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Reçu aujourd’hui — 12 décembre 2025 L'Express

Allemagne : le revirement polémique de Friedrich Merz sur l’accueil de réfugiés afghans

12 décembre 2025 à 13:54

Berlin ne tiendra pas parole. Plusieurs centaines de réfugiés Afghans qui ont fui le retour des talibans ne seront finalement pas évacués du Pakistan, où ils attendent un visa pour l’Allemagne. Nombre d’entre eux ont apporté leur aide à l’armée allemande lors de l’invasion de l’Afghanistan par les Etats-Unis, exerçant comme journalistes, avocats ou militants des droits de l’Homme. Une lourde menace pèse sur leur vie en cas de retour dans leur pays natal, sous la coupe du mouvement islamiste depuis 2021.

Leur espoir d’atteindre l’Europe, et la sécurité, vient de s’effondrer. Dans les prochains jours, 640 exilés recevront une note officielle "indiquant qu’il n’y a plus d’intérêt politique à les accueillir", a déclaré cette semaine la porte-parole du ministère de l’Intérieur, Sonja Kock.

C’est Friedrich Merz, le chancelier allemand, qui est revenu sur la promesse d’accueil faite par son prédécesseur à un total de 1 800 Afghans environ. Une décision qui s’inscrit dans le tournant conservateur - particulièrement à l’égard de l’immigration - pris par le dirigeant, en proie aux pressions de l’extrême droite grandissante dans son pays.

La fiabilité allemande remise en cause

Cette résolution, alors que plus de 250 ONG avaient justement exhorté mardi Berlin à tenir parole, en appelant à protéger ces réfugiés "d’une expulsion du Pakistan vers l’Afghanistan et des persécutions qui y sont exercées par les talibans", a été largement critiquée par de nombreuses associations.

Dans un communiqué, l’association allemande Pro Asyl s’indigne : "Le gouvernement précédent n’avait accordé l’asile à ces personnes que pour une seule raison : leur engagement pour les droits des femmes, les droits humains et la liberté en Afghanistan". Et les militants de tancer : "Ils risquent désormais de tomber entre les mains du régime islamiste taliban, nouveaux alliés du ministre fédéral de l’Intérieur".

Sur Bluesky, le journaliste de guerre allemand, Thomas Wiegold, s’inquiète des conséquences que pourrait avoir cette promesse rompue sur les futures missions militaires de son pays. "Les soldats allemands ne peuvent qu’espérer ardemment ne plus jamais, jamais, dépendre du soutien local, où que ce soit".

Offre financière

Ces derniers mois, le gouvernement allemand a multiplié les stratégies pour repousser les exilés afghans. Comme lorsqu’il a proposé de l’argent à ceux qui renonceraient à leur droit d’être évacués.

Sur son territoire aussi, l’exécutif allemand mène une politique de répression à l’encontre des réfugiés afghans. Cet été, le gouvernement a annoncé l’expulsion vers leur pays d’origine de 81 Afghans condamnés par la justice, la seconde opération du genre depuis le retour au pouvoir des talibans. Malgré les critiques de l'ONU, Friedrich Merz ne semble pas prêt à reculer. En octobre, son ministre de l’Intérieur Alexander Dobrindt se félicitait qu’un accord avec les talibans serait bientôt conclu pour rendre "réguliers" les vols d’expulsions vers l’Afghanistan. Une annonce d'’autant plus surprenante que Berlin ne reconnaît pas directement le mouvement islamiste comme gouvernement légitime du pays.

© afp.com/RALF HIRSCHBERGER

Le chancelier allemand Friedrich Merz participe à une conférence de presse à Berlin, le 3 septembre 2025

Dix ans après avoir failli se faire éjecter de la zone euro, la Grèce prend sa revanche

12 décembre 2025 à 13:21

"C’est la reconnaissance la plus éclatante de la trajectoire positive de notre patrie", s’est félicité ce jeudi 11 décembre le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, saluant "un jour de fierté pour le pays, pour le gouvernement et pour tous les citoyens". Et pour cause : le pays qui a failli être expulsé de la zone euro il y a dix ans dirige maintenant le puissant organe de l’UE qui l’a sauvé de la faillite.

"Il y a 10 ans, le débat ici à Bruxelles était de savoir si la Grèce allait sortir ou pas de la zone euro. Et pourtant, elle a tenu bon. C’est un témoignage de bien des choses, de la force collective de notre peuple, et de la solidarité européenne", a déclaré à la presse le ministre des Finances grec, tout juste élu par ses pairs à la tête de l’Eurogroupe, Kyriakos Pierrakakis. Il a battu jeudi le vice-Premier ministre belge Vincent Van Peteghem dans la course à la présidence de l’instance. "La Grèce a parcouru un si long chemin au cours des 10 dernières années", a résumé le président du Conseil, Antonio Costa.

"Pouvoir de résilience"

Pourtant, peu de diplomates s’attendaient initialement à ce que l’informaticien et économiste politique de 42 ans ne remporte la course à la tête de l’Eurogroupe après la démission du titulaire Paschal Donohoe le mois dernier. Le Belge Van Peteghem pouvait se vanter de plus d’expérience et du respect dont il bénéficie au sein de la zone euro, ce qui faisait de lui le premier favori pour gagner, comme le souligne le journal en ligne Politico.

Kyriakos Pierrakakis est ministre des Finances depuis mars, après avoir piloté la transformation de l’administration grecque depuis 2019 en tant que ministre de la Gouvernance numérique, puis de l’Education. Dans sa candidature, il avait mis en avant "le pouvoir de la résilience" dont sa génération a fait preuve, après la tourmente des années 2010, lorsque la crise de la dette grecque a failli provoquer l’implosion de la zone euro. Une "crise existentielle" qui a démontré selon lui "le coût de la complaisance, la nécessité des réformes et l’importance de la solidarité européenne".

Politique budgétaire de la zone euro

L’Eurogroupe est une instance créée en 1997 qui coordonne les politiques économiques et budgétaires des 20 pays de la zone euro, bientôt au nombre de 21, la Bulgarie s’apprêtant à adopter la monnaie unique le 1er janvier prochain. En tant que président de l’Eurogroupe, le chef des finances grec présidera les réunions mensuelles de ses homologues et représentera la zone euro à l’échelle internationale. Il devra aussi la représenter dans différents organismes internationaux (FMI, Banque mondiale, G7 Finances…), ce qui lui procure une stature internationale, note l’agence Bloomberg.

Le chef des finances grecques a déjà donné un indice sur ses priorités dans son nouveau rôle. Dans une lettre de motivation pour le poste, il avait indiqué vouloir se concentrer sur le syndicat d’épargne et d’investissement du bloc, l’achèvement du marché unique, l’euro numérique et la souveraineté technologique de l’Europe, ainsi que sur la sauvegarde des fondements économiques du continent.

Conçu à l’origine comme un rassemblement informel pour échanger des points de vue, l’Eurogroupe est devenu au fil du temps l’un des forums les plus surveillés de la région pendant la crise de la dette souveraine. Il a notamment négocié des accords sur les renflouements d’urgence, une refonte des règles bancaires de l’Union européenne et des prêts pour empêcher la Grèce de faire défaut et de sortir de l’euro.

© afp.com/NICOLAS TUCAT

Le nouveau président de l'Eurogroupe, le Grec Kyriakos Pierrakakis, à Bruxelles, le 11 décembre 2025

Le gouvernement renversé par la Gen Z : que se passe-t-il en Bulgarie ?

12 décembre 2025 à 12:11

En Europe, la mobilisation de la génération Z vient de faire tomber un gouvernement. A trois semaines de l’entrée du pays dans la zone euro, le gouvernement bulgare n’a pas résisté à la pression de la rue. Jeudi 11 décembre, le Premier ministre Rossen Jeliazkov a annoncé sa démission après une nouvelle manifestation de masse pour dénoncer la corruption dans l’appareil de l’État. "Vox populi, vox dei", a déclaré le chef du gouvernement au Parlement, reprenant la citation latine de "la voix du peuple [est] la voix de Dieu". "Nous devons nous lever pour répondre à leurs demandes. Et leur demande est la démission du gouvernement", a-t-il déclaré.

Mercredi soir, des dizaines de milliers de personnes avaient manifesté dans la capitale Sofia et dans d’autres villes du pays, dans une nouvelle démonstration de colère contre des dirigeants accusés de corruption. Mobilisés sur TikTok et d’autres réseaux sociaux, les Bulgares ont défilé avec des pancartes indiquant "La génération Z arrive" et "La génération Z contre la corruption".

Échec d’un budget libellé en euro

En Bulgarie, la vague de mécontentement, sans précédent depuis plusieurs années, avait commencé fin novembre, lorsque le gouvernement avait tenté de faire voter via une procédure accélérée le budget 2026, le premier libellé en euros. Sous la pression de la rue, il avait retiré le 3 décembre son projet de budget, qui prévoyait une hausse d’impôts et de cotisations sociales. Autant d’augmentations destinées à dissimuler des détournements de fonds, selon les contestataires et l’opposition. Un nouveau projet de budget a été présenté au Parlement en début de semaine, sans apaiser la colère.

La corruption dans ce pays des Balkans peuplé de 6,5 millions d’habitants a longtemps été omniprésente, même après son entrée dans l’Union européenne en 2007. Constamment classée comme l’un des États membres les plus corrompus du bloc par Transparency International, la Bulgarie n’a pas réussi à obtenir des condamnations de haut niveau pour corruption ces dernières années, alimentant la colère du public et suscitant des critiques répétées de Bruxelles pour son bilan en matière d’état de droit.

Bien que l’effondrement du gouvernement bulgare n’arrête pas le passage prévu au 1er janvier à l’euro, il prolonge une crise politique qui a déclenché sept élections législatives en seulement quatre ans et ajoute au malaise des Bulgares qui craignent une envolée des prix dès le 1er janvier. Le processus de changement de monnaie ne devrait cependant pas être affecté car les institutions directement impliquées dans le processus, "telles que la Banque nationale bulgare, sont indépendantes", a souligné auprès de l’Agence France Presse Petar Ganev, chercheur senior à l’Institut pour l’économie de marché (IME). Toutefois, pense-t-il, "tout problème mineur lié à l’introduction de l’euro, tel qu’une augmentation de prix ou un distributeur automatique de billets hors service, deviendra un sujet de débat politique".

Nouvelles élections en perspectives

Le fragile gouvernement de Rossen Jeliazkov avait été formé en janvier, rassemblant une coalition de circonstance entre les conservateurs du GERB de l’ancien Premier ministre Boïko Borissov et trois autres formations. En vertu de la Constitution bulgare, sa démission doit être désormais avalisée par le Parlement. Ce dernier se réunit ce vendredi matin. Il incombe ensuite au chef de l’Etat de confier un mandat pour la formation d’un nouveau gouvernement dans le cadre de l’assemblée actuelle. Mais les principaux partis politiques ayant d’ores et déjà fait savoir qu’ils ne comptaient pas s’allier, le président convoquera des élections extraordinaires, celles-ci devant se dérouler dans les deux mois qui suivent.

"Les manifestations ont montré qu’il y a suffisamment d’énergie civile chez les jeunes générations pour aller contre l’orgueil perçu d’une élite politique et économique enracinée qui a profité des pratiques de capture de l’État pour rester au pouvoir", a déclaré auprès du Wall Street Journal Martin Vladimirov, directeur du programme de géoéconomie au Center for the Study of Democracy, un groupe de réflexion basé à Sofia.

La Bulgarie est devenue le dernier point d’achoppement d’une année marquée par les mobilisations de la génération Z. Les manifestations de jeunes ont fait tomber les gouvernements au Népal et à Madagascar ces derniers mois. Et secoué d’autres pays, dont le Maroc ou encore le Pérou.

© afp.com/DIMITAR KYOSEMARLIEV

Un manifestant brandit un drapeau bulgare lors d'un rassemblement anti-gouvernemental à Sofia, en Bulgarie, le 10 décembre 2025

L'Allemagne accuse la Russie d'une cyberattaque contre la sécurité aérienne et d'ingérence électorale

12 décembre 2025 à 12:31

Donald Trump s’impatiente face au conflit ukrainien, et il le fait savoir. "Le président est extrêmement frustré par les deux camps impliqués dans cette guerre, et il en a assez des réunions qui n’ont d’autre but que de se réunir", a déclaré jeudi 11 décembre à la presse la porte-parole de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt. "Il ne veut plus des paroles. Il veut des actes. Il veut que cette guerre prenne fin", a-t-elle poursuivi. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a confirmé de son côté que les États-Unis souhaitaient conclure un accord "le plus tôt" possible. Sous pression, l’Ukraine semble prête à faire une concession majeure : sa version amendée du plan américain pour la paix, qu’elle a remis à Washington mercredi, comporte en effet, selon plusieurs sources, un compromis majeur, Kiev acceptant une zone démilitarisée dans le Donbass, qui imposerait un recul des forces ukrainiennes et russes des deux côtés de la ligne de front.

Les infos à retenir

⇒ L'Allemagne accuse la Russie d'une cyberattaque et d'ingérence électorale

⇒ Avoirs gelés : la Banque centrale russe saisit la justice contre Euroclear

⇒ L'Ukraine revendique la reprise de deux localités dans la région de Kharkiv

L'Allemagne accuse la Russie d'une cyberattaque contre la sécurité aérienne et d'ingérence électorale

L'Allemagne a attribué vendredi à la Russie une "attaque informatique" visant son système de contrôle du trafic aérien ainsi qu'une "campagne" de déstabilisation durant les dernières législatives allemandes, et convoqué l'ambassadeur russe à Berlin pour ces accusations.

"Le service de renseignement militaire russe GRU est responsable de cette attaque" informatique commise en août 2024 et "la Russie a tenté, à travers la campagne Storm 1516, d'influencer et de déstabiliser" la dernière élection en février, a déclaré un porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères lors d'un point presse régulier. Contactée vendredi par l'AFP, l'ambassade russe à Berlin n'avait pas réagi immédiatement.

L'Ukraine revendique la reprise de deux localités dans la région de Kharkiv

Les forces ukrainiennes ont affirmé vendredi avoir repris aux troupes russes deux localités près de la ville de Koupiansk, un noeud ferroviaire clé dans la région de Kharkiv (nord-est de l'Ukraine) que la Russie a affirmé avoir capturé en novembre.

Les troupes ukrainiennes ont "effectué une percée jusqu'à la rivière Oskil, coupant les lignes d'approvisionnement de l’ennemi" et "libéré" les villages de Kindrachivka et de Radkivka ainsi que des quartiers au nord de Koupiansk, a annoncé la brigade ukrainienne Khartia. 

Avoirs russes gelés : la Banque centrale russe saisit la justice contre Euroclear

La Banque centrale russe a déclaré ce vendredi saisir la justice à Moscou contre la société belge Euroclear, qui détient l'essentiel des avoirs gelés de la Russie que l'Union européenne veut utiliser pour financer l'aide à l'Ukraine.

