maghreb et auteur du Maroc en 100 questions (Ed. Tallandier, 2020). Pour renforcer l'influence du Royaume, il adapte le Maroc aux nouvelles réalités économiques en développant son offre d’exportation et en investissant dans des secteurs clés pour l'avenir (télécommunications, agriculture, énergie, finance, BTP...) pour positionner le pays non seulement comme le futur centre de l’Afrique, mais aussi comme un acteur significatif et visible sur la scène économique internationale.

Rassurer la communauté internationale

"Le Royaume pratique une diplomatie d’orfèvre, en s’adressant à tout le monde selon ses intérêts : tant aux puissances occidentales, profitant des faiblesses diplomatiques de son voisin algérien, qu’aux économies émergentes et à ses partenaires régionaux", explique Pierre Vermeren. Ses matières premières, ses investissements dans les énergies renouvelables, ses achats d'armes, ses eaux poissonneuses et ses exportations agricoles, sont autant d'arguments économiques qui renforcent ses liens commerciaux et stratégiques à travers le monde. Concernant les puissances du Golfe, soutiens de premier plan à la marocanité du Sahara, les intérêts sont d'abord géopolitiques, partageant avec le Maroc des préoccupations dans les différents dossiers qui concernent la région de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, notamment la lutte contre le terrorisme et le séparatisme et contre la menace iranienne.

En 2007, il propose un statut d’autonomie pour le Sahara occidental, au cœur du projet de résolution de l’ONU actuellement porté par les Etats-Unis. Ce plan prévoit la mise en place d’autorités locales – législative, exécutive, judiciaire – élues par les habitants, le Maroc conservant les compétences régaliennes en matière de défense, de politique étrangère et de religion. Depuis, la ligne diplomatique du Maroc ne s’écarte plus d’un iota de ce plan d’autonomie. Objectif : rassurer et séduire la communauté internationale.

Et un à un, Rabat accumule les soutiens. Le premier parmi les grandes puissances occidentales est décisif : en 2020, quelques mois avant la fin de son premier mandat, Donald Trump reconnaît la marocanité du Sahara en échange de la normalisation des relations du Maroc avec Israël. Ces accords d’Abraham entraînent une série de ralliements à la position marocaine : en 2022, l’Espagne, sous la pression migratoire exercée par Rabat, abandonne sa neutralité officielle et soutient le plan d’autonomie, suivie la même année par l’Allemagne et Israël, puis par la France en octobre 2024 après trois ans de tensions diplomatiques, ou encore le Royaume-Uni en juin dernier.

Le pari de l’Afrique

Le Maroc a aussi rallié d’anciens soutiens du Polisario, comme le Ghana ou le Malawi. Depuis son retour à l’Union africaine en 2017, Rabat a renforcé son action diplomatique en Afrique, surtout auprès des pays pauvres autrefois proches de l’Algérie. "Le premier pilier de la politique étrangère du Maroc aujourd’hui, c’est l’Afrique où ses entreprises sont très présentes dans le secteur des banques, de la téléphonie, des énergies vertes ou du BTP, considère Emmanuel Dupuy. Il sait aussi s’adresser à des pays enclavés, en leur offrant un accès à l’Atlantique grâce à ses infrastructures routières, portuaires et ferroviaires, ou au gaz naturel avec le projet de gazoduc Maroc-Nigéria." En tant que "Commandeur des croyants", le roi mène également en Afrique une politique religieuse d’influence, par la promotion d'un islam modéré en finançant la construction de mosquées et la formation d'imams en Afrique de l’Ouest.

Aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, s’ajoutent dix membres élus pour deux ans : l’Algérie, la Corée du Sud, le Danemark, la Grèce, le Guyana, le Pakistan, le Panama, la Sierra Leone, la Slovénie et la Somalie. Ces derniers mois, à l’approche du vote, la diplomatie marocaine s’est activée pour convaincre les indécis, stimulée par ses nouveaux soutiens et l’approche d’une issue favorable : depuis début 2025, son chef, le ministre des affaires étrangères marocain Nasser Bourita, a rencontré ses homologues du Panama, de la Sierra Leone, de la Corée du Sud, de la Somalie. La France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont eux-mêmes joué le rôle de relais de la position marocaine en vue d’obtenir la majorité la plus large possible lors du vote.

Prochaine étape, un référendum devrait être organisé au terme de négociations entre les trois parties : Rabat, Alger et le Front Polisario. Le mandat de la mission des Nations unies chargée de l’organisation de ce référendum (Minurso), qui expirait le 31 octobre, vient d’être renouvelé pour un an.

© Maghreb Arabe Press (MAP) / AFP

Le roi du Maroc Mohammed VI, le 18 septembre 2025, à Casablanca.

Guerre en Ukraine : quand l’armée russe torture et exécute ses propres soldats

2 novembre 2025 à 12:15

Des commandants russes exécutent ou envoient délibérément à la mort des soldats refusant de combattre en Ukraine, selon une enquête du média indépendant Verstka, fondé par des journalistes d’investigation en exil. S’appuyant sur des témoignages, des vidéos, des plaintes officielles et documents internes, le média affirme avoir identifié 101 militaires russes accusés d’avoir assassiné, torturé ou puni à mort leurs propres subordonnés.

Au moins 150 décès ont été vérifiés par le média, un chiffre qui pourrait s’avérer bien plus élevé. Depuis le début de l’invasion russe, des rapports évoquent déjà des soldats tués par leur camp ou des unités de blocage empêchant toute retraite. Des accusations que le Kremlin rejette systématiquement.

Les méthodes de terreur internes sont décrites en détail dans le rapport de Verstka. Au fil des lignes, on découvre l’horreur des "tireurs d’exécution", soldats qui reçoivent l’ordre d’abattre les réfractaires, puis de jeter leurs corps dans des rivières ou des fosses peu profondes, en les enregistrant comme morts au combat. Autre technique commune, selon des témoignages : l’usage de drones et d’explosifs pour "achever" les blessés ou les fuyards. Dans plusieurs cas, des officiers auraient ordonné à des opérateurs de drones de larguer des grenades sur leurs propres hommes, maquillant ces meurtres en frappes ennemies.

Combats de "gladiateurs" et missions suicides

A ces meurtres s’ajoute parfois la barbarie. Selon Verstka, des soldats ayant désobéi auraient été jetés dans des fosses grillagées, arrosés et battus pendant des heures. Parfois même, contraints de se battre entre eux "dans des combats de gladiateurs à mort". Une vidéo diffusée en mai 2025 montre deux hommes torse nu dans une fosse tandis qu’une voix dit : "Le commandant Kama a dit que celui qui battra l’autre à mort sortira de la fosse". La voix poursuit : "Achève-le, qu’est-ce que tu attends ?", jusqu’à ce qu’un homme s’effondre.

Le média relie également plusieurs meurtres à des extorsions : des commandants exigeraient régulièrement des paiements pour éviter les missions suicides, ceux qui refusent étant éliminés. L’enquête décrit aussi des cas de soldats envoyés volontairement à la mort, déployés comme mayachki (des "balises") — forcés d’avancer devant les groupes d’assaut, sans équipement, pour attirer le feu ennemi.

Selon l’enquête, ces pratiques qui se limitaient au départ aux "unités pénales" composées d’anciens détenus, se sont désormais étendues à l’armée régulière. Verstka dit avoir obtenu des données biographiques sur plus de 60 d’entre eux. La plupart des auteurs identifiés sont des officiers de 30 à 40 ans, vétérans de campagnes précédentes. Le média affirme aussi que le bureau du procureur militaire russe a reçu près de 29 000 plaintes au premier semestre 2025, dont 12 000 pour des sanctions infligées par des supérieurs. Aucun des officiers responsables n’a à ce jour été poursuivi.

© AFP

Au moins 150 cas de meurtres de soldats russes par des supérieurs de l'armée ont été vérifiés par le média Verstka.

Pourquoi Donald Trump menace le Nigeria d’une intervention militaire

2 novembre 2025 à 10:25

Donald Trump fait planer la menace d’une "action militaire" au Nigeria. Samedi 1er novembre, le président américain a déclaré avoir ordonné au Pentagone de se préparer à une possible opération dans ce pays d’Afrique subsaharienne peuplé par 230 millions d’habitants, accusant le Nigeria de ne pas faire assez pour endiguer la violence contre les chrétiens. Abuja nie, expliquant être victime d’un contexte de violences généralisées déconnectées du facteur religieux, et demande plutôt de l’aide aux Etats-Unis.

Sur Thruth Social, il a dénoncé le "massacre de masse" de chrétiens et menacé de "cesser immédiatement toute aide et assistance au Nigeria" si le gouvernement ne "bouge pas vite". Donald Trump a ajouté que les Etats-Unis "pourraient très bien entrer dans ce pays désormais discrédité, les armes à la main, pour anéantir complètement les terroristes islamiques qui commettent ces horribles atrocités". Il précise dans le même message : "Je donne par la présente instruction à notre Département de la Guerre de se préparer à une possible action. Si nous attaquons, ce sera rapide, vicieux et doux, tout comme les voyous terroristes attaquent nos CHERS chrétiens ! AVERTISSEMENT : LE GOUVERNEMENT NIGÉRIAN FERAIT MIEUX D’AGIR VITE !".