La Commission européenne cherche actuellement à piocher dans les quelque 200 milliards d'euros d'avoirs de la Banque centrale russe, gelés dans l'UE en raison de sanctions prises par les 27 contre Moscou, afin de financer un prêt à l'Ukraine où la Russie mène depuis bientôt quatre ans une offensive à grande échelle. L'UE bute sur l'opposition de la Belgique, où se trouvent l'essentiel de ces avoirs et la société Euroclear, mais espère parvenir à un accord final lors d'une réunion la semaine prochaine.

La Banque centrale russe a déclaré vendredi qu'elle "déposait une plainte contre Euroclear au tribunal arbitral de Moscou", en accusant la société belge d'"actions illégales". "Les actions du dépositaire Euroclear ont causé un préjudice à la Banque de Russie en raison de l’impossibilité de gérer les liquidités et les titres" lui appartenant, a déclaré l'institution dans un communiqué.

Selon les médias publics russes, la plainte sera déposée vendredi, la somme revendiquée étant composée du montant des avoirs gelés et de l'indemnisation du manque à gagner. Moscou considère comme illégales les sanctions internationales à son encontre, notamment le gel de ses avoirs, et qualifie leur utilisation de vol. Euroclear n'a pas souhaité réagir dans l'immédiat mais un porte-parole a déclaré que la société "se bat actuellement contre plus d'une centaine de recours juridiques en Russie".

Immobiliser les avoirs russes "aussi longtemps que nécessaire", est "une décision majeure", selon la France

L’immobilisation "aussi longtemps que nécessaire" des quelque 200 milliards d’actifs de la Russie placés en Europe est "une décision majeure" prise par l’UE, a estimé le chef de la diplomatie française alors que les 27 Etats membres de l’Union européenne doivent entériner une décision en ce sens ce vendredi.

Au début de la guerre de la Russie en Ukraine, ces actifs russes ont été immobilisés pour une durée de 6 mois, renouvelables tous les 6 mois, à condition que tous les 27 pays européens soient d’accord. "Ce qui suppose que si un pays s’y oppose, la Russie pouvait à tout moment récupérer ses sommes", a expliqué Jean-Noël Barrot sur France Info. "Ce que nous voulons, c’est la sécurité pour l’Europe et les Européens".

"C’est l’objectif de la décision que nous prenons aujourd’hui, qui est une décision majeure, qui va sans doute infléchir le cours de cette guerre et accélérer la paix", a-t-il dit. Selon lui, ces actifs seront immobilisés "jusqu’à ce que la Russie cesse sa guerre d’agression et verse des réparations à l’Europe".

Techniquement, les 27 pays de l’UE ont décidé jeudi de pérenniser les sanctions contre Moscou qui servent de base à leur immobilisation, avait annoncé jeudi la présidence danoise de l’UE. La décision doit être confirmée vendredi à l’issue d’une procédure écrite. Les chefs d’Etat et de gouvernement des 27 se réuniront ensuite en sommet à Bruxelles le 18 décembre pour discuter de leur plan de financement de l’Ukraine, avec l’utilisation éventuelle des avoirs russes gelés en Europe. Jusqu’ici, les Européens butent sur l’opposition de la Belgique, où se trouve l’essentiel de ces avoirs de la Banque centrale russe.

Russie : sept blessés dans une attaque de drone contre un immeuble résidentiel

Sept personnes, parmi lesquelles un enfant, ont été blessées dans la nuit à la suite d’une attaque de drone ukrainienne à Tver, à environ 180 km au nord-ouest de Moscou, ont indiqué vendredi les autorités locales. "A Tver, on est en train de combattre les conséquences de la chute des débris d’un drone sur un immeuble résidentiel", a écrit sur Telegram le gouverneur régional par intérim, Vitali Koroliov. Selon lui, une vingtaine d’habitants ont dû être évacués en raison des dommages infligés à l’immeuble. D’après l’agence officielle Tass, la chute des débris du drone a provoqué un violent incendie dans un appartement, et les vitres de plusieurs autres ont été brisées.

Kiev mène régulièrement des frappes de drones en Russie, en disant cibler principalement les infrastructures militaires et énergétiques. Jeudi, la Russie avait annoncé avoir abattu plus de 300 drones ukrainiens dans la nuit, l’une des attaques ukrainiennes les plus massives. Des centaines de vols des aéroports de Moscou avaient été perturbées.

La semaine à venir sera décisive pour l’Ukraine, prévient Ursula von der Leyen

"La semaine à venir sera décisive" pour l’Ukraine, a souligné la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen jeudi soir, réitérant son appel à une "paix juste et durable". La cheffe de l’exécutif européen a indiqué avoir échangé avec les partenaires de la "coalition des volontaires", qui rassemble des soutiens de Kiev. "Malgré la pression, nous restons absolument fermes sur notre objectif : parvenir à une paix juste et durable pour l’Ukraine", a-t-elle insisté sur le réseau social X.

"Durable signifie qu’aucun accord de paix ne doit contenir les germes d’un conflit futur ni déstabiliser l’architecture de sécurité européenne dans son ensemble", a-t-elle ajouté. "Nous avons également discuté de la nécessité de garanties de sécurité robustes et crédibles". "J’ai informé les dirigeants de nos efforts pour sécuriser le financement de l’Ukraine pour 2026-2027. Nos propositions sont sur la table, et le sentiment d’urgence est partagé par tous", a-t-elle assuré.

© afp.com/MAXIM SHIPENKOV

Le président russe Vladimir Poutine, le 4 novembre 2025 à Moscou

Ukraine : une "zone démilitarisée", le compromis majeur que propose Kiev pour mettre fin au conflit

12 décembre 2025 à 09:00

Pour permettre au plan de paix américain de se déployer, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a fait part jeudi 11 décembre d’une importante concession que pourrait faire l’Ukraine, exigeant toutefois des garanties de sécurité.

Kiev a remis ce mercredi une version amendée du plan de Donald Trump, qui reprenait des exigences majeures de Moscou, comprenant des contre-propositions. Le président ukrainien a confirmé jeudi que les États-Unis souhaitaient conclure un accord "le plus tôt" possible.

"Zone démilitarisée" ou "zone économique"

Selon Volodymyr Zelensky, les deux questions essentielles restant à négocier sont le contrôle de la région orientale de Donetsk, où se déroule l’essentiel des combats, et le statut de la centrale nucléaire de Zaporijia, occupée par Moscou dans le sud de l’Ukraine. Le président ukrainien a assuré aux journalistes, dont ceux de l’AFP, que Washington "voit les forces ukrainiennes se retirer" de la partie de la région de Donetsk qu’elles contrôlent encore et qui serait transformée en "zone économique libre" ou "zone démilitarisée".

En échange, l’armée russe se retirerait des zones sous son contrôle dans les régions de Soumy, Kharkiv et Dnipropetrovsk (nord, nord-est et centre-est), mais se maintiendrait dans celles de Kherson et Zaporijia (sud). Pour rappel, la région de Donetsk, contrôlée à plus de 80 % par la Russie, et celle voisine de Lougansk, presque totalement sous son contrôle, sont l’objectif prioritaire du Kremlin en Ukraine. Moscou revendique depuis 2022 leur annexion, tout comme celle de deux autres régions du sud, celles de Kherson et Zaporijia, que les forces russes occupent partiellement.

"Ligne de séparation"

L’idée d’une zone démilitarisée dans des territoires que la Russie n’a pas réussi à conquérir en près de quatre ans d’intenses combats représenterait une concession majeure de Kiev, qui éviterait cependant d’y renoncer formellement. Le conseiller ukrainien pour la paix, Mikhaïlo Podoliak, a semblé la justifier en déclarant au journal Le Monde qu'"une zone démilitarisée devra exister de part et d’autre de la ligne" où serait déployé "un contingent étranger" : "C’est un format naturel de fin de conflit, sachant qu’une partie du territoire restera malheureusement sous occupation de facto de la Russie et qu’une ligne de séparation sera fixée de toute façon." "Il faudra décrire, de manière logique et juridique, si tous les types d’armements doivent être retirés ou uniquement les armes lourdes. Pour prévenir d’éventuelles violations, des représentants de missions de surveillance et un contingent étranger devront être présents afin de veiller au respect des principes et des accords", a-t-il également déclaré.

Volodymyr Zelensky a assuré que dans tous les cas, une "élection" ou un "référendum" sera nécessaire en Ukraine pour trancher sur les questions territoriales. Mardi, il s’était dit prêt à organiser une présidentielle si la sécurité du scrutin pouvait être assurée par les États-Unis, avec les Européens.

Américains et Russes sceptiques

Néanmoins, il n’est pas certain que Moscou accepte la proposition, ni même qu’elle soit soutenue par les États-Unis. Deux sources américaines interrogées par le journal en ligne Politico, ont ainsi exprimé leur scepticisme quant au fait que la Russie soutiendrait le plan, élaboré cette semaine avec la contribution des dirigeants européens. Quant à Donald Trump, ces sources font remarquer qu’il considère toujours l’Ukraine comme la partie la plus faible et la plus malléable dans le conflit, en particulier à la suite d’un scandale de corruption qui a forcé le chef d’état-major de longue date de Volodymyr Zelensky, Andriy Yermak, à démissionner.

Donald Trump, qui semblait sceptique quant aux perspectives de percée dans les commentaires du bureau Ovale mercredi, "est au courant" du dernier plan de 20 points que l’Ukraine a envoyé à Washington mercredi, a déclaré jeudi la porte-parole Karoline Leavitt. La Maison-Blanche n’a toutefois pas précisé ce que Trump pense de la proposition révisée, ou s’il comptait envoyer des assistants pour participer à des conversations supplémentaires avec des responsables européens et ukrainiens prévues ce week-end à Paris. En outre, Donald Trump a suggéré que les garanties de sécurité que l’Ukraine recherche, visant à dissuader la Russie d’attaquer à nouveau l’Ukraine, devraient venir principalement d’Europe.

© afp.com/Genya SAVILOV

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky à Kiev, le 4 décembre 2025

Immigration : le paradoxe de la ministre britannique Shabana Mahmood

12 décembre 2025 à 06:30

Et soudain la colère l’a submergée. Interrompue par le député libéral-démocrate Max Wilkinson, qui l’accusait "d’attiser les divisions" avec sa proposition de refonte des lois sur l’asile - la plus radicale depuis la Seconde Guerre mondiale -, la ministre de l’Intérieur britannique, Shabana Mahmood, a levé les yeux de son texte et fixé son opposant. La tirade qui a suivi a glacé les membres de la Chambre des Communes. "Contrairement à mon honorable collègue, c’est moi que l’on traite régulièrement de 'putain de Paki'. Et c’est à moi que l’on ordonne de 'rentrer dans mon pays'".

Si le Royaume-Uni est devenu aujourd’hui bien plus raciste qu’il ne l’était, selon Shabana Mahmood, c’est précisément parce que la gauche, sa propre famille politique, est dans le déni au sujet de l’immigration.

"Nous savons que le système ne fonctionne plus et il faudrait prétendre que tout va bien, dit-elle. Cela ne fait du bien à personne." Elle l’assure : "dans ma circonscription, 70 % des gens sont d’origine immigrée. Ce qu’ils veulent, c’est le contrôle de l’immigration." Les suffrages exprimés lors du référendum du Brexit semblent lui donner raison. Dans les terres traditionnellement travaillistes du nord de l’Angleterre, les Britanniques d’origine immigrée ont parfois voté massivement pour quitter l’Union Européenne et empêcher l’arrivée de migrants européens, comme les Polonais et les Roumains.

Rendre le statut de réfugié plus difficile à obtenir

Quant à ses collègues qui voudraient qu’elle pense et agisse différemment parce qu’elle est fille d’immigrés, Mahmood s’insurge. Elle s’est confiée quelques jours après sa saillie : "J’ai eu le sentiment qu’on me renvoyait à une sorte de 'reste à ta place' et 'tu es censée penser d’une certaine manière'. Et aussi : 'comment oses-tu, en tant que femme de ton origine, penser ou dire de pareilles choses ?' J’ai eu droit à beaucoup d’attaques très personnelles laissant entendre que j’agis contre les intérêts des personnes que je représente, ce que je rejette évidemment totalement."

Au contraire, elle estime que c’est en rendant le statut de réfugié beaucoup plus difficile à obtenir qu’elle pourra à la fois protéger les anciens immigrés aujourd’hui intégrés, montrer au pays tout entier que l’on peut contrôler les flux migratoires, faire baisser les tensions raciales et, ainsi, couper la route à Nigel Farage et son parti Reform, qui caracole en tête des sondages d’opinion, en pointant notamment les difficultés du gouvernement travailliste de Keir Starmer à endiguer l’immigration illégale.

Elle a grandi en Arabie saoudite

Femme de conviction, dans un parti qui n’en montre guère, avec un leader, le très impopulaire Keir Starmer, qui navigue à vue depuis son élection en juillet 2024, Shabana Mahmood détonne. Fille de Pakistanais Kashmiri, elle est née en 1980 à Birmingham, mais a grandi en Arabie saoudite jusqu’à l’âge de sept ans, son père ingénieur ayant obtenu un poste dans une entreprise de dessalinisation.

La famille, très pieuse, passe les vacances en pèlerinage à La Mecque ou à Médine. De retour à Birmingham, ses parents achètent et tiennent une petite épicerie de quartier, comme il y en a tant en Grande-Bretagne. Inspirée par la série de télévision Kavanagh, dont le personnage principal est un avocat d’origine modeste devenu star du barreau, Shabana Mahmood se lance dans des études de droit à Oxford et se spécialise dans le droit du travail. La politique comme le débat la passionnent et, en 2010, Mahmood gagne la députation pour Birmingham sous la bannière du Labour Party.

Au parlement, Mahmood est alors remarquée par la conservatrice Sayeeda Warsi, membre de la Chambre des Lords et première femme musulmane d’un gouvernement britannique, qui la prend sous son aile. Jeremy Corbyn aurait aimé en faire un membre de sa garde rapprochée, mais elle se sent plus proche de modérés tels que Keir Starmer, dont elle pilote la campagne victorieuse de 2024. Pour la récompenser, Starmer la nomme ministre de la Justice, avant de la promouvoir en septembre dernier ministre de l’Intérieur.

De ses sentiments religieux, elle parle librement : "Ma foi est le centre de ma vie, affirme-t-elle. Ma foi m’a poussé vers le service de l’État, c’est le moteur de ma vie et le prisme par lequel je vois la vie." Dans un pays qui ne connaît pas la séparation de l’Église et de l’État, la religion n’est le plus souvent considérée que sous son côté culturel et folklorique. Sa piété ne choque personne, en revanche, elle a dû réfréner ses prises de position pro palestinienne pendant la campagne électorale pour ne pas mettre Keir Starmer dans l’embarras.