Le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, a répondu sur les réseaux sociaux : "Yes sir", publiant une capture d’écran des propos de Trump. Il a ajouté : "L’assassinat de chrétiens innocents au Nigeria — et partout — doit cesser immédiatement. Le Département de la Guerre se prépare à agir. Soit le gouvernement nigérian protège les chrétiens, soit nous tuerons les terroristes islamiques qui commettent ces horribles atrocités."

Un contexte de violences

Donald Trump affirme que "le christianisme fait face à une menace existentielle au Nigeria" à cause de "violations systématiques, continues et flagrantes de la liberté religieuse". Il a déjà désigné le pays comme "Country of Particular Concern" au titre de l’International Religious Freedom Act. Ces déclarations interviennent dans un contexte de violences complexes au Nigeria, où tant les chrétiens que les musulmans sont victimes d’attaques de groupes islamistes radicaux, ainsi que de conflits communautaires, ethniques et liés aux ressources. Selon la chaîne américaine CNN, "bien que les chrétiens figurent parmi les cibles, des rapports locaux indiquent que la plupart des victimes sont des musulmans vivant dans le nord majoritairement musulman du Nigeria".

Le président nigérian Bola Tinubu a rejeté ces accusations, affirmant que "la caractérisation du Nigeria comme religieusement intolérant ne reflète pas notre réalité nationale" et rappelant les "efforts constants et sincères du gouvernement pour sauvegarder la liberté de religion et de croyance pour tous les Nigérians". Son porte-parole, Bayo Onanuga, a dénoncé une "grossière exagération de la situation nigériane", précisant que "chrétiens, musulmans, églises et mosquées sont attaquées de manière aléatoire" et demandant "un soutien militaire américain" plutôt qu’une désignation comme nation d’intérêt particulier.

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Malgré des rapports indiquant qu'ils ne sont pas particulièrement visés, Donald Trump dénonce le "massacre de masse" de chrétiens au Nigeria.

Angleterre : dix blessés dont neuf graves dans une attaque à l’arme blanche près de Cambridge

2 novembre 2025 à 12:04

La police a affirmé, dimanche 2 novembre, écarter à ce stade un motif "terroriste" après l’attaque à l’arme blanche qui a fait au moins dix blessés, dont neuf graves, la veille dans un train près de Cambridge en Angleterre et pour lequel deux suspects ont été arrêtés.

"A ce stade, rien ne suggère qu’il s’agisse d’un incident terroriste", a déclaré un responsable de la British Transport Police, le superintendant John Loveless lors d’un bref point presse. Il a également précisé que les deux personnes interpellées pour "suspicion de tentative de meurtre", sont "un homme noir de 32 ans, de nationalité britannique, et un homme de 35 ans, de nationalité britannique et d’origine caribéenne".

Les forces de l’ordre ont été alertées d’un incident vers 19h40 locales (et GMT), suite au déclenchement du système d’alarme, et sont intervenues en gare de Huntingdon, située dans la région de la ville universitaire de Cambridge, à environ 120 kilomètres au nord de la capitale. Dans la nuit, la police des transports a fait état d’un bilan de 10 blessés hospitalisés dont neuf dont le pronostic vital est engagé.

"Ils ont un couteau !"

Des témoins interrogés par le journal The Times ont indiqué avoir vu un homme armé d’un grand couteau et des passagers se cacher dans les toilettes du train pour se protéger. Un témoin cité par plusieurs médias a indiqué avoir vu un homme courir dans le wagon, le bras ensanglanté, en criant : "Ils ont un couteau !". Un autre a rapporté avoir vu "du sang partout".

Olly Foster, cité par la BBC, a raconté avoir d’abord cru à une plaisanterie liée à Halloween lorsqu’il a entendu des passagers crier "Fuyez ! Il y a un type qui poignarde tout le monde". Il a décrit des sièges couverts de sang et un passager tentant de protéger une fillette lors de l’incident qui "semblait ne jamais devoir se terminer". Un autre passager cité par Sky News a rapporté avoir vu, une fois le train arrêté, des policiers faire usage de leur taser (pistoler à impulsion électrique) sur le quai pour maîtriser un homme armé d’un grand couteau.

"Nous menons actuellement des vérifications urgentes afin de déterminer ce qui s’est passé et il faudra peut-être un certain temps avant que nous soyons en mesure de confirmer quoi que ce soit", a averti le commissaire Chris Casey, cité dans un communiqué de la police des transports, appellant à ne pas "spéculer sur les causes de l’incident".

Avant même que n’émergent ces témoignages, le Premier ministre Keir Starmer avait qualifié sur X l’incident d'"extrêmement préoccupant". "Mes pensées vont à toutes les personnes touchées, et je remercie les services d’urgence pour leur réaction", a-t-il indiqué.

The appalling incident on a train near Huntingdon is deeply concerning.

My thoughts are with all those affected, and my thanks go to the emergency services for their response.

Anyone in the area should follow the advice of the police.

— Keir Starmer (@Keir_Starmer) November 1, 2025

Le train où s’est produit l’attaque était parti à 18h25 de la ville de Doncaster (nord de l’Angleterre), avec pour destination la gare londonienne de King’s Cross. La compagnie ferroviaire London North Eastern Railway (LNER), qui exploite des liaisons ferroviaires dans l’est de l’Angleterre et en Écosse, a appelé les voyageurs à éviter tout déplacement, prévoyant des "perturbations majeures".

Dans un pays où la législation sur les armes à feu est très stricte, les violences à l’arme blanche ont fortement augmenté ces quinze dernières années en Angleterre et au Pays de Galles, selon des chiffres officiels. Le Premier ministre a qualifié par le passé la situation de "crise nationale". Le gouvernement Starmer a pris plusieurs mesures pour durcir l’accès aux armes blanches depuis son arrivée au pouvoir en juillet 2024. Près de 60 000 d’entre elles ont été saisies ou récupérées par la police en dix ans, avait indiqué mercredi la ministre de l’Intérieur Shabana Mahmood.

Cette attaque intervient un mois après l’attaque contre une synagogue au nord de Manchester, où un homme avait attaqué des fidèles armé d’un couteau. Deux personnes avaient été tuées, l’une d’entre elles d’une balle tirée par la police intervenue sur les lieux.

© afp.com/JUSTIN TALLIS

Des policiers dans la gare d'Huntingdon en Angleterre après une attaque à l'arme blanche le 1er novembre 2025

France-Algérie : Laurent Nuñez veut mettre fin à la "méthode brutale" de Bruno Retailleau

2 novembre 2025 à 08:40

Le ministre de l’Intérieur, Laurent Nuñez, a mis en garde samedi 1er novembre contre la méthode du "bras de fer" avec l’Algérie, quelques jours après l’adoption à l’Assemblée nationale d’une résolution du RN visant à "dénoncer" l’accord franco-algérien de 1968.

"Ceux qui font croire aux Français que le bras de fer et la méthode brutale sont la seule solution, la seule issue, se trompent. Ça ne marche pas, dans aucun domaine", a déclaré Laurent Nuñez au Parisien, ajoutant qu’il regrettait "les conditions dans lesquelles s’est déroulé ce vote". "Preuve" de l’inefficacité de cette méthode, "le canal est totalement coupé aujourd’hui avec Alger", a-t-il ajouté.

Depuis son arrivée au gouvernement, à rebours de son prédécesseur à Beauvau, Bruno Retailleau, Laurent Nuñez a souligné à plusieurs reprises la nécessité de renouer "le dialogue" avec Alger, mettant en avant les besoins de coopération sécuritaire notamment dans la lutte anti-djihadiste au Sahel.

Des relations au point mort

Le gel des relations entre la France et l’Algérie se traduit notamment par l’arrêt total de la coopération migratoire, explique Laurent Nuñez : "L’Algérie n’accepte plus ses ressortissants en situation irrégulière depuis le printemps dernier". En 2025, 500 éloignements forcés vers ce pays ont pu avoir lieu à fin octobre, contre 1 400 l’an dernier sur la même période, selon lui. Par conséquent, les centres de rétention administrative "sont occupés à plein" : "40 % des places sont occupées par des ressortissants algériens".

Le départ du gouvernement du précédent ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, partisan d’une ligne dure contre Alger, avait permis ces dernières semaines d’amorcer en coulisses des discussions entre la France et l’Algérie. Mais la secousse provoquée par l’adoption jeudi d’une résolution visant à dénoncer la convention du 27 décembre 1968 entre les deux pays télescope les prémices d’un dialogue.

Le traité signé six ans après la fin de la guerre d’Algérie, crée un régime d’immigration favorable pour les Algériens, qui n’ont pas besoin de visa spécifique pour rester plus de trois mois dans l’Hexagone et accèdent plus rapidement que les autres étrangers aux titres de séjour pour 10 ans, y compris dans le cadre du regroupement familial. Sa dénonciation est réclamée de longue date par la droite et l’extrême droite.