Une réforme radicale

Toujours est-il que sa réforme du droit d’asile annoncée le 17 novembre dernier a surpris tout le monde par sa radicalité, à tel point que le leader des conservateurs, Kemi Badenoch, n’avait que des fleurs à lui jeter. Le statut de réfugié ne serait plus permanent mais temporaire, revu tous les 30 mois. Si le pays d’origine redevient sûr, le réfugié devra y retourner. Pour les immigrés arrivés de façon illégale, ils devront attendre vingt ans, et non plus cinq ans, pour être éligible à une carte de séjour permanente. Les aides sociales ne seraient plus accordées qu’aux réfugiés les plus démunis. S’ils sont arrivés au Royaume-Uni avec des effets personnels de valeur comme des bijoux ou des espèces, ceux-ci seront saisis pour financer les frais de dossier et de procédure. Le regroupement familial sera sévèrement restreint et conditionné à des revenus conséquents, un niveau de langue suffisant et ne sera possible qu’au bout de cinq ans. Des familles entières, et ce même lorsque les enfants sont nés au Royaume-Uni (le droit du sol n’existant pas au Royaume-Uni), pourront être déportées vers leur pays d’origine. Si celui-ci refuse de les accepter, plus aucun visa ne sera délivré à ses ressortissants !

Cette réforme, si elle devenait loi - ce qui a toutes les chances d’advenir, étant donné la majorité écrasante du Labour à la Chambre des Communes (405 députés sur 650), représentera un changement majeur dans la politique d’asile du Royaume-Uni. Jusqu’ici fondé sur un modèle de protection stable, le nouveau modèle est basé sur le temporaire et le conditionnel, autrement dit l’incertitude totale pour le demandeur d’asile.

Trevor Phillips, d’origine guyanaise, auteur de l’ouvrage Windrush, The Irresistible Rise of Multi-racial Britain et ancien Président de la commission pour l’Égalité Raciale créée par Tony Blair en 2003, comprend parfaitement la logique derrière "le paradoxe Shabana". Pour lui, "c’est en durcissant les conditions d’entrée et de séjour des nouveaux arrivants que l’on peut espérer préserver la tolérance britannique." Toute tolérance ayant ses limites, elle doit être réservée à un nombre restreint de nouveaux arrivants. Phillips préconise même d’interdire les transferts d’argent effectués par les immigrés vers leur pays d’origine, dont les montants se sont élevés, dit-il, à 9,3 milliards de livres sterling (soit 10,6 milliards d’euros) en 2023. "L’effet dissuasif serait immédiat".

Pour Patrick Maguire, grand connaisseur du parti travailliste, auteur de deux essais à succès, l’un sur Jeremy Corbyn, l’autre sur Keir Starmer, Shabana Mahmood "est une figure singulière, qui ne s’identifie à rien autant qu’à sa propre expérience. À Conor McGinn, catholique d’Irlande du Nord avec qui elle a dirigé les campagnes électorales de Starmer dans l’opposition, elle se plaignait souvent : "Même si nous sommes des initiés, nous resterons toujours des outsiders."

Certains voient derrière Mahmood l’influence du Blue Labour, mouvance prolétaire patriotique théorisée par Maurice Glasman, aujourd’hui membre de la chambre des Lords. Culturellement et socialement conservateur, économiquement interventionniste, ces travaillistes ont toujours poussé Keir Starmer à se montrer ferme en matière d’immigration. Selon Patrick Maguire, on parle désormais de "Mahmoodisme" : "une politique enracinée dans le territoire, la condition sociale et les convictions religieuses… et qui oblige le Parti travailliste à réfléchir."

© afp.com/Oli SCARFF

La ministre de l'Intérieur britannique Shabana Mahmood lors du congrès du parti travailliste le 29 octobre 2025

L’actu à La Loupe : l'hostilité de Donald Trump face à l’Europe

12 décembre 2025 à 06:00

Ces derniers jours, le président américain a donné une longue interview au média Politico, depuis la Maison-Blanche. Quarante-cinq minutes d’entretien durant lesquelles Donald Trump évoque les réformes à mettre en place ou le futur du parti Républicain. Durant cette conversation, il est notamment question de l’Europe et de sa relation aux dirigeants européens. "À mon avis, bon nombre de ces pays ne seront plus viables. La plupart des nations européennes sont en déclin", assène le président américain face à la journaliste.

Alors que les relations sont déjà tendues, les dernières sorties de Donald Trump viennent illustrer un changement de direction opéré par les Etats-Unis vis-à-vis du Vieux Continent. Cette nouvelle méthode apparaît également dans un document publié par la Maison-Blanche il y a quelques jours : la stratégie nationale de sécurité. Une trentaine de pages qui ont de quoi inquiéter l'Europe.

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Cet épisode a été écrit et présenté par Charlotte Baris, monté et réalisé par Jules Krot, rédaction en chef Charles Carrasco.

Crédits : Politico

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© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Le président américain Donald Trump à la Maison Blanche à Washington, le 8 décembre 2025
Reçu hier — 11 décembre 2025 L'Express

Panneaux solaires : ces composants chinois qui menacent le réseau électrique américain

11 décembre 2025 à 19:20

Une cyberattaque pourrait-elle provoquer une coupure de courant géante aux Etats-Unis ? C’est ce que craignent plusieurs officiels, entreprises du secteur de l’énergie et experts en sécurité américains. En cause : la dépendance des Etats-Unis aux onduleurs chinois. Ces composants convertissent l’électricité produite par les panneaux solaires en courant compatible avec le réseau électrique.

Selon une étude du spécialiste de la veille stratégique Strider Technologies relayée par le Washington Post, près de 85 % des fournisseurs d’équipements interrogés utilisent des onduleurs fabriqués par des entreprises qui ont des liens avec l’armée ou le gouvernement chinois. Ces entreprises représentent 12 % de l’électricité générée à l’échelle des Etats-Unis. Selon plusieurs experts en cybersécurité interrogés par le journal, ces appareils sont vulnérables aux cyberattaques et peuvent provoquer des coupures d’électricité en cascade.

"De sérieuses implications sur la sécurité nationale"

Le rapport de Strider prévient que le gouvernement chinois, grâce au contrôle qu’il exerce sur les entreprises fabricant ces onduleurs et leurs réseaux, pourrait manipuler ou perturber le réseau américain "en cas de crise". La Chine a les armes, reste à savoir si et quand elle va les utiliser. Interrogé par le Washington Post, un ancien dirigeant de Southern Company, un des plus grands fournisseurs d’énergie américains, estime que ces composants vulnérables pourraient même perturber d’autres secteurs comme la finance ou la communication.

Les estimations autour de l’ampleur de la menace varient, mais l’inquiétude a en tout cas gagné les hautes sphères politiques américaines, note le journal. La Commission d’examen économique et de sécurité Etats-Unis-Chine, créée par le Congrès américain, a évoqué les onduleurs chinois dans un rapport publié en novembre dernier. Elle souligne une "vulnérabilité ayant de sérieuses implications sur la sécurité nationale". Et cite un exemple : en novembre 2024, un "certain nombre" d’onduleurs installés dans des foyers américains ont été désactivés par leur fabricant chinois. Il ne s’agissait certes pas d’un sabotage, mais d’un mécanisme de vérification intégré aux onduleurs. Le cas montre toutefois que ces composants peuvent être manipulés à distance, expose la commission. La Chine pourrait par ailleurs arrêter les ventes ou restreindre l’accès aux onduleurs pour porter atteinte aux Etats-Unis.

Réguler l’importation des onduleurs chinois ?

La Chine dément les accusations, qui ne sont, selon un mail de l’ambassade relayé par le Washington Post, "sans aucun fondement, au mépris des faits" concernant les réalisations de la Chine dans le domaine des infrastructures énergétiques. Reste que les Etats-Unis cherchent à s’affranchir de ces composants vulnérables. Dans son effort d’investissement dans les énergies renouvelables, le pays s’est largement appuyé sur des composants chinois abordables, dont la production est subventionnée par le gouvernement chinois.

Les Etats-Unis peinent à leur faire concurrence. L’administration de Joe Biden avait bien tenté de subventionner davantage de technologies américaines pour les énergies renouvelables. Mais les fonds ont ensuite été coupés par son successeur, Donald Trump, qui ne cache pas son désamour pour les énergies renouvelables, auxquelles il préfère les énergies fossiles. Le Département de l’énergie assure quant à lui que l’administration du président s’engage à réduire la dépendance de l’industrie aux chaînes de valeur étrangères.

L’équation est d’autant plus difficile à résoudre que les Etats-Unis souffrent d’une crise énergétique, ce qui rend les régulateurs réticents à renforcer les règles de sécurité sur les composants.

52 législateurs américains ont ainsi proposé de restreindre l’importation d’onduleurs chinois. Leur demande faisait suite à des révélations de Reuters selon lesquelles des dispositifs de communication non autorisés avaient été trouvés dans des onduleurs utilisés aux Etats-Unis.

L’Europe n’est pas épargnée. En mai dernier, un rapport de SolarPower Europe avait déjà tiré la sonnette d’alarme sur la vulnérabilité des onduleurs chinois, mal sécurisés. Une évolution de la réglementation européenne est nécessaire, avance le rapport.

© afp.com/Mark Felix

Dans son effort d'investissement dans les énergies renouvelables, le pays s'est largement appuyé sur des onduleurs chinois abordables mais vulnérables aux cyberattaques.

De la RDC à la Thaïlande : Donald Trump, faiseur de paix… ou faiseur d'illusions ?

11 décembre 2025 à 19:08

Sur scène, quelques instants après avoir reçu le "prix de la paix de la Fifa", créé par un de ses proches, Donald Trump se vante d'avoir "sauvé des millions de vie", citant le Congo, l'Inde, le Pakistan, "tant de guerres de guerres auxquelles nous avons réussi à mettre fin" ou à éviter. Huit guerres au total. Mais premier hic, deux d’entre elles n’ont jamais existé.

La Serbie et le Kosovo - qui ont, certes, des relations particulièrement tendues - ont signé en 2020 un accord de normalisation économique en présence du président américain. Mais un accord de paix, jamais. L’autre peace deal qui n’en est pas un : des tensions autour d’un méga barrage construit sur le Nil par l’Ethiopie, que l’Egypte perçoit comme une "menace existentielle". Donald Trump ne semble pas avoir joué un rôle pour apaiser les discordes, loin de s’être depuis dissipées.

Second hic, les six autres accords ont montré quelques fragilités. Un bilan finalement compromettant pour l’homme qui brigue ouvertement le prix Nobel de la paix.

"Passer un coup de téléphone"

Depuis le 26 octobre, Donald Trump s’érige en artisan de l'"accord historique" signé entre la Thaïlande et le Cambodge. Une signature officielle faisant suite au cessez-le-feu obtenu avec l’aide de la Chine et de la Malaisie en juillet, dont l’Américain s’était attribué toute la gloire. Mais le dernier accord en date n’aura tenu que deux semaines, suspendu par la Thaïlande le 10 novembre après l’explosion d’une mine terrestre à proximité de la frontière.

Dimanche 7 décembre, les hostilités ont repris, faisant au moins 19 morts. Les affrontements sont "plus intenses cette fois qu’en juillet", a assuré à l’AFP Lay Non, un habitant ayant fui un village cambodgien. Plus de 500 000 personnes ont été contraintes d’évacuer les zones de combats.

Un accord instable donc, signé à la va-vite, plus rapide que qualitatif. Le premier ministre thaïlandais, Anutin Charnvirakul, en est conscient : "Entre dirigeants, il ne s’agit pas seulement de passer un coup de téléphone. Il y aura un rendez-vous prévu et des sujets précis à aborder".

Peace deals ou business deals

Et Donald Trump est familier de ces signatures plus médiatiques que diplomatiques. A Washington, le 4 décembre, devant un parterre de caméras, il parvient à un accord entre la République démocratique du Congo et le Rwanda. Ce qu’il qualifie de "miracle", n’aura en pratique aucun effet sur l’Est Congolais, région en proie au conflit depuis plus de 30 ans.

Ce mardi 9 décembre, le groupe armé M23, qui combat l’armée congolaise a pénétré dans la ville stratégique d’Uvira. Une "gifle" à Washington, dans les termes du Burundi voisin, dont le président avait déjà alerté de la précarité de l’accord. "S’engager sur un plan de paix est une chose, le mettre en œuvre en est une autre", ébruitait Evariste Ndayishimiye.

Pourtant Donald Trump semblait optimiste pour l’avenir. Lors de la cérémonie de signature il déclare à proximité des oreilles du Monde : "Ils [Congolais et Rwandais] ont passé tant de temps à s’entretuer, maintenant ils vont passer du temps à s’étreindre […] et profiter économiquement des Etats-Unis". Le mot-clé : économie. Un paramètre qui semble être au cœur de la stratégie de la Maison-Blanche. Et le président congolais n’a pas manqué d’abreuver ses désirs avec la proposition d’un accès préférentiel pour Washington à ses richesses minières.

Une impression de déjà-vu ? Lorsqu’il était question de la guerre en Ukraine menée par la Russie, le président américain proposait sa protection à son homologue Volodymyr Zelensky… en échange des ressources minérales de son pays. Car finalement les "peace deals" du dirigeant milliardaire ressemblent plus à des business deals.

Des réussites qui demeurent fragiles

Certains accords payent plus que d’autres. C’est le cas du cessez-le-feu entre Israël et Gaza, arraché par Donald Trump, comme promis, quelques mois après son retour au pouvoir. Une réussite plus grande en apparence qu’en pratique. Car si cessez-le-feu il y a eu, son maintien reste précaire.

Depuis le 10 octobre, date de son entrée en vigueur, des violences ont continué à exploser. 370 Palestiniens ont perdu la vie dans des frappes israéliennes, ainsi que de trois soldats de l’Etat Hébreu. Et la deuxième phase du plan américain, destiné à consolider le cessez-le-feu peine à se mettre en place. Une dépouille d’otage - dont la restitution est exigée par Israël pour engranger la suite du plan de paix - est toujours retenue par le Hamas. Quant au mouvement islamiste, il estime que la deuxième étape "ne peut pas commencer" tant qu’Israël "poursuit ses violations de l’accord", a affirmé mardi à l’AFP un membre de son bureau politique, Hossam Badran. Un schéma qui se reproduit dans d’autres conflits où Donald Trump s’est impliqué.

En juin, Israël a lancé une offensive contre l’Iran pour empêcher Téhéran de se doter de la bombe atomique. Attaque à laquelle les Etats-Unis se sont rapidement joints. 12 jours plus tard, Washington a annoncé un "cessez-le-feu total" entre les deux pays. Une trêve dont la stabilité reste incertaine, le guide suprême iranien, Ali Khamenei, refusant de céder sur la question de l’enrichissement d’uranium.