© afp.com/Ludovic MARIN

Laurent Nuñez le 18 septembre 2025, à Paris
Reçu avant avant-hier L'Express

Crise des puces de Nexperia : l’Europe prise en étau entre la Chine et les Etats-Unis

1 novembre 2025 à 18:04

C’est un soulagement pour les constructeurs automobiles européens. La Chine a annoncé, samedi 1er novembre, assouplir son interdiction des exportations vers l’Europe des puces Nexperia, détenues par un fabricant chinois, mais produites aux Pays-Bas. Pékin avait en effet prohibé la mise sur le marché européen de ces composants électroniques, utilisés notamment dans l’automobile ou la fabrication d’électroménagers, en raison d’un différend avec La Haye. Cette dernière, souhaitant échapper aux sanctions américaines sur les entreprises chinoises, avait nationalisé in extremis Nexperia, s’attirant les foudres de Pékin.

La reprise des expéditions fait partie d’un accord commercial plus large, convenu par le président chinois Xi Jinping, et son homologue américain Donald Trump en Corée du Sud jeudi, selon le Wall Street Journal. Des représentants chinois et de l’Union européenne (UE) ont également discuté de la question lors de leur rencontre jeudi à Bruxelles.

Puces fabriquées en Europe

L’entreprise Nexperia est basée à Nimègue, aux Pays-Bas. En 2018, cette filiale de NXP (ex-Philips) est rachetée par des Chinois. Aujourd’hui, elle appartient au groupe Wingtech, spécialisé dans la fabrication de semi-conducteurs et partiellement détenu par l’Etat chinois. Les puces sont fabriquées en Europe avant d’être envoyées en Chine pour finition, puis vendues à nouveau sur le marché européen. 49 % des composants électroniques utilisés dans l’industrie automobile européenne sont ainsi fabriqués par Nexperia.

A l’époque, le rachat de NXP Semiconductors par Pékin n’alarme personne. L’industrie mondiale n’est pas encore totalement consciente du caractère stratégique de ces puces électroniques - elle s’en rendra compte avec la crise sanitaire de 2020 et les pénuries engendrées. En 2022, les Européens vont ainsi commencer à prendre des mesures pour tenter de contenir l’influence de la Chine dans ce domaine : le gouvernement britannique bloque par exemple le rachat par Nexperia de Newport Wafer Fab, fabriquant des plaques de silicium dans lesquelles sont fondues les puces. Londres parle à l’époque d’une question de "sécurité nationale".

Puis en 2024, Washington inscrit Wingtech sur sa liste noire des entreprises technologiques avec lesquelles il est interdit de commercer pour des questions de "sécurité nationale". Pour les Etats-Unis, l’entreprise a beau être basée aux Pays-Bas, son patron, le chinois Zhang Xuezheng, constitue une menace.

Zèle politique ?

Fin septembre 2025, l’entreprise, détenue à plus de 50 % par une entité chinoise, est frappée par une nouvelle réglementation américaine. Pris de panique, le ministre néerlandais de l’Economie décide de nationaliser Nexperia, grâce à une loi de 1952 sur la "disponibilité des biens", encore jamais invoquée auparavant. Le ministère de l’économie "craignait que Nexperia ne transfère sa production de semi-conducteurs de l’Europe vers la Chine, ce qui aurait signifié la perte d’un des plus importants producteurs de semi-conducteurs européens", assure l’ancien président de Nexperia, Frans Scheper, dans Mediapart.

Mais il pourrait aussi s’agir d’un geste politique, preuve de la fidélité des Pays-Bas envers les Etats-Unis. En 2023 déjà, le géant néerlandais ASML, qui fabrique des machines de photolithographie (essentielles à la production de puces électroniques avancées) avait été obligé d’abandonner ses ventes vers la Chine, son plus grand marché, en raison de pressions américaines.

Dans le cas présent, ce zèle envers Washington a "mis en danger l’approvisionnement de l’industrie automobile européenne. Car, en face, Washington est évidemment incapable de fournir l’UE en puces", remarque Mediapart. Dans la foulée, Pékin a interdit les réexportations de ces produits de la Chine vers l’Europe, créant la panique.

Guerre commerciale

"Sans ces puces, les sous-traitants ne peuvent pas construire les pièces détachées et les composants qu’ils fournissent aux constructeurs automobiles, ce qui fait courir le risque d’arrêts de production", écrit L’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA). Plus importante puissance automobile d’Europe, avec notamment les groupes Volkswagen, Mercedes et BMW, l’Allemagne a été l’une des premières à saluer des signes "positifs" après l’annonce chinoise.

Si le conflit est en pause, l’affaire n’en demeure pas moins "une démonstration très éloquente des tensions extrêmes entre la Chine et les Etats-Unis au sujet des semi-conducteurs, devenus encore plus stratégiques à l’heure de la course à l’intelligence artificielle", observe un connaisseur du secteur auprès des Echos. Et la situation est d’autant plus préoccupante que l’Europe peine à développer ses propres fabricants de semi-conducteurs. "Washington peut compter sur une influence militaire et politique forte, mais Pékin tient en grande partie l’économie européenne", résume Mediapart.

© NurPhoto via AFP

Fin septembre, les Pays-Bas ont nationalisé de force le fabricant chinois Nexperia, disposant d'usines sur son sol. En représailles, Pékin avait suspendu l'exportation de ces puces électroniques vers l'Europe.

Grand retour de la prolifération nucléaire : ces pays qui veulent franchir le pas

1 novembre 2025 à 14:53

Donald Trump a-t-il relancé une course effrénée à la bombe atomique ? Vendredi 31 octobre, le président américain a réitéré l’intention des Etats-Unis de reprendre les essais d’armes nucléaires, sans toutefois préciser de quels tests il s’agirait - suscitant la panique. L’annonce intervenait à quelques heures d’une rencontre avec le président chinois Xi Jinping. S’agissait-il d’un coup de bluff face aux menaces chinoises et russes ? Quel peut être l’effet de telles annonces sur le risque de prolifération nucléaire ?

Il faut savoir qu’en tant que signataire du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (Tice), Washington ne peut légalement procéder à une explosion. Reste à savoir si Donald Trump parlait donc d’essais impliquant réellement des détonations, ou bien d’essais sur des missiles. En effet, les Etats-Unis et d’autres pays procèdent régulièrement à des tests sur des missiles ne transportant pas d’ogive (c’est-à-dire de charge explosive).

La guerre en Ukraine accélère le risque d'escalade nucléaire

"Vous le saurez très bientôt, mais nous allons procéder à des tests, oui. D’autres pays le font aussi. S’ils le font, nous le ferons aussi", a assuré Donald Trump à bord de l’avion présidentiel Air Force One. Aucune puissance n’a cependant procédé officiellement à un essai nucléaire avec détonation depuis trois décennies - à l’exception de la Corée du Nord (à six reprises entre 2006 et 2017). La Russie, alors URSS, n’en a plus conduit depuis 1990 et la Chine depuis 1996.

Depuis quelques années, le nucléaire a effectué son grand retour sur la scène internationale, de quoi inquiéter les défenseurs de la non-prolifération. Ces essais "ne doivent jamais être permis", a insisté jeudi Farhan Haq, porte-parole adjoint du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. "Nous ne devons pas oublier l’héritage désastreux des plus de 2 000 essais nucléaires menés ces 80 dernières années".

Si l'Iran place l'avancée vers l'arme atomique au coeur de sa politique depuis plus d'un demi-siècle, c'est surtout la guerre en Ukraine qui a fait office d'accélérateur, depuis 2022, avec un Vladimir Poutine menaçant constamment de recourir à l'arme nucléaire pour dissuader les Occidentaux de fournir un soutien militaire plus important à l’Ukraine. En 2024, la Russie a ainsi franchi un cap dans sa doctrine en considérant qu’une attaque provenant d’un pays ne disposant pas de l’arme nucléaire, mais soutenu par un pays la possédant, serait désormais considérée comme "une attaque conjointe".

Cette semaine, le président russe Vladimir Poutine s’est également félicité de l’essai final réussi d’un missile de croisière "d’une portée illimitée", puis de celui d’un drone sous-marin, deux engins à propulsion nucléaire, selon Moscou. Bien qu’affaiblie économiquement par la guerre, la Russie démontre ainsi qu’elle est toujours en mesure d’innover sur le plan militaire.

Selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), la Russie dispose actuellement de 4 309 ogives nucléaires déployées ou stockées, contre 3 700 pour les Etats-Unis et 600 pour les Chinois. La France, elle, en possède 290. Viennent ensuite le Royaume-Uni (225), l’Inde (172), le Pakistan (170), Israël (90) et la Corée du Nord (50).

Tentation nucléaire

Et les velléités de renforcer l'arsenal nucléaire sont croissantes autour du Globe : "Les doutes qu’a fait peser Trump sur la solidité de la garantie de sécurité américaine vis-à-vis de ses alliés ont suscité de nouvelles tentations nucléaires. Si bien qu’aujourd’hui de nombreux pays, Corée du Sud, Taïwan, Japon, Arabie saoudite, Turquie, Pologne, ont des velléités proliférantes", résume Le Figaro.

L’autre menace est celle de la Corée du Nord, qui a procédé à plusieurs essais, le dernier en 2017. Elle affirmait à l’époque "avoir fait exploser un dispositif à hydrogène pouvant être embarqué sur un missile capable d’atteindre le territoire continental des Etats-Unis", selon le Washington Post, estimant la puissance de l’ogive à 100 kilotonnes, cinq fois la puissance de l’explosion contre la ville de Nagasaki en 1945.