Quant à l’Arménie et l’Azerbaïdjan qui se sont livrés deux guerres au sujet de la région contestée du Karabakh, leurs dirigeants ont paraphé en août, à la Maison-Blanche, un projet d’accord de paix. Mais l’aboutissement d’une signature officielle demeure incertain.

Enfin, des affrontements entre le Pakistan et l’Inde ont fait plus de 70 morts en mai 2025. Lorsque Donald Trump a annoncé un cessez-le-feu entre les pays d’Asie du Sud, le Premier ministre indien, Narendra Modi, a nié toute implication étrangère dans la résolution du conflit.

© afp.com/Jia Haocheng

Donald Trump (à gauche) recevant le prix de la Paix de la Fifa des mains de Gianni Infantino le 5 décembre 2025 au Kennedy Center de Washington lors du tirage au sort de la Coupe du monde 2026 de football

Catherine Fieschi : "Sur l’Europe, Jordan Bardella est plus proche de Giorgia Meloni que de Marine Le Pen"

11 décembre 2025 à 18:00

Des grandes formations de la droite populiste piaffent aux portes du pouvoir en France mais aussi au Royaume-Uni ou en Allemagne. Ils y participent déjà depuis des années en Pologne ou en Italie. Chercheuse au centre Robert Schuman de l’Institut universitaire européen (IUE) à Florence, Catherine Fieschi décrypte et compare leurs programmes économiques, qui sont plus divers qu’il n’y paraît. Entretien.

L'Express : Comment définir les projets économiques des partis populistes de droite en Europe ?

Catherine Fieschi : Leur attitude plus ou moins illibérale est le marqueur principal de leur politique en matière socio-économique. Les plus attachés à une politique économique et sociale illibérale sont très présents dans les pays d’Europe centrale et orientale, en particulier le PiS en Pologne et Fidesz en Hongrie. Chez eux, il y a un protectionnisme affirmé couplé à une vraie politique de protection sociale - même si celle-ci exclut les étrangers. De l’autre côté, on trouve des partis plutôt enclins au libéralisme économique, avec l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), Reform UK au Royaume-Uni, Vox en Espagne et surtout Fratelli en Italie. Entre les deux, il y a des cas hybrides, avec le RN français et le PVV néerlandais.

Et leur vision anti-immigration les réunit tous ?

Avec des nuances ! Il est plus facile d’être non libéral et de s’opposer à l’immigration. En revanche, défendre en même temps le libéralisme économique et le refus de l’immigration est une contradiction. Giorgia Meloni, la présidente du Conseil italien, est celle qui l’a le mieux résolue, bien qu’elle l’ait fait en sous-main. Elle use d’une rhétorique agressive contre les migrants tout en faisant preuve de pragmatisme quant aux besoins de main-d’œuvre de son industrie, avec des régularisations massives. Mais le fait de s’être positionnée comme quelqu’un qui prend à bras-le-corps ces sujets migratoires rassure sa population : l’immigration, qui était la première préoccupation exprimée par les Italiens dans les sondages, est redescendue, selon les mois, à la quatrième ou cinquième place.

Quant à l’Europe, elle fait l’objet de critiques plus ou moins virulentes selon les partis…

Tous sont critiques de l’Europe mais Meloni et son parti Fratelli d’Italia se distinguent là aussi, en faisant preuve d’un grand pragmatisme. Certes, les 194 milliards d’euros prévus pour l’Italie dans le plan de relance de l’Union européenne les ont aidés : vu la taille de la carotte, Meloni a fait ce qu’il fallait, en mettant ses pas dans ceux de son prédécesseur Mario Draghi. Mais il y a aussi quelque chose de plus profond chez elle : elle doit tenir compte du fait qu’être pro-européen fait partie de l’ADN du pays. Comme Viktor Orban, elle prétend vouloir changer l’Europe de l’intérieur. En revanche, Marine Le Pen est plus anti-européenne, plus farouchement souverainiste et infiniment plus méfiante vis-à-vis des institutions bruxelloises. Si elle dirigeait la France, Marine Le Pen ferait moins de cas de l’Union européenne que Meloni. Ce serait moins vrai pour Jordan Bardella, dont le discours sur l’Europe est plus proche de celui de Meloni que de celui de Le Pen.

Dans quelle mesure la rhétorique anti-élite développée par ces partis populistes vise-t-elle aussi les élites économiques, grands patrons et entrepreneurs ?

De ce point de vue, l’AfD est intéressante parce qu’elle a été fondée comme un parti plutôt intellectuel et élitiste, par des économistes opposés à la monnaie unique européenne. Elle a évolué pour devenir anti-élite mais elle a gardé sa ligne anti-euro et elle a maintenu un côté plutôt libéral. Elle ménage les grandes entreprises allemandes et surtout ce tissu dense de PME qui constitue pour elle un réservoir de votes.

La critique de l’Europe naît aussi du rejet de la mondialisation. Comment se situe la galaxie nationale populiste sur ce thème ?

Le plus intéressant est Reform UK, le parti de Nigel Farage, issu du Brexit. Les électeurs qui ont voté pour la sortie de l’Union européenne en 2016 regroupaient à la fois ceux qui rejetaient la mondialisation et l’immigration et ceux qui, comme Boris Johnson, chantaient les louanges de "Global Britain". Tous se sont retrouvés dans le Brexit mais pour des raisons fondamentalement différentes. C’est pourquoi Reform UK, qui a hérité de cette contradiction, est plus libéral et plus ouvert à la mondialisation que ses homologues européens.

Cependant, même sur le continent, les critiques contre la mondialisation contiennent aussi une grande part de cynisme. Le PiS polonais, par exemple, est à la fois très critique de la mondialisation et très pro américain. Et cela ne date pas de Donald Trump ! En Hongrie, c’est encore plus marqué : la Chine est l’investisseur numéro un dans ce pays, mais cela n’empêche pas Orban d’afficher son hostilité à la mondialisation… La ligne plus ou moins pro-business est un meilleur critère des politiques qu’ils mènent que leurs déclarations contre la mondialisation, qui sont de la rhétorique.

Au RN le positionnement antimondialisation s’accompagne d’un discours de défense de l’État providence, est-ce une ligne qu’on retrouve ailleurs ?

Oui mais pas partout, pas chez Meloni notamment. Elle s’est attaquée dès son arrivée au pouvoir au revenu minimum garanti, héritage des populistes de gauche du parti Cinq Étoiles. Dans d’autres pays où l’Etat s’aligne sur l’Eglise catholique, comme en Pologne et en Hongrie, on défend beaucoup l’État providence. L’AfD est un cran en dessous, car elle met moins l’emphase sur la protection des Allemands que sur la "dé-protection" des immigrés. En France, le calcul de Marine Le Pen était de pouvoir à la fois parler aux classes moyennes du sud et aux populations plus modestes du nord de l’Hexagone. Bardella cherche aussi à ménager la chèvre et le chou mais au fond, il est sur une ligne soucieuse de rassurer les entreprises.

Sur l’environnement, y a-t-il unanimité des populistes contre les mesures écologiques contraignantes ?

L’attachement à l’énergie nucléaire est une thématique présente dans les positions de l’AfD comme au RN. Et dans tous ces partis populistes de droite, il y a un rejet du Pacte vert européen. Tout comme l’immigration, il s’agit là d’une thématique très technique, perçue comme émanant de Bruxelles. Dans un cas comme dans l’autre, on fait passer l’élite bruxelloise pour une entité déconnectée qui se fiche de ce que pense l’homme de la rue et qui lui impose des réglementations incompréhensibles. C’est du pain bénit pour le discours populiste. Il faut y ajouter la critique des énergies renouvelables, des éoliennes et des panneaux solaires accusés de défigurer la nature, patrimoine du peuple. La critique s’exprime moins en Europe centrale et orientale, parce que les Verts y sont moins présents. Le positionnement sur l’agriculture est lui aussi différenciant. Certains comme le RN, les Fratelli ou le PiS polonais défendent bec et ongles la Politique agricole commune, d’autres y voient plus un sujet de débat.

L’incapacité de ces partis à former un groupe commun au Parlement européen reflète-t-elle une vraie divergence politique ou plutôt des jeux de pouvoir ?

L’éclatement actuel reflète avant tout le désaccord sur la Russie ! Cependant, il y a aussi des animosités plus personnelles, avec par exemple Marine Le Pen qui refuse de siéger avec l’AfD pour ne pas ruiner sa stratégie de "dédiabolisation". Et comme tous ces partis sont nationalistes, il est compliqué pour eux de conclure des alliances transfrontières… Ils sont tous alignés sur l’idée de se désaligner. Mais ils savent que former un groupe parlementaire est utile pour obtenir des financements et de l’influence politique.

A partir de toutes ces réflexions, peut-on esquisser une typologie des partis populistes de droite ?

On peut construire une matrice en mettant en abscisse les pragmatiques libéraux d’un côté et les dogmatiques illibéraux de l’autre, et en ordonnée l’euroscepticisme plus ou moins prononcé de chaque parti. On pourrait ainsi définir quatre groupes, les libéraux anti-UE avec l’AfD et Bardella, les non-libéraux anti-UE avec notamment Marine Le Pen, les libéraux pragmatiques avec les Fratelli d'Italia, les non-libéraux pragmatiques avec le Fidesz de Viktor Orban… Mais puisque l’AfD et le RN n’ont jamais participé au gouvernement, il est difficile de savoir s’ils sont vraiment pragmatiques. En outre, tous ces partis ne marchent pas comme un seul homme, ils sont traversés par des courants et des débats.

© afp.com/ROMEO BOETZLE

Le président du RN Jordan Bardella le 6 octobre 2025 à Strasbourg

L'Otan appelle à "tester" Vladimir Poutine pour voir "s'il veut la paix en Ukraine"

11 décembre 2025 à 17:26

Le chef de l'Otan a appelé jeudi 11 décembre à "tester" Vladimir Poutine pour déterminer s'il "veut la paix en Ukraine" en établissant un plan soutenu par les Etats-Unis et l'Europe, après la remise par Kiev à Washington d'une nouvelle mouture pour mettre fin à la guerre.

"Est-ce que je pense que les Etats-Unis et l'Europe parviendront à s'entendre sur la question de l'Ukraine ? Oui, j'en suis convaincu", a dit le secrétaire général de l'Alliance, Mark Rutte, au cours d'un débat à Berlin. "Suis-je sûr que les Russes accepteront ? Je ne sais pas. C'est le test", a-t-il ajouté, appelant à voir si Poutine "est sérieux".

Il a également une nouvelle fois jugé que le président russe ne s'arrêterait pas à l'Ukraine si les Européens n'investissaient pas massivement dans leur défense. "Si vous aimez la langue allemande et que vous ne voulez pas parler russe, c'est crucial d'investir massivement dans la défense, c'est une condition sine qua non, car sinon (Poutine) ne s'arrêtera pas à l'Ukraine", a martelé Mark Rutte.

Pékin, la "bouée de sauvetage" de la Russie

Dans un discours prononcé avant le débat organisé par la Conférence de la sécurité de Munich, l'ancien Premier ministre néerlandais a par ailleurs reproché à Pékin d'être la "bouée de sauvetage" de la Russie. "Sans le soutien de la Chine, la Russie ne pourrait pas continuer à livrer cette guerre. Par exemple, environ 80 % des composants électroniques essentiels (présents à bord) des drones russes et d'autres systèmes sont fabriqués en Chine", a-t-il dit.

Ce pays, l'un des principaux partenaires commerciaux de la Russie, revendique une certaine neutralité dans le conflit en Ukraine mais elle s'est abstenue de condamner l'invasion russe et a, depuis son déclenchement, approfondi ses relations avec Moscou.

En outre, pour Mark Rutte, si l'Ukraine se retrouvait "sous le joug de l'occupation russe", cela coûterait très cher aux Etats faisant partie de l'Alliance atlantique, une organisation qui devrait alors "augmenter considérablement sa présence militaire le long de son flanc oriental". Ce jeudi, la Russie a revendiqué la prise de la ville de Siversk, dans l'est de l'Ukraine, l'un des derniers verrous sur ce front qui empêchent les forces russes de s'approcher des grandes cités régionales de Kramatorsk et de Sloviansk. Comptant environ 11.000 habitants avant la guerre, cette ville est aujourd'hui en grande partie détruite.

Au dernier sommet de l'Otan à la Haye fin juin, ses pays membres ont promis de consacrer d'ici à 2035 5 % de leur PIB (au moins 3,5 % pour les dépenses strictement militaires et 1,5 % à des dépenses liées à la sécurité). Les Etats-Unis de Donald Trump ont mis une pression considérable pour que l'Europe dépense plus pour sa propre sécurité, l'accusant d'avoir profité des décennies durant des largesses américaines.

© afp.com/Tobias SCHWARZ

Le chancelier allemand Friedrich Merz (d) et le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte lors d'une conférence de presse à Berlin, le 11 décembre 2025

Avion de combat du futur : les parties prenantes européennes tentent de sortir de l’impasse

11 décembre 2025 à 15:58

Le projet d’envergure de lancer un avion de combat européen verra-t-il le jour ? L’ambitieux chantier du Scaf (NDLR : système de combat aérien du futur), lancé en 2017 par Emmanuel Macron et Angela Merkel, bat de l’aile. Il s’agit en effet d’un projet commun entre l’Allemagne, la France et l’Espagne, dont l’avionneur Dassault est le maître d’œuvre et dans lequel Airbus est engagé aussi au nom d’industriels allemands et espagnols. Or, les parties prenantes s’écharpent sur la gouvernance.

Les trois pays concernés tentent de sauver les meubles avant la fin de l’année. Est-ce la réunion de la dernière chance ? L’ordre du jour n’a pas été précisé, mais le gouvernement allemand indique sur son site que les ministres de la Défense allemand, Boris Pistorius, et français, Catherine Vautrin, se rencontreront ce jeudi à Berlin. Ils seront ensuite rejoints par leur homologue espagnole, Margarita Robles.

Dassault veut faire cavalier seul

La réunion a lieu alors qu’Airbus et Dassault affichent publiquement leurs désaccords sur la répartition du travail. En septembre dernier, Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation - qui fabrique le Rafale - avait déclaré que son groupe était capable de développer le Scaf "tout seul". Il avait également réclamé une révision de la gouvernance paritaire à trois (avec Allemagne et Espagne) du projet. Le futur Scaf est en effet composé d’un avion, de drones accompagnateurs et d’un "cloud de combat" qui connecte le tout. Selon la chaîne de télévision allemande Tagesschau, le dirigeant de Dassault serait prêt à coopérer avec Airbus sur les drones et le cloud, mais estime avoir les compétences clés pour construire l’avion de combat, en atteste la réussite de son Rafale.