"Fanfaronnades"

La Chine a elle doublé la taille de son arsenal nucléaire en cinq ans, passant de 300 à 600 têtes, ce qui ne l’a pas empêché de condamner les Etats-Unis, appelant à "des mesures concrètes pour préserver le système mondial de désarmement et de non-prolifération".

Reste à savoir la véracité des menaces du milliardaire américain. "Le président, qui accorde une grande importance aux apparences, a été piqué au vif par les fanfaronnades du président Poutine au sujet des essais nucléaires, ainsi que par les discours qui les accompagnent sur la puissance nucléaire russe (et le défilé chinois de septembre)", soulignait, sur X, William Alberque, l’ancien directeur du centre de non-prolifération de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN).

© afp.com/ROBERTO SCHMIDT

Le président américain Donald Trump répond à des journalistes à bord de l'avion présidentiel Air Force One avant son départ de la base aérienne d'Andrews, près de Washington, le 31 octobre 2025

Sahara occidental : le Conseil de sécurité de l'ONU soutient le plan d'autonomie marocain

1 novembre 2025 à 09:13

Sous l'impulsion des Etats-Unis de Donald Trump, le Conseil de sécurité de l'ONU a apporté vendredi un soutien inédit au plan marocain d'autonomie du Sahara occidental, l'estimant la solution "la plus réalisable" pour résoudre un conflit enlisé depuis des décennies, malgré l'hostilité de l'Algérie.

Le Sahara occidental, colonie espagnole jusqu'en 1975, est contrôlé en majeure partie par le Maroc mais considéré comme un territoire non autonome par les Nations unies. Un conflit y oppose Rabat aux indépendantistes du Front Polisario, soutenus par l'Algérie. Jusqu'alors, le Conseil de sécurité pressait le Maroc, le Polisario, l'Algérie et la Mauritanie de reprendre des négociations – interrompues depuis 2019 – pour parvenir à une "solution politique réalisable, durable et mutuellement acceptable".

"Clore définitivement ce dossier"

Mais à l'initiative des Américains, chargés de ce dossier au Conseil, la résolution adoptée par 11 voix pour, aucune contre et trois abstentions - l'Algérie ayant refusé de participer au vote - donne un coup de pouce au plan présenté par Rabat en 2007: une autonomie sous souveraineté marocaine pour ce vaste territoire désertique, riche en phosphate et aux eaux poissonneuses. Le texte estime ainsi qu'"une véritable autonomie sous souveraineté marocaine pourrait représenter la solution la plus réalisable".

Dans ce contexte, il appelle le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres et son émissaire sur ce dossier, Staffan de Mistura, à mener des négociations "sur la base" de ce plan pour parvenir à un accord mutuellement acceptable. "Nous ouvrons un nouveau chapitre victorieux dans le processus de consécration de la marocanité du Sahara, destiné à clore définitivement ce dossier", a réagi le roi du Maroc Mohammed VI, saluant un "changement historique" du Conseil.

Ce "vote historique" permet de créer "un élan" vers la paix, a également salué l'ambassadeur américain Mike Waltz, assurant de la détermination de Donald Trump dans ce dossier. "Nous pensons qu'une paix régionale est possible cette année", a-t-il affirmé, appelant toutes les parties à "utiliser les prochaines semaines" pour engager des discussions sérieuses. "L'élan politique est là, il est temps désormais d'avancer", a renchéri son homologue français Jérôme Bonnafont, saluant l'"approche nouvelle" du Conseil pour relancer les efforts de paix.

"Parodie"

Une position partagée ni par l'Algérie ni par le Polisario. Le texte "ne reflète pas suffisamment la doctrine onusienne en matière de décolonisation", a déclaré l'ambassadeur algérien Amar Bendjama, qui a refusé de participer au vote. "Cette résolution ne crée pas encore, le momentum et les conditions nécessaires" pour la réussite des efforts diplomatiques de Donald Trump, a-t-il ajouté.

Alger avait déjà regretté en avril la réaffirmation par Washington de son soutien à Rabat. Et ses relations avec Paris sont au plus bas depuis l'été 2024 et la reconnaissance par la France du plan marocain. Après l'annonce spectaculaire en 2020 par Donald Trump du soutien américain à cette proposition en échange d'une normalisation de ses relations avec Israël, le Maroc a obtenu successivement l'appui d'une série de pays dont l'Espagne, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.

Le représentant du Front Polisario à New York, Sidi Omar, soulignant que le vote du Conseil ne représente pas une "reconnaissance de l'occupation militaire marocaine", a lui qualifié le plan de Rabat de "parodie" qui ne "vaut pas plus que le papier sur lequel il est écrit".

"Le Front Polisario réaffirme la détermination sans faille du peuple sahraoui dans sa lutte contre la libération, la résistance" et "l'indépendance", a-t-il déclaré à la presse, alors que le chef de la diplomatie du Polisario avait récemment indiqué qu'il serait prêt à accepter le plan uniquement si la population sahraouie le validait par référendum. L'ambassadeur russe Vassili Nebenzia, qui s'est abstenu, a lui espéré que la "charge de cowboy des Américains ne produise pas l'effet inverse en dégelant" le conflit.

Lors d'une réunion à huis clos du Conseil de sécurité début octobre, Staffan de Mistura avait répété ses inquiétudes sur le "flou" du plan marocain, selon le texte de son discours vu par l'AFP. "Il est désormais crucial que le Maroc donne plus de détails et développe sa proposition", y compris concernant "le principe d'autodétermination" du peuple sahraoui, avait-il insisté.

La résolution adoptée vendredi prolonge d'autre part d'un an la mission de maintien de la paix de l'ONU au Sahara occidental (Minurso), tout en demandant au secrétaire général d'en réaliser d'ici six mois une "évaluation stratégique".

© afp.com/ANGELA WEISS

A l'initiative des Etats-Unis de Donald Trump, le Conseil de sécurité de l'ONU a apporté vendredi son soutien au plan marocain d'autonomie du Sahara occidental

"L’hiver s’annonce très difficile" : en Ukraine, l’effroyable guerre de l’énergie des Russes

1 novembre 2025 à 07:45

A l’heure où les premiers rayons du soleil commencent à peine à réchauffer les gelées nocturnes, ce 3 octobre, dans les régions de Kharkiv et Poltava, un bruit assourdissant déchire le silence matinal. Dans les airs, 35 missiles et une soixantaine de drones russes zèbrent le ciel. Leurs cibles : les sites de production du groupe public Naftogaz, la plus grande compagnie pétrolière et gazière d’Ukraine. Les dégâts sont terribles. Au cours de cette seule salve, la plus importante enregistrée par la société depuis le début du conflit, l’opérateur a perdu près de 60 % de ses capacités de production. Six nouvelles attaques suivront au cours du mois. "Les Russes frappent des installations clés liées à la production, au transport et au stockage du gaz dans plusieurs régions, retrace avec amertume Natalia Boyko, vice-présidente du conseil de surveillance de la société. La saison hivernale s’annonce très difficile…"

Naftogaz, qui fournit 12,5 millions de foyers ukrainiens, n’en est pourtant pas à sa première attaque du genre. En février, des bombardements lui avaient fait perdre la moitié de ses capacités de production. Si les réparations engagées en urgence lui avaient permis d’en restaurer une grande partie au fil de l’année, ces nouvelles frappes ont réduit à néant des mois de travaux, en pleine saison de chauffe. Pour combler le manque à venir et répondre aux besoins, le ministère de l’Energie n’a eu d’autre choix que d’annoncer des importations de gaz supplémentaires. L’enjeu est prioritaire : 70 % du vaste réseau de chauffage urbain en dépend.

Ensevelir les cibles sous un tapis de bombes

A l’approche du quatrième hiver de la guerre, la stratégie du Kremlin reste inchangée : briser la détermination de la population ukrainienne en la privant d’énergie alors que le thermomètre chute vers des températures négatives. Mais cette fois, Moscou a revu ses plans. "La tactique a évolué, remarque Oksana Ishchuk, spécialiste de l’énergie et directrice exécutive de l’institut ukrainien Centre for Global Studies Strategy XXI, à Kiev. Alors que les Russes dispersaient leurs moyens pour tenter de provoquer une panne générale sur l’ensemble de notre territoire lors des premières années de guerre, ils concentrent aujourd’hui leurs attaques sur certaines zones précises." L’objectif : condenser les feux pour ensevelir leur cible sous un tapis de bombes. Et anéantir, région par région, le système énergétique ukrainien.

Car le problème est aussi quantitatif. Là où les Russes n’envoyaient, il y a encore deux ans, qu’une dizaine de drones pouvant transporter une cinquantaine de kilos d’explosifs, ils sont désormais capables d’en tirer plusieurs centaines en même temps afin de saturer les défenses antiaériennes ukrainiennes et maximiser les dégâts. Dernier exemple en date à Tchernihiv, à deux heures de voiture de Kiev. Cette ville de 280 000 habitants a été victime d’une panne généralisée le 21 octobre à la suite d’une attaque de 100 drones kamikazes contre sa seule centrale électrique. Il faut dire que Moscou a considérablement musclé ses capacités de frappes à longue portée. D’après les services secrets ukrainiens, les usines russes sortiraient désormais 170 drones Shahed et leurres Gerbera par jour. En parallèle, la production de missiles aurait, elle, augmenté de 10 à 20 % en un an, selon les modèles.