Une vision qui n’a pas plu à Airbus. Le président du comité d’entreprise d’Airbus Defense & Space, Thomas Pretzl, a, à plusieurs reprises - dans les médias ou lors de réunions - abordé l’hypothèse d’un programme Scaf sans la France. Il a d’ailleurs cosigné avec le vice-président du puissant syndicat de l’industrie allemande IG Metall, Jürgen Kerner, une lettre adressée lundi aux ministres allemands de la Défense, Boris Pistorius, et des Finances, Lars Klingbeil. Les deux hommes ont indiqué ne "plus faire confiance à Dassault" sur le programme d’avion de combat européen. L’avionneur français s’est selon eux "complètement disqualifié en tant que partenaire fiable au sein de l’Europe en cette période de menace aiguë". "Dassault n’a jusqu’à présent pas renoncé à exiger la prise en charge intégrale du développement de l’avion de combat", ajoute le courrier d’IG Metall. "Nous aimons travailler avec des entreprises françaises", assure IG Metall, "mais pas avec Dassault".

En réponse, le syndicat patronal des industries métallurgiques (UIMM), présidé par Eric Trappier, a fait part mercredi de son "étonnement" face à la déclaration d’IG Metall, qui souhaite d’après elle "évincer un fleuron technologique français de l’aviation militaire du projet européen d’avion de combat". "Les entreprises de l’industrie française ne sauraient accepter une telle position visant à écarter les intérêts industriels de la France de ce projet stratégique", a-t-elle ajouté.

Un "chemin de croix"

Mercredi également, le patron exécutif d’Airbus reconnaissait les difficultés des parties prenantes à s’entendre. Guillaume Faury, interrogé sur France Inter, a qualifié de "chemin de croix" le processus de construction d’une industrie européenne de défense, notamment à travers le Scaf. Ce dernier doit remplacer les Rafale français et les Eurofighter allemands et espagnols d’ici 2040, dans un contexte de menace croissante de la part de la Russie. Si, selon le dirigeant, le programme "va se faire", il a toutefois regretté le "différent assez significatif avec Dassault "sur la façon de conduire le développement de l’avion".

"Le Scaf, c’est un système de combat dans lequel il y a un avion, des drones, ce qu’on appelle un cloud de combat, un système digital dans lequel l’ensemble des objets sont connectés" a-t-il rappelé. "Quels sont les modes de coopération sur chacun des piliers, ce n’est pas encore acquis", a-t-il dit.

Le plan B de l’Allemagne

L’Allemagne, de son côté, prépare déjà "un plan B, voire un plan C", rapporte la Tagesschau. Airbus pourrait ainsi se concentrer sur le système de drones et de leur connexion via le "cloud de combat".

Par ailleurs, le ministre italien de la Défense, Guido Crosetto, a évoqué début décembre une possible participation de l’Allemagne à un autre programme, le GCAP. Ce dernier cherche à faire voler un avion de combat de nouvelle génération d’ici 2035 et réunit l’Italie, le Japon et le Royaume-Uni. "L’Allemagne pourrait probablement rejoindre ce projet dans le futur", a déclaré le ministre, selon Reuters. Airbus & Defense aurait également envisagé de coopérer avec la Pologne et la Suède, rapporte la Tagesschau. L’administration allemande a quant à elle souligné la nécessité de trouver une solution d’ici la fin de l’année.

© AFP

En septembre dernier, Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation avait déclaré que son groupe était capable de développer le Scaf "tout seul".

Pourquoi les Etats-Unis sont maintenant considérés comme une menace par le renseignement danois

11 décembre 2025 à 12:45

C’est une première. Jamais encore les renseignements militaires danois n’avaient exprimé aussi clairement leurs inquiétudes concernant les États-Unis dans leur évaluation annuelle des menaces. Dans un rapport de 64 pages intitulé "Udsyn 2025" et publié ce mercredi 10 décembre, le service de renseignement de la défense danois (FE) ne se contente pas, cette année, de décrire uniquement la menace russe ou la montée en puissance de la Chine : il s’attarde sur la politique américaine menée par Donald Trump. Un nouveau facteur d’incertitudes dont se préoccupe le FE.

Les Etats-Unis "n’excluent plus le recours à la force militaire" contre leurs alliés

"Les Etats-Unis utilisent leur puissance économique, y compris la menace de droits de douane élevés, pour imposer leur volonté, et n’excluent plus le recours à la force militaire, même contre leurs alliés", peut-on lire dans le document.

Ce rapport est également l’occasion pour le FE d’évoquer l’intensification des activités militaires dans l’Arctique qui, selon lui, rappelle les inquiétudes partagées depuis plusieurs années par les dirigeants européens face à la doctrine "America First".

Le rapport note aussi que l’attention croissante portée par Washington à la concurrence stratégique avec la Chine "crée une incertitude quant à son rôle de principal garant de la sécurité en Europe". Autrement dit, un pivot américain vers l’Asie pourrait affaiblir la protection dont bénéficie historiquement le continent.

Dans une interview accordée au journal de centre-gauche danois Politiken, le directeur du FE, Thomas Ahrenkiel, a justifié le choix d’inclure les Etats-Unis dans le rapport : Ils "ont été le garant de notre sécurité pendant des générations, ce qui accroît l’incertitude en matière de politique de sécurité. […] La situation est grave, c’est pourquoi nous nous efforçons davantage de décrire et d’analyser cet aspect", explique-t-il. Le directeur a toutefois souligné dans ses déclarations publiques que les Etats-Unis restaient le "partenaire et allié le plus proche" du Danemark, malgré le ton de plus en plus hostile de l’administration Trump.

Ces propositions d’achat du Groenland qui ont semé la discorde

Ce rapport paraît dans un climat tendu entre les Etats-Unis et l’Europe. Parmi les nombreuses discordes, la demande insistante de Donald Trump d'"acquérir" le Groenland a crispé les responsables danois. Une demande répétée, assortie de déclarations affirmant que le président américain obtiendrait l’île "d’une manière ou d’une autre". Pour Copenhague, l’épisode a révélé combien les priorités américaines pouvaient déstabiliser même les plus anciens alliés, selon le rapport.

L’an dernier, le gouvernement avait même convoqué le chef de l’ambassade américaine après des allégations d'"opérations d’influence secrètes" au Groenland, menées par trois Américains liés à Donald Trump. Aucune identité n’a été révélée, mais ces accusations faisaient suite à des informations selon lesquelles les services de renseignement américains avaient été encouragés à renforcer leur présence dans la région.

La semaine dernière, l’administration Trump publiait un document sur sa stratégie de sécurité nationale dans lequel elle appelait les pays européens à assumer la "responsabilité principale" de leur propre défense. Et ce, avant d’ajouter que l’Europe risquait la "disparition de sa civilisation".

© afp.com/Jim WATSON

Le vice-président américain JD Vance (2e à partir de la droite) et son épouse Usha Vance (2e à partir de la gauche) visitent la base américaine de Pituffik au Groenland (Danemark), le 28 mars 2025

Une "escalade majeure" : ce que l’on sait de la saisie d’un pétrolier au large du Venezuela par Washington

11 décembre 2025 à 11:34

"Une escalade majeure dans la campagne de pression menée par l'administration (Trump, NDLR) contre le dirigeant du pays, Nicolas Maduro". Voici comment le Wall Street Journal résume la scène. Sur une vidéo publiée sur le compte X de la ministre de la Justice américaine Pam Bondi, partiellement floutée, on distingue des militaires américains descendant en rappel depuis un hélicoptère sur le pont d’un pétrolier. Quelques instants capturés au large du Venezuela, ce mercredi 10 décembre. Selon MarineTraffic, le "très grand pétrolier transporteur de brut" est baptisé Skipper et transportait 1,1 million de barils. Le navire était en route pour Cuba, d'après le Washington Post.

Donald trump, lui, a choisi l’emphase pour décrire cette séquence. "Nous venons tout juste de saisir un pétrolier au large du Venezuela, un grand pétrolier, très grand, le plus grand jamais saisi, en fait", a-t-il affirmé depuis la Maison-Blanche à des journalistes. Une escalade assumée, dénoncée aussitôt par Caracas comme un "acte de piraterie internationale".

La saisie autorisée par un juge fédéral

Selon Pam Bondi, qui a indiqué que l’opération avait notamment été menée par le FBI avec le soutien du ministère de la Défense, le navire intercepté en eaux internationales transportait du pétrole soumis à des sanctions en provenance du Venezuela et de l’Iran. En 2022, le Skipper avait été sanctionné par le Trésor américain pour des liens présumés avec le Corps des gardiens de la révolution islamique iranien et le Hezbollah. "Il a été saisi pour de très bonnes raisons", a déclaré de son côté Donald Trump, sans donner de détails sur le navire, son propriétaire ou sa destination, mais précisant que les États-Unis comptaient garder la cargaison.

Si la saisie d’un bateau est assez inhabituelle, un juge fédéral avait bien autorisé cet acte, sous prétexte de liens présumés avec des groupes terroristes soutenus par Téhéran. L’opération, appuyée par les forces navales déployées dans les Caraïbes, est donc officiellement légale. Mais le choix de la mise en scène, la vidéo diffusée par Pam Bondi, et la déclaration triomphale de Donald Trump ne laissent guère de doute sur la portée politique de cet acte.

Today, the Federal Bureau of Investigation, Homeland Security Investigations, and the United States Coast Guard, with support from the Department of War, executed a seizure warrant for a crude oil tanker used to transport sanctioned oil from Venezuela and Iran. For multiple… pic.twitter.com/dNr0oAGl5x

— Attorney General Pamela Bondi (@AGPamBondi) December 10, 2025

Deux responsables du Pentagone, consultés par le Wall Street Journal, ont souligné que cette saisie constituait un signal adressé aux autres pétroliers qui attendent de charger du pétrole brut vénézuélien. Les données de suivi maritime indiquent qu’une douzaine d’entre eux patientent au large, tandis que d’autres ont décidé de couper leurs transpondeurs pour éviter d’être détectés, d’après le média américain.

Caracas, de son côté, voit dans cette interception la preuve de la véritable motivation américaine. "Il ne s’agit pas de migration, de drogue, de démocratie ou de droits de l’homme", proteste le gouvernement. "Il s’agit de nos richesses naturelles." Le ministère des Affaires étrangères dénonce un "vol éhonté" et un acte "criminel" destiné à s’emparer du pétrole vénézuélien "sans verser la moindre contrepartie".

"Ce sont des assassins, des voleurs, des pirates. Comment s’appelle ce film, 'Pirates des Caraïbes' ? Eh bien, Jack Sparrow est un héros, ceux-là sont des criminels des mers, des flibustiers, ils ont toujours agi ainsi", a renchéri à la télévision Diosdado Cabello, le ministre vénézuélien de l’Intérieur. Une affirmation réfutée par Pam Bondi qui a déclaré que la saisie du navire avait eu lieu "en toute sécurité".

Plus de 20 bateaux attaqués ces derniers mois

Le timing n’est pas anodin. Quelques heures avant l’arraisonnement, les États-Unis avaient exfiltré clandestinement la figure de l’opposition Maria Corina Machado à bord d’un bateau. Une opération clandestine qui a immédiatement ravivé les soupçons d’un durcissement américain à l’égard de Nicolas Maduro.

La saisie du pétrolier s’ajoute à une série de frappes menées ces derniers mois contre plus de vingt bateaux dans les Caraïbes et le Pacifique, que Washington présente comme des opérations contre des trafiquants de drogue. Mais ces actions, qui ont fait 87 morts, sont de plus en plus critiquées. Certains élus démocrates et défenseurs des droits humains évoquent des violations du droit international, voire un "crime de guerre" après une double frappe le 2 septembre, pour achever les survivants d’un premier bombardement. Le Venezuela n’étant pas une voie majeure de fentanyl vers les États-Unis, les justifications avancées par l’administration peinent à convaincre ses opposants.

© AFP

Capture d'écran d'une vidéo publiée par la procureure générale américaine Pam Bondi sur son compte X le 10 décembre 2025.

Ukraine : Washington veut que Kiev se retire de la région de Donetsk, selon Volodymyr Zelensky

11 décembre 2025 à 20:07

Après une journée marquée par une nouvelle attaque revendiquée par Kiev contre un pétrolier de la "flotte fantôme" russe en mer Noire et par les commentaires du Kremlin saluant les récentes déclarations de Donald Trump sur l’Ukraine, la pression diplomatique ne cesse de monter. Alors que l’aide militaire occidentale a atteint son plus bas niveau depuis 2022, les Européens tentent de resserrer les rangs avant la réunion de la "coalition des volontaires", prévue ce jeudi après-midi, censée avancer sur les garanties de sécurité à offrir à Kiev.

Les discussions achoppent toujours sur la question des territoires de l’Est de l’Ukraine. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré ce jeudi que les Etats-Unis continuaient de demander d’importantes concessions de la part de son pays, dont le retrait de ses troupes de la région de Donesk. Les Etats-Unis voudraient y créer une "zone économique libre" ou "démilitarisée", selon le président ukrainien.

Les infos à retenir

⇒ Washington propose la création d’une "zone économique libre" et démilitarisée dans l’est de l’Ukraine, selon Volodymyr Zelensky

⇒ 287 drones ukrainiens ont été abattus dans la nuit, selon la Russie

⇒ Le contrôle de la région de Donetsk et de la centrale de Zaporijjia sont des questions "clés" encore "irrésolues", selon Volodymyr Zelensky

Donald Trump "extrêmement frustré" par Kiev et Moscou

Le président américain Donald Trump est "extrêmement frustré" par l'Ukraine et la Russie, a indiqué jeudi la porte-parole de la Maison-Blanche, soulignant qu'il veut à présent "des actes" pour mettre fin à la guerre.

"Le président est extrêmement frustré par les deux camps impliqués dans cette guerre, et il en a assez des réunions qui n'ont d'autre but que de se réunir", a déclaré à la presse Karoline Leavitt, ajoutant qu'il "veut des actes".

Un militaire tué et quatre personnes blessées dans une explosion à Kiev

Au moins un membre de la garde nationale ukrainienne a été tué et quatre autres personnes blessées, dont deux policiers, dans l’explosion de deux engins piégés ce jeudi à Kiev, la capitale de l’Ukraine, a indiqué le parquet de la ville.

"La première explosion est survenue lorsque deux membres de la garde nationale patrouillaient" dans un quartier oriental de Kiev, a indiqué le parquet. La deuxième a retenti quand la police et des secouristes étaient déjà sur place, a-t-il ajouté.

Ailleurs sur le terrain, l’armée russe a revendiqué la capture de la ville de Siversk, dans la région de Donetsk, l’un des derniers verrous qui l’empêchait d’approcher les grandes cités régionales de Kramatorsk et de Sloviansk, à une trentaine de kilomètres plus à l’ouest.

Washington propose la création d’une "zone économique libre" et démilitarisée, selon Volodymyr Zelensky

Le président Volodymyr Zelensky a affirmé que les Etats-Unis proposaient le retrait de l’armée ukrainienne des territoires qu’elle contrôle encore dans la région orientale de Donetsk et la création d’une "zone économique libre" et démilitarisé à la place.

"Ils (les Américains) voient les forces ukrainiennes se retirer du territoire de la région de Donetsk, et le compromis supposé est que les forces russes ne pénètrent pas dans cette partie" de la région actuellement sous contrôle de Kiev, a-t-il déclaré aux journalistes. "Qui gouvernerait ce territoire, qu’ils (les Américains) appellent déjà’zone économique libre’ou’zone démilitarisée', ils l’ignorent", a-t-il ajouté, affirmant que Washington proposait également un retrait des troupes russes présentes dans les régions ukrainiennes de Soumy, Kharkiv et Dnipropetrovsk (nord, nord-est et centre-est), mais leur maintien dans celles de Kherson et Zaporijjia (sud).

Today, we have had a constructive and in-depth discussion with the American team on one of the three documents we are currently working on – the one on security guarantees. The U.S. was represented by Secretary Marco Rubio @SecRubio, Secretary Pete Hegseth @SecWar, @SteveWitkoff,… pic.twitter.com/gztUJHBOqn

— Volodymyr Zelenskyy / Володимир Зеленський (@ZelenskyyUa) December 11, 2025

Le président ukrainien a par ailleurs indiqué sur X avoir eu une "discussion constructive" avec de hauts responsables de l’administration de Donald Trump sur les garanties de sécurité que l’Ukraine demande de la part de ses alliés occidentaux face à Moscou. Elles doivent "éviter une nouvelle invasion" russe, et prévoir des "réponses concrètes" de la part des alliés de l’Ukraine, selon le président ukrainien.

Le contrôle de la région de Donetsk et de la centrale de Zaporijjia, des questions "clés" encore "irrésolues", affirme Volodymyr Zelensky

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé jeudi que le contrôle de la région orientale de Donetsk et le statut de la centrale nucléaire de Zaporijjia étaient les deux principaux points qui restaient "irrésolus" dans les négociations pour mettre fin à la guerre avec la Russie.

"Les territoires de la région de Donetsk et tout ce qui s’y rapporte, ainsi que la centrale nucléaire de Zaporijjia. Ce sont les deux sujets que nous continuons de discuter" avec Washington. Et tout compromis entre l’Ukraine et la Russie sur le contrôle des régions orientales devra être "juste" et validé soit par une "élection", soit par un "référendum" en Ukraine, a-t-il insisté.

"Je crois que le peuple ukrainien répondra à cette question. Que ce soit par des élections ou par un référendum, il doit y avoir une position émanant du peuple ukrainien", a déclaré Volodylyr Zelensky à des journalistes, dont ceux de l’AFP.

Une proposition sur des concessions territoriales ukrainiennes a été soumise à Donald Trump, dit Friedrich Merz

Une proposition concernant des concessions territoriales ukrainiennes dans le cadre d’un plan pour mettre fin à la guerre en Ukraine a été soumise mercredi au président américain Donald Trump, a annoncé jeudi le chancelier allemand Friedrich Merz.

"Il existe une proposition dont (Donald Trump) n’avait pas encore connaissance au moment où nous nous sommes entretenus au téléphone (mercredi), car elle n’avait pas encore été transmise aux Américains. Nous l’avons fait hier en fin d’après-midi. Il s’agit avant tout de (savoir) quelles concessions territoriales l’Ukraine est prête à faire", a déclaré Friedrich Merz lors d’une conférence de presse à Berlin avec le secrétaire général de l’Otan, Mark Rutte. Le chancelier n’a pas apporté de précisions, relevant que c’est "au président ukrainien et au peuple ukrainien" de répondre à cette question.

Selon de hauts responsables ukrainiens interrogés par l’AFP mercredi, l’Ukraine a envoyé à Washington une nouvelle version du plan de sortie du conflit. Cette version "tient compte de la vision ukrainienne, c’est une proposition plus poussée pour une solution adéquate à des questions problématiques", a indiqué l’un d’eux. "Nous ne divulguons pas les détails en attendant la réaction de la partie américaine", a ajouté ce responsable. La proposition américaine initiale prévoyait notamment de céder à la Russie des territoires ukrainiens qu’elle n’a pas encore conquis, et a été jugée par Kiev et ses alliés européens comme particulièrement favorable à Moscou.

Pétrole : les revenus d’exportation de la Russie tombent à leur plus bas niveau depuis la pandémie de Covid

Les revenus d’exportations de pétrole et de produits pétroliers de la Russie ont atteint en novembre "leur plus bas niveau" depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, et même depuis la crise de la pandémie de Covid-19, a indiqué l’Agence internationale de l’énergie dans un rapport mensuel.

"La baisse des volumes exportés, conjuguée à des prix plus faibles, a réduit les revenus à 11 milliards de dollars, soit 3,6 milliards de dollars de moins en glissement annuel et 11,4 milliards de dollars en dessous de la moyenne du premier semestre 2022 suivant l’invasion de l’Ukraine", indique l’AIE.

La Russie dit avoir abattu dans la nuit 287 drones ukrainiens

La Russie a indiqué ce jeudi avoir abattu dans la nuit 287 drones ukrainiens, soit l’une des attaques les plus massives de l’armée de Kiev en bientôt quatre ans d’offensive russe. Sur ces drones "interceptés et abattus" par la défense anti-aérienne russe, 32 se dirigeaient vers Moscou, a précisé le ministère russe de la Défense dans un communiqué sur Telegram.

En raison des attaques de drones visant la capitale russe, rarement prise pour cible, des restrictions temporaires ont été mises en place dans les quatre aéroports moscovites - Cheremetievo, Domodedovo, Vnoukovo et Joukovski -, selon l’Agence fédérale du transport aérien Rosaviatsia. Des dizaines de vols y ont été annulés, reportés ou redirigés vers d’autres aéroports, selon les agences de presse russes.

© Hans Lucas via AFP

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, le 3 septembre 2025 à Paris.
Reçu avant avant-hier L'Express

Tentative de putsch au Bénin : comment la France a aidé à déjouer le coup d’Etat

10 décembre 2025 à 19:25

Dimanche matin, huit militaires apparaissent à la télévision béninoise pour annoncer la destitution du président Patrice Talon. Sur le terrain, la situation est pourtant loin d’être sous contrôle pour les mutins. L’armée béninoise, et en particulier la garde républicaine, engage une riposte immédiate. Le chef de cette unité, le colonel Dieudonné Djimon Tévoédjrè, dirige personnellement les opérations. Selon lui, environ une centaine de putschistes, équipés de moyens importants dont des véhicules blindés, ont tenté de prendre le pouvoir en misant sur l’effet de surprise.

Cette stratégie échoue rapidement. Les mutins ne parviennent pas à rallier d’autres unités de l’armée, tandis que la garde républicaine reçoit au contraire le soutien spontané de forces venues d’autres corps. Tout au long de la journée de dimanche, l’armée reprend le contrôle de zones et de points stratégiques de la capitale économique. Les affrontements font plusieurs victimes, sans qu’un bilan précis ne soit communiqué. Repoussés après de violents combats, les mutins se replient en fin de journée dans le camp militaire de Togbin, situé dans une zone résidentielle, faisant craindre de possibles dégâts collatéraux. Dimanche soir, le président Patrice Talon annonce que la situation est "totalement sous contrôle".

Surveillance, observation et soutien logistique

C’est à ce stade que l’aide extérieure est devenue déterminante. Le Nigeria est intervenu militairement en menant des frappes aériennes sur le camp de Togbin, avant de déployer des troupes au sol qui ont participé à la reprise de la base dans la nuit de dimanche à lundi.

La France a également apporté un soutien, confirmé mardi par l’Elysée. Paris a indiqué avoir appuyé les forces béninoises "en termes de surveillance, d’observation et de soutien logistique", à la demande de Cotonou et en coordination avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Selon le colonel Tévoédjrè interviewé par l’AFP, des forces spéciales françaises ont été envoyées depuis Abidjan pour des opérations de ratissage, une fois que l’armée béninoise avait repris l’essentiel du contrôle. L’état-major français n’a pas souhaité commenter ces déploiements.

Une douzaine de militaires arrêtés

Sur le plan diplomatique, Emmanuel Macron a mené un "travail de coordination" et "d’échange d’informations avec les pays de la région", d’après l’Elysée. Il s’est entretenu avec son homologue béninois, ainsi qu’avec les présidents du Nigeria et de la Sierra Leone, ce dernier assurant la présidence de la Cedeao. L’organisation régionale a annoncé dès dimanche soir l’envoi de renforts militaires de plusieurs pays pour préserver l’ordre constitutionnel, dans une Afrique de l’Ouest fragilisée par la multiplication des coups d’Etat et par la menace djihadiste.

Au moins une douzaine de militaires ont été arrêtés à la suite de la tentative de putsch, tandis que certains responsables, dont le chef présumé des mutins, le lieutenant-colonel Pascal Tigri, sont toujours en fuite. Deux hauts gradés, brièvement pris en otage, ont été libérés. Patrice Talon, au pouvoir depuis 2016, doit céder la présidence en avril prochain, après deux mandats, à l’issue d’un scrutin déjà marqué par de fortes tensions et des accusations de manque d’inclusivité.

© afp.com/HANDOUT

Capture d'image diffusée par Bénin TV, le 7 décembre 2025, montrant des militaires apparaissant à la télévision d'État à Cotonou, après une tentative de coup d'État présumée au Bénin

"Donald Trump ou la peur désorientée d’un homme blanc vieillissant" : sa croisade anti-Europe vue de l’étranger

10 décembre 2025 à 18:20

C’est une nouvelle escalade dans l’offensive médiatique menée par Donald Trump contre le Vieux Continent. Dans une interview accordée à Politico le 8 décembre, le 47e président des Etats-Unis ne manque pas d’imagination pour déverser son mépris de l’Europe. Des pays "en décrépitude" dirigés par des "faibles", a-t-il éructé. Quant à la guerre en Ukraine ? "La Russie a l’avantage" et Volodymyr Zelensky "va devoir se bouger et commencer à accepter les choses […] Parce qu’il est en train de perdre".

Et cette charge frontale n’est que la dernière en date d’une longue série. Quelques jours auparavant, Washington dévoilait sa nouvelle "stratégie de sécurité nationale", un document d’une rare brutalité. Critique de la politique "d’immigration", des "personnels politiques" et des "dépenses militaires", soutien aux "partis politiques patriotes européens"… ici aussi, l’Europe en prend pour son grade. Un rapport accueilli plus que chaleureusement par le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, qui a applaudi un développement "conforme à notre vision".

Une crise profonde

Une crise d’ampleur s’annonce entre les Etats-Unis et l’Europe, et elle pourrait bien se révéler la pire de notre histoire commune. Le titre britannique The Guardian perçoit un risque d’entaille "profonde pour l’atlantisme, la doctrine de sécurité qui a soutenu la paix et la démocratie en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale". Et le quotidien d’ajouter : Donald Trump "a désormais adopté une vision plus alarmante".

Une analyse partagée par le New York Times, qui définit ce rapport comme une copie "tamponnée par le président, dénigrant ouvertement l’alliance transatlantique".

Car si le président des Etats-Unis n'est pas avare de réprimandes, les dirigeants européens, eux, ne haussent pas le ton. Plus que tempérée, Kaja Kallas, cheffe de la diplomatie européenne, s’est contentée de réitérer que les Etats-Unis demeurent "le plus grand allié de l’Union européenne", en guise de réponse au rapport de la Maison-Blanche. Un calme olympien qui fait penser au New York Times que les leaders européens se sont "habitués aux caprices de Donald Trump".

Un accès de colère favorable à la Russie

En s’en prenant ouvertement à l’Europe, Washington joue le jeu de Vladimir Poutine. Pour le média américain CNN, la nouvelle stratégie de sécurité nationale, "donne à Moscou davantage de cartouches dans une guerre de l’information visant à influencer l’opinion publique aux Etats-Unis et en Europe". Car l’objectif de Moscou est affiché : affaiblir l’UE, ou du moins lui en donner l’air. Un exercice parfaitement exécuté par Donald Trump qui, en traitant l’Europe de faible, "expose les divergences entre Washington et l’Europe" et "aide Poutine […] tout en niant que cela soit de sa faute", analyse le New York Times.

Quant au soutien exprimé aux partis "patriotes", le quotidien belge Le Soir s’alarme de voir naître "un axe Washington-Paris-Moscou, passant par Budapest, qui ne ferait plus qu’une bouchée de l’Union européenne", et ce à une "échéance proche". Une question demeure alors : "Qui pour élaborer et qui pour porter cette réponse économique et militaire européenne forte, solidaire et coordonnée ?"

Pourquoi tant de "haine" ?

D’où vient cette hostilité à l’égard de l’Europe ? Pour de nombreux journalistes, cet esclandre n’est pas sans rappeler les précédents de l’administration Trump, particulièrement de son vice-président. "Et donc non, le discours choc prononcé en février à Munich […] par J.D. Vance n’était pas une sortie de route", plaide Le Soir. L’hiver dernier, le numéro deux des Etats-Unis alertait sur le supposé "déclin économique" du continent, et son "effacement civilisationnel". Selon les experts sondés par le journal belge, il faudrait ici voir un "mouvement de fond, organisé, qui veut nourrir et soutenir la subversion en Europe".

Mais quant aux attaques sur le supposé déclin de notre civilisation, le Financial Times ironise : "le wokisme ce n’était pas notre idée les gars". Derrière le ton humoristique, un fait implacable : cette vision progressiste du monde s’est créée aux Etats-Unis. Alors pourquoi le reprocher et pourquoi cette "haine" envers l’Europe ? Selon le titre britannique, "peut-être qu’après avoir perdu tant de batailles culturelles chez soi, il est plus facile pour l’ego de chercher à l’étranger des sociétés à sauver. L’offensive contre l’Europe est un reproche déguisé qu’il s’adresse à lui-même".

Même son de cloche pour The Guardian qui perçoit en l’irruption du président "la peur désorientée d’un homme blanc vieillissant".

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Le président américain Donald Trump à la Maison-Blanche le 8 décembre 2025.

L’Australie interdit les réseaux sociaux aux moins de 16 ans : tout comprendre à cette première mondiale

10 décembre 2025 à 13:19

C’est une première mondiale. Depuis ce mercredi matin en Australie, les jeunes âgés de moins de 16 ans sont officiellement interdits d’accès à de nombreux réseaux sociaux. Objectif : les protéger du harcèlement ainsi que d’algorithmes qui, selon les autorités australiennes, les exposent à des contenus violents et sexuels. Une mesure saluée par de nombreux parents australiens, mais qui laisse sceptique bon nombre d’adolescents. Retour sur les modalités de cette interdiction.