Chez les professionnels de l’énergie, l’angoisse monte. "Les attaques sont déjà plus importantes que ce que l’on constatait il y a un ou deux ans, pointe avec anxiété Vitalii Zaichenko, président du conseil d’administration d’Ukrenergo, l’opérateur du réseau électrique ukrainien. La Russie frappe nos installations tous les jours, avec parfois cinquante drones au même endroit." Dès 2023, la société a annoncé un vaste plan visant à protéger ses équipements critiques grâce à plusieurs couches de défense, allant des simples sacs de sable à des bâtiments renforcés par des armatures en acier. A ce stade, la moitié des installations sont protégées par des structures en béton. L’ambition est de monter à 100 % d’ici à 2026.

Le système énergétique ukrainien à l'épreuve de l'invasion russe
Le système énergétique ukrainien à l'épreuve de l'invasion russe

Protection des infrastructures

Suffiront-elles à absorber le fracas des bombes russes ? "Le niveau de protection des infrastructures énergétiques est bien meilleur que lors de la première année de la guerre, relève Oksana Ishchuk. Mais aucune d’entre elles ne sera suffisante contre une frappe directe de missile balistique." Dans le pays, des critiques sur un manque de protections suffisantes ont commencé à monter. Interrogée le 25 octobre après une attaque ayant privé 25 000 personnes d’électricité dans la région de Kharkiv, la ministre ukrainienne de l’Energie Svitlana Hrynchuk les a toutefois balayées, jugeant qu'il restait difficile d'empêcher tout dommage face à l'intensité des bombardements, et que sans elles, "nous aurions déjà eu beaucoup plus de pannes". En dernier recours, l’opérateur Ukrenergo peut toujours compter sur ses 70 équipes mobiles de 1 500 agents et sur l’appui de ses alliés occidentaux pour la livraison des pièces essentielles aux travaux de réparation. "Nous sommes désormais capables de changer un autotransformateur en un mois, claironne, à Kiev, Vitalii Zaichenko. Pour nos collègues européens ou américains, cette opération en prend trois au minimum."

Au-delà du réseau, les craintes portent aussi sur les centrales électriques. Rien qu’en septembre, au moins 31 infrastructures énergétiques ont été prises pour cible. Si, avant la guerre, la capacité de production du pays s’élevait à 38 gigawatts (GW, un gigawatt correspondant aux besoins en électricité d’environ un million de personnes), celle-ci a fondu de plus de moitié au fil des trois ans et demi de guerre. En septembre, les autorités ukrainiennes ont estimé que 17,6 GW seraient disponibles pour la saison de chauffage. Ce qui ne laisse presque aucune marge en cas de nouvelles destructions, alors que le pic de la demande avait atteint 18 GW deux ans plus tôt. Or, la menace continue de planer. Lors de la plus grande attaque aérienne contre l’Ukraine depuis le début du conflit, les 7 et 8 septembre, au moins 19 drones sont tombés sur la centrale thermique de Trypilska Therman, en banlieue sud de Kiev. Elle venait pourtant à peine d’être reconstruite après sa destruction complète au printemps 2024.

Malgré une légère remontée, la capacité de production énergétique de l'Ukraine reste près de deux fois moindre à son niveau d'avant-guerre.
Malgré une légère remontée, la capacité de production énergétique de l'Ukraine reste près de deux fois moindre à son niveau d'avant-guerre.

Un réseau caché de batteries

Face aux évolutions stratégiques russes, l’Ukraine n’a pas d’autre choix que d’innover. En témoigne sa dernière solution pour garder les lumières allumées malgré les bombardements : un réseau caché de batteries. D’une capacité de 200 mégawatts (MW), l’ensemble permet d’alimenter environ 600 000 foyers pendant deux heures. Soit l’équivalent de la moitié de Kiev. Ce réseau peut prendre le relais si une importante source de production est subitement indisponible, donnant aux ingénieurs, sur le terrain, un précieux temps pour éviter un nouveau black-out. "L’objectif essentiel est d’assurer un équilibrage - éviter les pics et les pannes - et soutenir la fiabilité du système en maintenant un certain niveau de fréquence au sein du réseau", décrit Oleksandr Selyschev, PDG de la branche Renouvelables de DTEK, le plus grand fournisseur privé d’énergie du pays, qui a chapeauté le programme.

Les six blocs de batteries sont entrés en fonctionnement le 1er octobre. Leur localisation est tenue secrète. Tout juste sait-on qu’ils sont répartis sur des sites entre les régions de Kiev et de Dnipro, à des endroits clés du réseau. Et qu’ils font l’objet de mesures de protection renforcées. Cette disposition limite le risque d’une seule attaque ciblant et endommageant un système centralisé. Pour ce projet à 125 millions d’euros, DTEK s’est allié avec l’Américain Fluence, spécialiste du stockage. La coopération a été aussi rapide qu’efficace, surtout dans un pays en guerre. Contrat signé en décembre 2024 ; préparation des sites secrets entre mars et mai ; finalisation de l’ensemble du réseau en août. "C’est vraiment impressionnant, admire Oleksandr Selyschev, car il faut en général deux ans pour réaliser ce type de travaux." En parallèle, une vingtaine d’ingénieurs électriciens ont suivi une formation avancée à l’étranger, sur des sites de Fluence en Allemagne et en Finlande.

Ce réseau de batteries est désormais l’un des plus grands d’Europe de l’Est. D’autres devraient bientôt suivre, puisque Ukrenergo a lancé plusieurs appels d’offres en ce sens, auxquels d’autres acteurs que DTEK ont répondu. L’Ukraine profite de la guerre pour faire évoluer l’ensemble de son système énergétique en le rendant plus résilient, efficace et décentralisé. Chaque hiver qui passe a des allures de test grandeur nature. Avec, toujours, la survie comme objectif principal.

© afp.com/Anatolii STEPANOV

La salle des turbines d'une centrale thermique, après une attaque de missile, en Ukraine, le 5 décembre 2024.

L'ONU hausse le ton contre les frappes anti-drogue de Donald Trump

31 octobre 2025 à 16:38

L'ONU a appelé vendredi 31 octobre les Etats-Unis à cesser leurs frappes aériennes dans les Caraïbes et le Pacifique contre des bateaux qu'ils présentent comme appartenant à des narcotrafiquants, réclamant des enquêtes "rapides, indépendantes et transparentes".

"Ces attaques – et leur coût humain croissant – sont inacceptables. Les Etats-Unis doivent mettre fin à ces attaques et prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher les exécutions extrajudiciaires des personnes à bord de ces bateaux, quelles que soient les infractions criminelles qui leur sont reprochées", a déclaré le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk, dans un communiqué.

15 attaques et 62 morts

Les Etats-Unis procèdent depuis début septembre à des frappes aériennes dans le Pacifique et surtout dans les Caraïbes contre des bateaux qu'ils présentent comme appartenant à des narcotrafiquants. Au total, le gouvernement Trump a revendiqué 15 attaques ces dernières semaines, faisant selon lui 62 morts, sans apporter la preuve de liens entre ces personnes et le narcotrafic.

Les "circonstances" de ces attaques "ne trouvent aucune justification dans le droit international", a dénoncé Volker Türk. Il rappelle que la lutte contre le trafic international de drogues relève "du maintien de l'ordre" et souligne qu'"en vertu du droit international des droits de l'homme, le recours intentionnel à la force létale n'est autorisé qu'en dernier recours contre des individus qui représentent une menace imminente pour la vie".

Or "d'après les informations très succinctes fournies publiquement par les autorités américaines, aucune des personnes se trouvant à bord des bateaux visés ne semblait représenter une menace imminente pour la vie d'autrui ni justifier l'usage de la force armée létale (...) en vertu du droit international", a-t-il ajouté.

Des enquêtes indépendantes demandées

Le Haut-Commissaire demande "des enquêtes rapides, indépendantes et transparentes sur ces attaques". "Comme nous le disons toujours, la responsabilité incombe à l'Etat. Il est du devoir et de la responsabilité de l'État concerné de mener des enquêtes. C'est la première étape, mais ces enquêtes doivent être rapides, approfondies et transparentes", a souligné une porte-parole du Haut-Commissaire, Ravina Shamdasani, lors d'un point de presse à Genève.

Des experts ont remis en question la légalité des frappes dans des eaux étrangères ou internationales, contre des suspects qui n'ont pas été interceptés ou interrogés. Le président américain justifie, lui, ce déploiement au nom du conflit armé contre des gangs classés "terroristes". Donald Trump accuse notamment le président vénézuélien Nicolas Maduro de faire partie d'un cartel. Ce dernier dément et dénonce des tentatives de déstabilisation de son pouvoir par les Etats-Unis.

© afp.com/Ludovic MARIN

Le siège de l'ONU à New York, le 20 septembre 2022

L'Ukraine appelle l'UE à renforcer les droits de douane sur les importations russes

31 octobre 2025 à 16:27

La Russie a bombardé des installations énergétiques en Ukraine avec des centaines de drones et de missiles, faisant au moins quatre morts et de nombreux blessés, notamment des enfants, et provoquant d'importantes coupures de courant, a annoncé jeudi 30 octobre Kiev. Dans le même temps, l'armée russe a affirmé avoir conquis deux autres villages, Sadové dans la région de Kharkiv (nord-est) et Krasnoguirské dans celle de Zaporijjia (sud), où les forces ukrainiennes, en infériorité numérique, perdent progressivement du terrain. Ce vendredi, Kiev a appelé l'Union européenne à augmenter ses droits de douane sur les importations de produits russes n'étant pas encore soumis à des sanctions prises par Bruxelles depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine.