Comment fonctionne le contrôle de l’âge ?

Seront concernés tous les internautes soupçonnés de ne pas avoir 16 ans. Pour estimer si un internaute est trop jeune ou non, plusieurs plateformes ont annoncé qu’elles recourraient à l’intelligence artificielle et déduiraient l’âge à partir d’un selfie.

Pour des questions de confidentialité des données, les autorités ont toutefois notifié aux plateformes qu’elles n’étaient pas en droit de demander la présentation d’un document d’identité, même en cas de doute sur l’âge des internautes. Les utilisateurs de Snapchat pourront en revanche décider d’eux-mêmes de fournir ces documents s’ils le souhaitent ou prouver leur âge en montrant qu’ils possèdent un compte en banque australien.

Quelles plateformes sont concernées ?

Les géants Facebook, Instagram, YouTube, TikTok, Snapchat ou encore Reddit ont désormais obligation de bannir les utilisateurs australiens âgés de moins de 16 ans. Les plateformes de streaming Kick et Twitch, ainsi que les réseaux sociaux Threads et X, sont aussi concernés. Sans mesures "raisonnables" prises pour faire respecter la loi, les plateformes concernées risquent des amendes pouvant atteindre une trentaine de millions d’euros en vertu de cette obligation, dont l’application sera scrutée par de nombreux pays.

Pour l’heure, la plateforme de jeux en ligne Roblox, le réseau Pinterest ou encore la messagerie WhatsApp sont épargnés par le dispositif. Mais cette liste pourra évoluer, a averti le gouvernement. Les applications Lemon8 et yope, qui ne sont pas concernées par l’interdiction non plus à ce stade, ont grimpé en flèche dans les classements des téléchargements en Australie.

Qu’en disent les réseaux sociaux ciblés ?

Meta, YouTube et d’autres géants de la tech ont condamné l’interdiction. Tous ont cependant accepté de s’y plier, à l’instar de Meta (Facebook, Instagram, Threads) qui a annoncé dès jeudi dernier avoir commencé à supprimer les comptes des utilisateurs concernés. "Nous respecterons nos obligations légales, mais nous restons préoccupés par le fait que cette loi affaiblira la sécurité des adolescents", a affirmé Meta mercredi dans un communiqué.

Selon l’entreprise, de nombreuses applications n’offrent pas les mêmes fonctionnalités de sécurité que les siennes, comme les comptes dédiés aux adolescents. "Nous avons constamment fait part de nos inquiétudes quant au fait que cette loi mal conçue pourrait pousser les adolescents vers des plateformes ou des applications moins réglementées. Nous voyons maintenant ces inquiétudes devenir réalité", s’est alarmée l’entreprise.

YouTube a pour sa part jugé "précipitée" la loi australienne, estimant qu’elle "ne tiendra pas sa promesse de mettre les enfants plus en sécurité en ligne".

Quels pays pourraient faire de même ?

Le succès ou non de la décision australienne sera scruté de près. La Nouvelle-Zélande voisine mais aussi la Malaisie réfléchissent à des restrictions similaires. En Europe, Emmanuel Macron a déjà fait part de sa volonté de créer une "coalition" avec d’autres chefs d’Etat et de gouvernement pour faire émerger une majorité numérique permettant d’accéder aux réseaux - fixée à 15 ans en France - au niveau européen. La Grèce, l’Espagne, Chypre, la Slovénie et le Danemark se sont déjà inscrits dans le mouvement, selon l’Elysée.

De son côté, le gouvernement australien a reconnu que l’interdiction serait imparfaite à ses débuts et que des adolescents trouveraient sûrement un moyen de continuer à utiliser les plateformes.

© afp.com/Saeed KHAN

L'Australie interdit l'accès aux réseaux sociaux aux jeunes adolescents depuis ce 10 décembre 2025

Les prix baissent-ils "énormément" aux Etats-Unis ? La réalité derrière les déclarations de Donald Trump

10 décembre 2025 à 12:38

Pour un président habitué à tordre les faits afin qu’ils correspondent à ses vues ou à ses envies, il s’agit certainement du défi ultime : celui de l’inflation. Une problématique dont la réalité ne peut échapper même à ses partisans les plus zélés au moment de passer à la caisse du supermarché. Une problématique, également, qui vaut à Donald Trump d’être au plus bas dans les sondages depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier. Selon une enquête de la chaîne conservatrice Fox News réalisé en novembre, environ 61 % des Américains estiment que sa politique a "aggravé la situation économique du pays". Les Américains lui font peut-être payer ses promesses de campagne, qui l’avaient notamment vu affirmer en août 2024 : "Dès le jour où je prêterai serment, je ferai rapidement baisser les prix et nous rendrons l’Amérique à nouveau abordable".

+ 14,2 % pour le bœuf haché cru

C’est pourquoi le milliardaire a décidé de prendre le taureau par les cornes et de redescendre dans l’arène, en l’occurrence celle du complexe hôtelier du Mount Airy Casino, en Pennsylvanie. Il y a discouru mardi 9 décembre pendant près d’une heure et demie devant un slogan placardé en grandes lettres blanches sur fond bleu : Lower Prices/Bigger Paychecks ("Des prix en baisse/Des salaires en hausse"). Il a ainsi affirmé que les prix baissaient "énormément" et prétendu que l’inflation était une "supercherie" inventée par les démocrates. "Les démocrates qui parlent de 'coût de la vie’, c’est comme si Bonnie et Clyde parlaient d’ordre public", a-t-il lancé, avant de revenir à ses thèmes de prédilection, comme l’immigration ou les attaques contre son prédécesseur, Joe Biden.

Le problème avec les prix, c’est qu’il ne suffit pas de dire qu’ils baissent pour qu’ils le fassent réellement. Car tous les chiffres disent le contraire. En septembre, date des dernières données disponibles, l’inflation demeurait à 2,8 %. Les prix moyens des produits alimentaires étaient 1,4 % plus hauts qu’en janvier, avec certains particulièrement touchés : le bœuf haché cru avait grimpé de 14,2 %, les rôtis de bœuf crus de 13,6 %, le café de 15,3 %, les bananes de 7,9 %… Seuls les produits laitiers et les œufs étaient en baisse, ainsi que le prix du gaz et des produits pharmaceutiques, comme le détaille la presse américaine. Mais le coût de l’électricité a bondi de 11 %. Les prix des services de streaming montent également.

Les prix risquent d’exploser dans le domaine de la santé

En cause, la politique d’augmentation des droits de douane menée par Donald Trump depuis janvier, qui a considérablement fait grimper le coût des matières premières et des composants qu’utilisent les usines américaines. Sans compter le manque de visibilité due à ses changements constants sur ces surtaxes, un jour décidées, l’autre suspendues, le suivant rétablies. En cause également, sa politique d’expulsion de travailleurs immigrés qui fournissaient une main-d’œuvre bon marché aux exploitations agricoles américaines.

Certains partisans de Donald Trump interrogés par l’AFP en Pennsylvanie continuent pourtant de croire en des jours meilleurs. "Oui, les prix sont élevés en ce moment… mais les choses doivent empirer avant de s’améliorer, estime ainsi Brianna Shay, 26 ans, administratrice dans l’éducation publique. Il est président depuis moins d’un an. Vous savez, il ne peut pas tout régler en moins d’un an." "Les choses sont un peu difficiles, les gens ont du mal", admet quant à lui Tevin Dix, technicien en climatisation.

Les prix pourraient toutefois continuer de grimper. Notamment dans le domaine de la santé. Les subventions de l’Affordable Care Act (l’ObamaCare) arrivent à expiration, ce qui entraînera un doublement des primes pour de nombreux Américains l’année prochaine. Et si le Congrès ne prolonge pas les crédits d’impôt mis en place pendant la pandémie, les restes à charge des assurés devraient augmenter en moyenne de 114 %. Et ce alors que 2026 sera l’année des midterms, et que les démocrates viennent d’engranger les succès électoraux en surfant sur le thème du pouvoir d’achat.

Pas de quoi inquiéter le locataire de la Maison-Blanche, cependant. Interrogé hier par Politico sur la note qu’il s’attribuerait en matière d’économie, le président a répondu : "A + + + + + + ".

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Le président américain Donald Trump lors d'un meeting sur l'économie devant ses partisans, à Mount Pocono (Pennsylvanie), aux Etats-Unis, le 9 décembre 2025

Limiter la folie dépensière : sage comme un Suisse (épisode 2), par Eric Chol

10 décembre 2025 à 11:30

On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans. 2008-2025 : la France traîne derrière elle dix-sept années de creusement intensif de sa dette, passée de 1 300 à 3 400 milliards d’euros (de 68,1 % à 115 % du PIB) ; dix-sept années à jouer avec les règles de Bruxelles sans jamais les respecter.

Dépenses à gogo, impôts à foison : ce qui caractérise nos finances publiques, c’est d’abord le laxisme avec lequel nos dirigeants successifs les traitent. La France mérite son bonnet d’âne. Les préconisations de bonne gestion s’accumulent, depuis la Cour des comptes jusqu’aux notes de Terra Nova ou de l’Institut Montaigne, mais rien n’y fait. Le gouvernement Lecornu n’échappe pas à la règle, en feignant de croire qu’un retour du déficit public sous la barre des 3 % du PIB est encore possible, alors qu’il n’en sera rien.

Nos élus sont de grands irresponsables

La France n’a jamais été sérieuse en matière de finances publiques, et ce ne sont pas les députés actuels qui nous feront croire l’inverse. Nos compatriotes, qui, courageusement, tentent de suivre la saga du budget 2026 le savent : nos élus sont de grands irresponsables.

Des accros à l’argent public, du RN à LFI en passant par les socialistes. Même ceux issus des formations dites raisonnables ne se montrent guère plus enclins à la vertu budgétaire. Abandonner du jour au lendemain une réforme des retraites indispensable pour rester quelques mois de plus à Matignon : ça fait cher le plat de lentilles !

Nos députés ne sont pas sérieux, et ils le sont d’autant moins qu’en l’absence de majorité, le gouvernement, très vulnérable, n’a que le mot compromis à la bouche, synonyme de nouvelles concessions. Entendre Bercy se féliciter d’une croissance de 0,8 % au lieu de 0,7 % en 2025, ou d’un déficit ramené à 5,3 % du PIB au lieu de 5,4 % projeté a de quoi déclencher une crise de fou rire. A croire qu’on n’est pas sérieux même quand on est à Bercy. Mais qui l’est, alors ?

La sagesse budgétaire existe ailleurs en Europe. Nos voisins ne sont pas spécialement des surdoués ou des maniaques des excédents des comptes publics. Mais ils connaissent les faiblesses d’un personnel politique plus enclin à taper sur la touche des plus que sur celle des moins en matière de dépenses publiques.

C’est pourquoi les Suisses se sont dotés, en 2003, d’un frein à l’endettement, inscrit dans la constitution fédérale. Sage décision : "leur taux d’endettement, qui atteignait les 25 % du PIB en 2002 a été ramené à 17 % en 2024. Ce dispositif, adopté par référendum, oblige les gouvernements, quelque que soit leur couleur politique, à ne pas faire de déficit en période de croissance, et à constituer des réserves utilisables en période de récession. D’autres pays ont suivi, mais cela exige un minimum de consensus politique chez les élus", commente François Facchini, professeur des Universités de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. C’est précisément le genre de garde-fous qui mettrait la France à l’abri des manies dépensières de nos politiques, sans pour autant entamer le pacte démocratique qui régit l’adoption d’un budget.

© afp.com/Fabrice Coffrini

Un drapeau suisse sur les bords du lac de Genève, en 2013

Immigration : ces pays qui appellent à revoir la Convention européenne des droits de l’Homme

10 décembre 2025 à 11:10

Alors que s’ouvre ce mercredi 10 décembre une réunion des ministres de la Justice des pays signataires de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) sur l’immigration et le rôle de la Convention, le Premier ministre britannique et son homologue danoise appellent dans le Guardian à moderniser ce traité et son interprétation. Ils déplorent un texte "d’une autre époque" et appellent à durcir le ton face à l’immigration, pour "répondre aux attentes des citoyens européens" et enrayer ainsi la montée de l’extrême droite.

Cette tribune, co-signée par deux chefs de gouvernement travaillistes ayant fortement durci leur politique migratoire, paraît quelques jours seulement après les dernières sorties de Donald Trump, qui a déploré que l’Europe "se délabre" en ne luttant pas suffisamment contre l’immigration. Selon Keir Starmer et Mette Frederikssen, réformer la CEDH serait le "meilleur moyen de lutter contre les forces de la haine et de la division" sur le Vieux Continent.

Durcissement de la politique migratoire

La Convention européenne des droits de l’Homme est un traité signé par les quarante-six Etats membres du Conseil de l’Europe, qui garantit le respect des libertés fondamentales. Sa bonne application est contrôlée par la Cour européenne des droits de l’homme.

Au Royaume-Uni, la CEDH est vivement critiquée, en particulier par les conservateurs et le parti anti-immigration Reform UK, qui veulent tout simplement en sortir. Mais comme le montre la tribune publiée mardi, les travaillistes ne sont pas en reste : sans vouloir s’en défaire, Keir Starmer est déterminé à réduire son champ d’application en matière de droit d’asile et à stopper les migrations économiques. "Nous protégerons toujours ceux qui fuient la guerre et la terreur, mais le monde a changé et les systèmes d’asile doivent également changer", fait-il valoir dans le Guardian.

Les discussions de cette semaine à Strasbourg devraient notamment porter sur la lutte contre les passeurs, mais aussi aborder certaines questions très controversées, comme la création de "hubs de retour" et l’externalisation de la gestion des demandeurs d’asile hors du Vieux Continent.

Attaques répétées contre la CEDH

Selon la BBC, les États partie au traité ont pour objectif de parvenir à un accord d’ici le printemps, qui fixerait les nouvelles modalités d’application de la Convention européenne des droits de l’homme dans les affaires liées à l’immigration. Si une telle révision était conclue, elle marquerait un changement sans précédent en 75 ans dans la législation européenne.

Inquiets d’une telle évolution, de nombreux juristes tentent de remettre les chiffres au cœur des discussions. "En dix ans, les affaires liées à l’immigration ont représenté moins de 2 % des 420 000 requêtes traitées par la Cour. Sur cette période, plus de 90 % des requêtes ont par ailleurs été rejetées, parce qu’elles étaient irrecevables ou qu’il n’y avait pas de violation", explique au Monde Peggy Ducoulombier, professeure de droit à l’université de Strasbourg.