Les infos à retenir

⇒ L'Ukraine appelle l'UE à renforcer les droits de douane sur les importations russes

⇒ L'Ukraine a mené 160 frappes réussies sur des sites pétroliers russes en 2025

⇒ L'Ukraine remet un captif Russe à la Lituanie pour un procès pour crimes de guerre

L'Ukraine a mené 160 frappes réussies sur des sites pétroliers russes en 2025

L'Ukraine a effectué presque 160 frappes réussies contre des sites pétroliers russes depuis le début de l'année, a indiqué vendredi le chef du service de sécurité ukrainien (SBU). "Depuis le début de l'année, il y a eu presque 160 attaques réussies contre des installations d'extraction et de raffinage du pétrole" russes, a déclaré le général Vassyl Maliouk à des journalistes dont l'AFP.

Ces derniers mois, Kiev a mené de multiples frappes de drones sur des raffineries de pétrole en Russie, entraînant une hausse du prix de l'essence dans le pays. S'exprimant à la presse, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait estimé lundi que la Russie avait perdu plus de 20% de ses capacités de raffinage de pétrole à cause de ces attaques.

Vendredi, le chef du SBU, Vassyl Maliouk, a également affirmé que les services de renseignement ukrainiens, durant une opération conjointe avec d'autres forces ukrainiennes, avaient détruit il y a plus d'un an un missile balistique à portée intermédiaire russe Orechnik, lors d'une frappe sur le site de lancement de Kapoustine Iar, dans la région russe d'Astrakhan (sud-ouest). L'AFP n'est pas en mesure de confirmer cette affirmation de source indépendante.

Un porte-parole du SBU a affirmé à l'AFP que le missile avait été détruit "dans un hangar", dans la nuit du 8 au 9 juillet 2024, alors qu'il était "presque prêt" à être lancé.

A l'époque, des médias russes avaient rapporté des attaques de drones dans ce secteur et les autorités locales avaient affirmé que plus d'une vingtaine d'appareils ennemis avaient été abattus. En août 2025, le président Vladimir Poutine avait lui annoncé que Moscou avait lancé la production en série de l'Orechnik, une arme hypersonique de dernière génération capable de porter une charge nucléaire.

En novembre 2024, la Russie avait utilisé pour la première fois cet engin, sans charge nucléaire, pour frapper une usine militaire dans la ville de Dnipro, dans le centre de l'Ukraine.

L'Ukraine appelle l'UE à renforcer les droits de douane sur les importations russes

Kiev a appelé vendredi l'Union européenne à augmenter ses droits de douane sur les importations de produits russes n'étant pas encore soumis à des sanctions prises par Bruxelles depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine. "Si des produits ne sont pas visés par des sanctions (européennes), nous allons soulever la question de l'imposition de droits de douane", a déclaré Andriï Sybiga, chef de la diplomatie ukrainienne.

Selon lui, une telle manoeuvre pourrait permettre à l'UE de contourner l'opposition de la Hongrie et de la Slovaquie qui menacent de bloquer l'extension de sanctions contre Moscou. "Nous allons y travailler avec nos partenaires européens", a indiqué M. Sybiga lors d'un point presse conjoint avec le président Volodymyr Zelensky.

L'UE a déjà augmenté les droits de douane sur certaines marchandises russes, notamment les produits agricoles et les engrais, dans le cadre de ses paquets de sanctions contre Moscou après le début de l'invasion en 2022. Mais les sanctions nécessitent l'accord de tous les membres de l'UE, y compris Budapest et Bratislava.

En revanche, l'imposition de droits de douane ne nécessite que "la majorité qualifiée" de l'UE (au moins 15 membres de l'UE représentant ensemble au moins 65 % de la population totale du Bloc, NDLR), a souligné M. Sybiga. Selon lui, l'augmentation des tarifs douaniers de l'UE sur certains produits russes serait donc "l'un des moyens de renforcer les sanctions" européennes en évitant de possibles blocages de membres des 27.

Les marchandises russes sont soumises à des droits de douane de l'UE produit par produit, qui peuvent varier considérablement. Les importations de produits russes dans l'UE ont chuté de 62,7 milliards d'euros au premier trimestre 2022, avant le début de l'invasion, à 6,98 milliards d'euros au deuxième trimestre 2025, soit une baisse de 89%, selon les statistiques officielles européennes.

L'Ukraine remet un captif Russe à la Lituanie pour un procès pour crimes de guerre

L'Ukraine a remis à la Lituanie un militaire russe capturé par ses forces armées, afin qu'il y soit jugé pour crimes de guerre, a annoncé le parquet ukrainien vendredi 31 octobre. "Pour la première fois depuis le début de l’agression à grande échelle, l’Ukraine a remis un militaire russe à un État étranger, la Lituanie, afin qu’il soit poursuivi pour crimes de guerre", a déclaré le procureur général d’Ukraine Rouslan Kravtchenko sur les réseaux sociaux, qualifiant l’événement d’"historique pour la justice". "C’est un signal clair adressé à tous les criminels de guerre : vous ne pourrez vous soustraire à la justice dans aucun pays du monde libre. Justice sera faite", a-t-il poursuivit.

Le suspect, un officier haut gradé de la marine russe, est accusé de "détention illégale, torture et traitement inhumain des civils et prisonniers de guerre", notamment contre un citoyen lituanien, selon le procureur général. Le procureur détaille "des coups, des tortures par électrochocs, des suffocations, l’enfermement de personnes dans des coffres métalliques".

Le parquet lituanien l’accuse d’avoir, avec d'autres militaires de son unité, organisé un "camp" dans la ville ukrainienne de Melitopol, occupée par Moscou dès les premiers jours de son invasion de l’Ukraine en 2022, dans lequel "des civils et des prisonniers de guerre, dont un citoyen de la République de Lituanie, ont été détenus illégalement, torturés et humiliés".

Le suspect a été capturé par les forces de Kiev en août 2023 dans la région de Zaporijjia (sud), près du village de Robotyné, peut-on lire dans le communiqué. Selon le parquet de Vilnius, le suspect a été transféré en Lituanie mardi avant d’être placé en détention provisoire jeudi pour une période de trois mois. Il a été inculpé en Lituanie pour "crimes de guerre, torture, privation illégale de liberté et violations des Conventions de Genève" et risque la prison à perpétuité.

© afp.com/JOHN THYS

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky fait une déclaration à la presse à son arrivée au sommet des dirigeants de l'Union européenne à Bruxelles, le 23 octobre 2025

Gaza : ce rapport qui pointe l’indulgence des Etats-Unis face aux potentiels crimes de l’armée israélienne

31 octobre 2025 à 13:27

Quelques semaines après le cessez-le-feu signé entre Israël et le Hamas, un rapport américain dévoilé par le Washington Post fait état de "plusieurs centaines" de violations potentielles des droits de l’homme à Gaza par l’armée israélienne lors de la guerre… qui pourraient justifier un arrêt de l’aide des Etats-Unis à leur allié.

Les officiels interrogés par le quotidien doutent toutefois du fait qu’Israël ne doive un jour rendre des comptes aux Etats-Unis sur ces actions, en raison de la longueur du processus d’examen et du statut particulier dont bénéficie le pays du Proche-Orient dans ce contexte.

Un ensemble de lois américaines comme base juridique

Le Washington Post eu accès à un rapport classifié d’un organisme de surveillance du gouvernement américain (Office of Inspector General) portant sur les actions de l’armée israélienne, qui bénéficie de l’aide des forces américaines.

Le lien juridique entre les actions d’Israël dans la bande de Gaza depuis les attaques du 7 octobre et l’intervention des Etats-Unis réside dans les lois dites "Leahy Laws", du nom du sénateur qui les a portées devant le Congrès dans les années 1990. Celles-ci interdisent au département d’Etat et au département de la Défense "d’utiliser des fonds pour apporter une assistance à des unités de forces de sécurité étrangères lorsqu’il existe des informations crédibles impliquant ces unités dans la commission de violations graves des droits humains", indique la page Internet du Département d’Etat américain (l’équivalent du ministère des Affaires étrangères en France). Il s’agit par exemple d’actes de torture, d’exécutions extrajudiciaires ou de disparitions forcées, précise le texte. En décembre 2024, plusieurs Palestiniens et Palestino-américains avaient déposé une plainte devant la justice américaine, accusant l’administration Biden de ne pas appliquer cette loi à Israël malgré les accusations d’exactions à Gaza, selon le Guardian.

La campagne militaire menée par Israël pendant deux ans à Gaza a mis ces textes de loi à l’épreuve, puisque les Etats-Unis fournissent au moins 3,8 milliards de dollars (environ 3,28 milliards d’euros) d’aide militaire à Israël chaque année. D’après un rapport du Congrès américain, en cumulé, Israël est le plus important récipiendaire d’aide américaine depuis la Seconde Guerre mondiale.

Malgré l’existence des Leahy Laws, de nombreux événements qui ont eu lieu dans la bande de Gaza depuis 2023 attendent encore d’être examinés. Comme la mort des collaborateurs de l’ONG World Central Kitchen en avril 2024, ou encore celle de plus de 100 Palestiniens regroupés à côté de camions d’aide humanitaire en février 2024, selon les autorités palestiniennes. L’administration Biden avait signalé ces deux cas au Congrès, indiquant que les Etats-Unis n’avaient pas encore rendu de "conclusions définitives" sur la question de l’utilisation d’armes américaines dans ces frappes.

"Des années" pour étudier les accusations envers Israël

Le rapport examine également la façon dont les violations potentielles des droits de l’homme par les pays auxquels les Etats-Unis portent assistance sont étudiées. Et décrit comment un "processus bureaucratique sur-mesure" mis en place par les administrations démocrates et républicaines successives avantage Israël par rapport aux autres pays accusés des mêmes faits. Dans le cas d’Israël, le protocole fait appel à des officiels plus haut placés et dure plus longtemps que pour les autres pays. Quand "une simple objection d’un officiel" suffit à suspendre l’aide militaire pour ces derniers, pour l’Etat hébreu, il faut qu’un groupe de travail composé notamment de l’ambassade américaine à Jérusalem parvienne à un accord. Ce groupe peut ensuite déclarer une entité "inéligible" à l’aide américaine, une décision qui doit être approuvée par le département d’Etat américain.

Résultat : jusqu’ici, les Etats-Unis n’ont jamais gelé une quelconque aide militaire à leur allié israélien, "malgré des preuves claires", selon un ancien officiel du Département d’Etat interrogé par le Washington Post. Les multiples violations potentielles des droits de l’homme au regard du droit américain par Israël pourraient donc mettre "des années" à être étudiées, selon les sources du quotidien, et même être oubliées.

Reste que ce rapport est le tout premier du gouvernement américain à reconnaître l’ampleur des actions de l’armée israéliennes qui pourraient tomber sous le coup de la loi américaine. Sa publication intervient alors que Donald Trump est en guerre contre les instances indépendantes de supervision de la bureaucratie américaine, puisqu’il a remercié 17 inspecteurs généraux depuis son retour à la Maison-Blanche. Ces organes de contrôle seraient, selon le président américain, "injustes". Pourtant, selon les informations du journal, ces instances sont justement en train de réunir des preuves sur le vol d’aide humanitaire par le Hamas à Gaza. Un sujet pourtant porté par l’administration Trump.

© afp.com/Sharon ARONOWICZ

L'aide américaine à l'armée israélienne pourrait être gelée sous le coup d'une loi des années 1990 empêchant les Etats-Unis d'aider militairement un pays violant les droits de l'homme.

"Entre Xi et Trump, l’escalade commerciale pourrait reprendre" : le constat sans appel d’Alice Ekman

31 octobre 2025 à 12:00

Une trêve d’un an… Reconductible. Les marchés financiers ont (un peu) soufflé, à l’issue de la rencontre à haut risque entre Donald Trump et Xi Jinping, ce 30 octobre à Busan (Corée du Sud). Au terme d’un tête-à-tête qualifié "d’extraordinaire" par le président américain, les deux dirigeants se sont entendus pour apaiser leur conflit commercial, six ans après leur dernière rencontre. C’était au sommet du G20 à Osaka (Japon) et déjà, Chine et États-Unis se livraient une guerre économique intense. Ce 30 octobre, plusieurs accords ont été trouvés – sur les terres rares, le soja ou les droits de douane liés au Fentanyl.

Mais "rien de formel n’a été signé", rappelle Alice Ekman. Pour cette spécialiste de la Chine, directrice de la recherche de l’Institut d’études de sécurité de l’Union européenne et auteure de Dernier vol pour Pékin (réédition Champs/Flammarion, 2024), cette rencontre n’est qu’une étape. Et elle n’atténue en rien la rivalité sino-américaine, qui dépasse largement le cadre commercial ou technologique.

L’Express : A l’issue de cette rencontre, Donald Trump a déclaré : "Sur une échelle de 1 à 10, nous sommes à 12." Partagez-vous cet optimisme ?

Alice Ekman : Non, ce n’est assurément pas une rencontre historique, mais une étape, parmi d’autres, en vue d’un éventuel accord. Pour l’heure, chaque partie peut se prévaloir de succès relatifs – comme le soulignent les comptes rendus américains et chinois, très différents dans leur ton et leur contenu. Cette réunion marque une pause dans l’escalade commerciale, mais celle-ci pourrait reprendre.

De manière générale, à chaque fois que les dirigeants américains et chinois se voient, on guette l’avènement de la fin de la guerre commerciale, mais celui-ci ne se matérialise finalement pas ! De toute façon, même s’il survenait, la rivalité sino-américaine perdurerait, car elle dépasse largement le cadre commercial ou technologique.

Plusieurs sujets importants n’ont pas été abordés, tel l’achat, par la Chine, de pétrole russe, ou Taïwan. Pourtant, ce n’était pas un manque de temps. La rencontre, qui devait durer 4 heures, s’est achevée au bout d’une heure quarante…

Oui, cette rencontre ne marque finalement que la reconduction de la trêve commerciale, qui devait expirer le 10 novembre. Non seulement il n’y a pas eu d’accord formel, mais les sujets les plus sensibles n’ont pas été évoqués. Les Etats-Unis et la Chine ont provisoirement réussi à échanger en "silo" - c’est-à-dire à séparer les questions commerciales et technologiques des grands enjeux militaires et géostratégiques (divergences sur l’Ukraine et sur Taïwan, entre autres). Pour le moment. Car ces questions sont étroitement liées et les dirigeants ne pourront plus les reléguer au second plan lors de leur prochaine rencontre. La rivalité idéologique demeure par ailleurs très forte entre les deux pays, quel que soit le président américain en place, et elle pourrait revenir sur le devant de la scène. On se souvient des échanges très tendus sur les prétendues failles de l’Amérique, de son système politique, vigoureusement pointés du doigt par la diplomatie chinoise lors du sommet d’Anchorage en Alaska en mars 2021, peu de temps après l’élection de Joe Biden. La Chine souhaitait clairement "faire la leçon" aux Etats-Unis. Cette volonté demeure.

Quelles seront les prochaines étapes ?

La visite de Donald Trump en avril 2026 pourrait mener à un accord commercial formel, et éventuellement substantiel. Mais rappelons-nous de l’accord dit de "phase 1" ("phase 1 deal") de janvier 2020, lors du premier mandat présidentiel de Donald Trump. Les objectifs de l’accord n’avaient pas été atteints, dans un contexte de crise de Covid-19 – la Chine n’avait finalement pas acheté les 200 milliards de dollars de produits américains supplémentaires, contrairement à ses engagements.

Quelles conséquences cette rencontre du 30 octobre peut-elle avoir sur l’Europe ?

Si une "phase 2 deal" était signée entre Pékin et Washington courant 2026, et les engagements respectés, cela pourrait avoir des conséquences négatives pour l’Europe, notamment si un engagement d’achat de produits américains par la Chine se faisait à terme au détriment des produits européens. En parallèle, les pressions commerciales américaines sur l’Union européenne pourraient s’intensifier.

Idéalement, les Etats-Unis devraient tenir l’Union européenne informée de son plan d’action vis-à-vis de la Chine, pas uniquement par élégance vis-à-vis de ses alliés – attente qui semble irréaliste alors que Donald Trump est président –, mais parce que Washington et Bruxelles ont intérêt à faire front commun pour mieux défendre leurs intérêts vis-à-vis de Pékin, et être davantage en position de force dans les négociations. Une relative convergence transatlantique sur la stratégie à adopter vis-à-vis de la Chine ferait sens, mais cela semble difficilement atteignable dans le contexte actuel. Les tensions entre les Etats-Unis et l’Europe, si elles perdurent, risque d’avoir un impact durable et particulièrement défavorable autant pour l’un que pour l’autre et de modifier les rapports de force mondiaux, alors que, de son côté, la Chine parvient à faire rapidement émerger une coalition de pays ouvertement antioccidentaux, qui coopèrent et se coordonnent de plus en plus efficacement.

> Alice Ekman sera l’invitée des Jeudis de L’Express le 13 novembre prochain à 12h00.

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS, SUO TAKEKUMA

Portraits des présidents américain Donald Trump et chinois Xi Jinping

Reprise des essais nucléaires : l’annonce floue de Donald Trump inquiète le reste du monde

31 octobre 2025 à 11:13

L’annonce surprise de Donald Trump, qui prétend vouloir reprendre les essais d’armes nucléaires, continue ce vendredi 31 octobre de susciter inquiétude et protestations dans le monde entier, sans même qu’ait été éclairci le sens réel de ses déclarations.

Des survivants japonais des bombardements atomiques d’Hiroshima et Nagasaki en août 1945, uniques occurrences de l’usage de l’arme suprême et symbole depuis du tabou militaire absolu, se sont joints à moult protestations diplomatiques. La directive du président républicain "va à l’encontre des efforts déployés par les nations du monde entier pour construire un monde pacifique sans arme nucléaire et est absolument inacceptable", a dénoncé l’organisation Nihon Hidankyo, dans une lettre à l’ambassade des Etats-Unis au Japon.

Le maire de Nagasaki, Shiro Suzuki, a pour sa part regretté que l’ordre présidentiel "piétine les efforts des peuples […] qui ont versé sang et larmes pour un monde" dénucléarisé.

Jeudi, Donald Trump a annoncé vouloir tester les armes nucléaires américaines, laissant planer le doute - à dessein ou non - sur son propos : test d’explosion d’ogives nucléaires, ou essai d’armement capables de les transporter ? "En raison des programmes d’essais menés par d’autres pays, j’ai demandé au ministère (de la Défense) de commencer à tester nos armes nucléaires sur un pied d’égalité" avec la Russie et la Chine, a-t-il déclaré sur son réseau Truth Social.

Or, nul pays n’a procédé à un essai nucléaire depuis trois décennies - à l’exception de la Corée du Nord (à six reprises entre 2006 et 2017). En revanche, de nombreuses puissances, Etats-Unis en tête, effectuent régulièrement des tests de vecteurs - missiles, sous-marins, avions de chasse ou autres.

"Sous aucune circonstance"

L’Iran, accusé par les Occidentaux et Israël de développer l’arme atomique malgré ses démentis, a jugé que les Etats-Unis faisaient porter "le risque de prolifération le plus dangereux au monde". L’annonce du président américain "est une mesure régressive et irresponsable" et une "menace grave pour la paix et la sécurité internationales", a déclaré sur X le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi. "Le monde doit s’unir pour demander des comptes aux États-Unis".

Dans un contexte géopolitique incandescent, et alors que la rhétorique nucléaire revient périodiquement au premier plan depuis l’invasion russe en Ukraine, en février 2022, Donald Trump a versé de l’huile sur le feu.

Les essais nucléaires "ne doivent jamais être permis, sous aucune circonstance", a déclaré un porte-parole de l'ONU. "Nous ne devons pas oublier l’héritage désastreux des plus de 2 000 essais nucléaires menés ces 80 dernières années", a ajouté Farhan Haq, porte-parole adjoint du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.

Jeudi, le vice-président américain J.D. Vance a appuyé les propos du chef de l’Etat, arguant de la nécessité de s’assurer que l’arsenal nucléaire national "était en état de marche et fonctionnait bien". "Pour être clair, nous savons qu’il fonctionne proprement, mais vous devez veiller à cela au fil du temps", a-t-il ajouté à propos de l’arsenal américain. Ce vendredi matin, depuis la Malaisie, c'est le ministre américain de la Défense Pete Hegseth qui a assuré qu'il était "très responsable", de la part des Etats-Unis, de "reprendre des essais" d'armes nucléaires : "Le Président a été clair, nous devons avoir une dissuasion nucléaire crédible", a-t-il fait valoir.

Obligations internationales

Reste que Washington est signataire du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (Tice). Faire exploser des ogives en constituerait une violation flagrante.

La décision de Donald Trump a semblé répondre aux manœuvres récentes de la Russie : cette semaine, le président russe Vladimir Poutine s’est félicité de l’essai final réussi d’un missile de croisière d'"une portée illimitée", puis de celui d’un drone sous-marin. Mais le Kremlin a jugé bon jeudi de préciser qu’il s’agissait bien d’essais d’armes capables de porter une ogive nucléaire et non de bombes elles-mêmes. "Nous espérons que le président Trump en a été informé correctement", a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Pékin, pour sa part, a émis le souhait que Washington respecte "sérieusement" ses obligations internationales et prenne "des mesures concrètes pour préserver le système mondial de désarmement et de non-prolifération nucléaires".

Washington et Moscou restent liés en principe par le traité de désarmement New Start, qui limite chaque partie à 1 550 ogives stratégiques offensives déployées et prévoit un mécanisme de vérifications, interrompues depuis deux ans. Le traité doit expirer en février.

A tout le moins, Donald Trump n’a semblé nullement ébranlé par les protestations qu’il a provoquées. Evoquant le blocage budgétaire qui paralyse actuellement son administration, il a réclamé un changement du règlement du Sénat pour sortir de l’impasse. "Il est temps pour les républicains de jouer leur 'CARTE TRUMP' et de mettre en œuvre ce qu’on appelle l’Option Nucléaire ", a-t-il écrit sur son Truth Social, comme une énième provocation.

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Le président américain Donald Trump descend d'Air Force One à son arrivée à la base militaire Joint Base Andrews, dans le Maryland, près de Washington, aux Etats-Unis, le 30 octobre 2025

Les cinq coups de Donald Trump qui ont assommé l’Europe

31 octobre 2025 à 07:45

Alors que Donald Trump fête, le 5 novembre, le premier anniversaire de sa réélection à la Maison-Blanche, l’Europe en est toujours à se demander avec angoisse comment elle pourrait assumer seule son destin. Cinq dossiers géopolitiques de première importance disent le désarroi dans lequel les menées brutales du président américain ont plongé les dirigeants du Vieux Continent.

1. L’Ukraine

Depuis que Trump a stoppé les financements américains en faveur de Kiev, aider la nation ukrainienne à résister à l’agression russe est devenu un objectif vital pour la grande majorité des chefs d’Etat et de gouvernement européens. Ils s’en montrent pourtant bien peu capables. Une tentative de gager l’aide sur les avoirs russes gelés en Europe, discutée au Conseil européen du 23 octobre, a tourné court suite aux objections juridiques (fondées) de la Belgique. Or, les caisses de Kiev seront vides dès le début 2026.

2. La garantie de sécurité américaine

La rhétorique anti-européenne de l’administration Trump terrifie nombre de dirigeants de ce côté-ci de l’Atlantique, alors que la menace russe s’accentue. A plusieurs reprises, Washington a évoqué le projet d’une réduction des troupes américaines déployées en Europe. Les plans de l’Otan prévoient qu’en cas de coup dur, les 100 000 militaires américains présents (dont la moitié en Allemagne) seraient renforcés par 200 000 hommes supplémentaires. Ces plans pourraient bien être obsolètes. Sans compter le parapluie nucléaire américain, de plus en plus sujet à caution.

3. Le Proche-Orient

Trump discute de l’avenir de la bande de Gaza avec l’Arabie saoudite, le Qatar ou la Turquie… mais pas avec la France, l’Allemagne ou le Royaume-Uni. Sur une question géopolitique qui impacte directement leur sécurité, les Européens sont traités comme quantité négligeable. En termes de poids politique, il n’a pas servi à grand-chose que l’UE ait été, depuis des années, le principal financier de l’Autorité palestinienne. Même chose au sujet de l’Iran : Trump n’a pas pris la peine de prévenir ses "alliés" européens lorsqu’il a fait bombarder, le 21 juin, trois sites liés au programme iranien de fabrication de la bombe atomique.

4. Le commerce

Les Européens ont renoncé en août à déclencher des représailles aux droits de douane de 15 % que Trump leur a imposés de manière unilatérale. Conscients de leur faiblesse militaire, ils espéraient alors qu’en échange de leur docilité, le président américain soutiendrait l’Ukraine. Le compte n’y est pas, et le "deal" apparaît clairement pour ce qu’il est : un tribut payé par un vassal à son suzerain, pour une protection qui n’est même plus garantie.

5. Le Groenland

Même s’il a mis une sourdine à ses revendications, Trump n’a pas renoncé à ses visées sur ce territoire qui appartient au royaume du Danemark et dont l’annexion constituerait une violation gravissime de la souveraineté européenne. Or, les marques de soutien à Copenhague ont été rares et mesurées, à part celles émanant des voisins nordiques de Copenhague et aussi, de manière remarquable, de la France, par la voix d’Emmanuel Macron. Beaucoup de responsables européens préfèrent se taire, pour ne pas s’attirer les foudres de Trump. Raser les murs ne fera pas avancer l’autonomie stratégique européenne.

L’ordre du jour de l’administration Trump percute tout ce que l’Europe incarne. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les démocraties européennes ont pris pour boussole commune le respect du droit et la quête du consensus plutôt que le règne de la force et de l’intimidation. Elles ne savent pas comment réagir quand la démocratie américaine, leur modèle et protecteur, jette aux orties le cadre international patiemment construit depuis 1945.

Trump poursuit des flirts poussés avec les autocrates de la planète, du moins les plus puissants d’entre eux. Il ménage Xi Jinping et Vladimir Poutine ; il courtise le nord-coréen Kim Jong-un, qui possède l’arme nucléaire. Tout se passe comme s’il aspirait à un monde divisé en trois grandes zones d’influence, autour des Etats-Unis dans le monde anglophone et latino-américain, de la Chine en Asie orientale et de la Russie au cœur de l’Eurasie. Un monde qui ne laisserait aucune place à une Europe unie et attachée à ses valeurs démocratiques ; un monde que l’historien grec Thucydide décrivait-il y a déjà plus de deux millénaires, celui où "les forts font ce qu’ils peuvent et les faibles subissent ce qu’ils doivent".

© afp.com/Ludovic MARIN

Le président américain Donald Trump (d) et son homologue français Emmanuel Macron à l'issue d'une conférence de presse conjointe à la Maison Blanche, le 24 février 2025 à Washington
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