La tribune publiée hier est loin d’être la première remise en cause de la CEDH : en mai déjà, plusieurs pays, emmenés par le Danemark déjà, et l’Italie de la première ministre postfasciste Giorgia Meloni - auxquels la France n’avait pas souhaité s’associer -, avaient signé une lettre pour appeler à une réinterprétation du texte. Ce courrier, également signé par les dirigeants de l’Autriche, la Belgique, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne et la République tchèque, prenait à partie la Cour européenne des droits de l’homme pour sa jurisprudence qui, selon les auteurs, poserait "trop de limites à la capacité des Etats à décider qui expulser de leur territoire". "Nous croyons que l’évolution de l’interprétation de la Cour a, dans certains cas, limité notre capacité à prendre des décisions politiques dans nos propres démocraties", écrivaient les signataires.

Le Conseil de l’Europe leur avait immédiatement opposé un refus : "Face aux défis complexes de notre époque, notre rôle n’est pas d’affaiblir la Convention mais au contraire de la garder solide et pertinente", avait alors déclaré dans un communiqué le secrétaire général du Conseil de l’Europe, Alain Berset.

© afp.com/FREDERICK FLORIN

Au Royaume-Uni, la CEDH est vivement critiquée, en particulier par les conservateurs et le parti anti-immigration Reform UK, qui veulent en sortir.

Ukraine : les déclarations de Donald Trump sont "conformes" à la vision de Moscou, dit le Kremlin

10 décembre 2025 à 12:43

Mis sous pression par Donald Trump, Volodymyr Zelensky a assuré mardi 9 décembre être "prêt" à organiser une élection présidentielle en Ukraine, à condition que ses alliés puissent garantir la sécurité du scrutin. "Je demande maintenant, je le déclare ouvertement, aux Etats-Unis de m’aider, éventuellement avec les collègues européens, à garantir la sécurité pour la tenue d’élections", a dit le président ukrainien, en réponse à son son homologue américain, qui l’a accusé d'"utiliser la guerre" pour rester au pouvoir. En Italie, où il a rencontré le pape et la Première ministre Giorgia Meloni, Volodymyr Zelensky a également affirmé qu’une version révisée du plan Trump pour mettre fin à la guerre en Ukraine serait remise aux Américains sous peu, évoquant plus tard une transmission ce mercredi.

Les infos à retenir

⇒ Les déclarations de Donald Trump sont "conformes" à la vision de Moscou, dit le Kremlin

⇒ Une nouvelle réunion de la "coalition des volontaires" prévue jeudi

⇒ Volodymyr Zelensky va remettre à Donald Trump une version révisée de son plan de paix

L'Ukraine revendique une nouvelle attaque contre un pétrolier de la "flotte fantôme russe" en mer Noire

L'Ukraine a de nouveau attaqué un pétrolier en mer Noire mercredi selon une source au sein des services de sécurité ukrainiens, affirmant que le navire fait partie de la "flotte fantôme russe". Mercredi, des drones navals "ont frappé en mer Noire le navire pétrolier Dashan, qui appartient à la +flotte fantôme+ de la Russie" et lui ont infligé "des dommages critiques", a indiqué à l'AFP une source au sein du renseignement militaire ukrainien GUR.

Les forces ukrainiennes ont déjà revendiqué en novembre l'attaque de deux autres pétroliers à proximité des côtes turques, provoquant la colère d'Ankara qui a prévenu autant Kiev que Moscou que ces attaques en mer Noire représentent une "escalade inquiétante".

Les récentes déclarations de Donald Trump sur l'Ukraine sont "conformes" à la vision de Moscou, dit le Kremlin

Le Kremlin a salué ce mercredi les dernières déclarations du président américain Donald Trump qui a notamment soutenu, dans un entretien au site Politico, que la Russie avait "toujours eu" l'avantage militaire sur le front en Ukraine. "À bien des égards, concernant une adhésion à l'OTAN, les territoires, concernant le fait que l'Ukraine perd du terrain, c'est conforme à notre compréhension. À bien des égards, le président Trump a abordé les causes profondes du conflit", a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov. Selon lui, cet entretien du dirigeant américain, publié mardi, est "très important".

Donald Trump y soutient que la Russie, car elle est "bien plus grande" et "plus forte" que l'Ukraine, bénéficie d'une position de négociation supérieure dans les pourparlers visant à mettre fin aux combats. "De façon générale, c'est la taille qui l'emporte", a dit Donald Trump, en répétant qu'il ne souhaitait pas que Kiev rejoigne l'Otan, tout en affirmant que l'armée ukrainienne méritait "un immense respect" pour sa résistance.

Une nouvelle réunion de la "coalition des volontaires" prévue jeudi

Une nouvelle réunion de la "coalition des volontaires", qui rassemble des soutiens de Kiev, se tiendra jeudi pour avancer sur les "garanties de sécurité" pour l'Ukraine, a indiqué mercredi la porte-parole du gouvernement français, le président Zelensky étant la cible de vives critiques de Donald Trump.

"La réunion de la coalition des volontaires demain, coprésidée par la France et le Royaume-Uni, permettra d'avancer sur les garanties de sécurité à offrir à l'Ukraine et la contribution importante des Américains", a déclaré la porte-parole Maud Bregeon. L’Élysée a ensuite précisé que cette réunion aurait lieu jeudi après-midi en visioconférence.

Les dirigeants français, allemand et britannique ont affiché lundi à Londres leur solidarité avec Volodymyr Zelensky, fragilisé par un scandale de corruption et les piques lancées par Donald Trump. Ils ont aussi travaillé sur la contre-proposition à un plan américain pour l'Ukraine présenté en novembre, vu comme très favorable à la Russie et que Kiev et ses alliés européens tentent de tempérer.

L’aide militaire à l’Ukraine au plus bas, selon le Kiel Institute

L’aide militaire à l’Ukraine pourrait atteindre son plus bas niveau en 2025, a prévenu mercredi l’institut de recherche allemand Kiel Institute, les Européens, qui en fournissent désormais l’essentiel, ne parvenant plus à compenser l’arrêt de l’aide américaine.

"D’après les données disponibles jusqu’en octobre, l’Europe n’a pas réussi à maintenir l’élan du premier semestre 2025", note Christoph Trebesch, qui dirige l’équipe du Kiel Institute qui recense l’aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l’Ukraine depuis l’invasion russe du 24 février 2022, cité dans un communiqué.

Avant de se désengager, à l’initiative de Donald Trump de retour à la Maison Blanche en janvier 2025, les Etats-Unis fournissaient plus de la moitié de l’aide militaire. Si les Européens sont dans un premier temps parvenus à compenser, ils ont ensuite flanché depuis le début de l’été, selon le Kiel Institute. "Si ce ralentissement se poursuit dans les mois à venir, 2025 deviendra l’année présentant le moins de nouvelles allocations d’aide pour l’Ukraine" depuis 2022, prévient Christoph Trebesch.

Sur les dix premiers mois de 2025, 32,5 milliards d’euros d’aide militaire ont été alloués à l’Ukraine, essentiellement par l’Europe. En seulement deux mois, les alliés de l’Ukraine devraient allouer plus de 5 milliards d’euros pour égaler la plus faible année (37,6 milliards alloués en 2022) et plus de 9 milliards pour s’inscrire dans la moyenne de 41,6 milliards annuels versés entre 2022 et 2024. Or de juillet à octobre, seulement 2 milliards d’euros ont été alloués en moyenne chaque mois.

Volodymyr Zelensky va remettre à Donald Trump une version révisée de son plan de paix

En visite en Italie, où il a rencontré le pape et la Première ministre Giorgia Meloni, Volodymyr Zelensky a affirmé mardi qu’une version révisée du plan Trump pour mettre fin à la guerre en Ukraine serait prochainement remise aux Américains. "Les volets ukrainien et européen sont désormais plus avancés et nous sommes prêts à les présenter à nos partenaires américains", a écrit sur X le dirigeant, évoquant plus tard devant la presse une transmission ce mercredi.

Il a confirmé que la proposition américaine initiale pour une sortie du conflit avait été divisée en trois documents : un accord-cadre en 20 points, un document sur la question des garanties de sécurité et un autre sur la reconstruction de l’Ukraine après la guerre.

Le plan initial de Washington, considéré comme largement favorable à Moscou, fait l’objet d’intenses discussions depuis plusieurs semaines. Il prévoyait notamment que Kiev cède des territoires à la Russie, en échange de promesses de sécurité jugées insuffisantes par l’Ukraine et ses alliés.

Le pape juge "pas réaliste" de chercher la paix en Ukraine sans l’Europe

Le pape Léon XIV a estimé mardi qu’il n’était "pas réaliste" de chercher à obtenir la paix pour l’Ukraine sans l’Europe et que le plan présenté par Donald Trump risquait d’entraîner un "énorme changement" dans l’Alliance atlantique.

Léon XIV, qui a reçu mardi le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans sa résidence de Castel Gandolfo, a dit aux journalistes n’avoir pas lu les propositions américaines dans leur intégralité. "Malheureusement, certaines des parties que j’ai lues apportent un énorme changement dans ce qui était depuis de nombreuses années une véritable alliance entre l’Europe et les Etats-Unis", a-t-il déclaré. "Les remarques qui sont faites par ailleurs dans des interviews récentes à propos de l’Europe tentent de rompre ce que je pense devoir être une alliance très importante aujourd’hui et à l’avenir", a ajouté le pape américain.

"Chercher un accord de paix sans inclure l’Europe dans les discussions n’est, permettez-moi de le dire, pas réaliste", a-t-il poursuivi. "La guerre est en Europe et je pense que l’Europe doit être partie prenante des garanties dont nous avons besoin pour la sécurité, aujourd’hui comme à l’avenir".

© afp.com/ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Le président américain Donald Trump à Maison-Blanche à Washington, D.C., le 3 décembre 2025.

"Pedro Sanchez est devenu le Viktor Orban du Sud" : l’avertissement d’une leader de l’opposition espagnole

10 décembre 2025 à 07:30

Y a-t-il "quelque chose de pourri" au royaume d’Espagne – comme disait Shakespeare, dans Hamlet, à propos de celui d’Elseneur ? Visiblement, oui. En tout, cas, "quelque chose" cloche "légèrement" au sommet de l’État. L’entourage immédiat, personnel ou politique, du Premier ministre Pedro Sanchez est au cœur de plusieurs affaires de corruption. Un ancien ministre (des Transports, des Mobilités et des Programmes urbains) et son principal conseiller viennent d’entrer en prison. Un haut dirigeant du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) vient d’en sortir. Et le frère du Premier ministre est mis en examen dans une affaire où leur sœur est également entendue par la justice.

Dans ce climat délétère, le Parti populaire (PP, droite) vient d’organiser, le week-end dernier, des manifestations avec ce slogan : "Mafia ou démocratie ?" Figure influente et médiatique de la droite espagnole, l’opposante Cayetana Alvarez de Toledo (PP) a, de son côté, accepté de s’exprimer pour la première fois dans un média français.

Députée de Madrid (PP) élue en 2019 et réélue en 2023, un temps porte-parole adjointe du parti, cette personnalité d’origine française et argentine est aussi une historienne formée à Oxford (Royaume-Uni) doublée d’une ancienne journaliste au quotidien El Mundo où elle écrivait dans les pages Opinions. Bref, cette débatteuse redoutable est une personnalité avec laquelle il faut compter à droite.

Par ailleurs proche de la Vénézuélienne Maria Corina Machado, prix Nobel de la paix 2025, la députée se rend aujourd’hui à Oslo (Norvège) pour accompagner la cérémonie de remise de prix. Soutien inconditionnel de l’opposante vénézuélienne, Cayetana Alvarez de Toledo affirme que le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez suit la pente du populisme déjà empruntée par les Vénézuéliens Hugo Chavez et Nicolas Maduro. Et par Viktor Orban, l’illibéral dirigeant hongrois. Avertissement au lecteur : en Espagne, le débat politique est virulent… comme l’illustre cette interview exclusive.

Cayetana Alvarez de Toledo, députée de Madrid (Espagne) du Parti populaire (PP, droite) dans la capitale espagnole en 2025.
Cayetana Alvarez de Toledo, députée de Madrid (Espagne) du Parti populaire (PP, droite) dans la capitale espagnole en 2025.

L’Express : Pedro Sanchez – et, avec lui la gauche espagnole – se refuse à féliciter la Vénézuélienne Maria Corina Machado pour son prix Nobel de la paix. Que signifie ce silence ?

Cayetana Alvarez de Toledo : C’est simplement la preuve de sa complicité avec Maduro. Qu’un premier ministre espagnol ne félicite pas un récipiendaire latino-américain d’un prix aussi prestigieux est pour le moins suspect. Non seulement Pedro Sanchez se refuse à féliciter Maria Corina Machado mais, de plus, il ment lorsqu’on lui demande pourquoi il ne le fait pas. Il prétend n’avoir jamais félicité aucun prix Nobel par le passé. Des journalistes ont consulté son compte X… et ils ont trouvé au moins six messages de félicitations adressées à différents prix Nobel.

Ses mensonges sont une indication supplémentaire de sa relation étroite avec la dictature vénézuélienne.​​ Songez que lui et son entourage sont incapables de prononcer ces simples mots : "Le Venezuela est une dictature ; Maduro est un dictateur." Nous avons mis au défi les socialistes espagnols de le faire des dizaines de fois à la chambre de députés. Sans résultat. Ce mutisme n’a qu’une explication : ils redoutent la réaction de Maduro au cas où ils le traiteraient de "dictateur". Maduro pourrait se retourner contre eux et révéler des secrets inavouables. C’est très clair à mes yeux : Maduro les tient.

Un portrait du Premier ministre espagnol Pedro Sanchez lors d'une manifestation organisée par le Parti populaire (PP) contre la corruption, le 30 novembre 2025 à Madrid
Un portrait du Premier ministre espagnol Pedro Sanchez lors d'une manifestation organisée par le Parti populaire (PP) contre la corruption, le 30 novembre 2025 à Madrid

Vous allez jusqu’à parler de "complicité" avec la dictature vénézuélienne. N’est-ce pas exagéré ?

Nullement. Mais pour comprendre les liens entre le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et la dictature vénézuélienne, il faut remonter à José Luis Rodríguez Zapatero. L’ex-Premier ministre socialiste espagnol (2004-2011) entretient depuis longtemps une relation étroite avec Maduro. Dans cette affaire, Zapatero joue un rôle clef. Depuis de nombreuses années, il joue le rôle d’agent d’influence pour le Venezuela sur la scène internationale. Il a même servi d’intermédiaire entre le régime et les prisonniers politiques. Il s’est ainsi prêté sans vergogne au chantage qui consiste à s’appuyer sur leur souffrance pour négocier leur sortie de prison et leur silence. C’est d’une grande perversité : il s’agit de se mettre du côté du dictateur pour faire accepter aux prisonniers de conscience une transaction perverse : "Nous te libérons mais, en échange, tu te tais."

Non content de jouer ce rôle, il a aussi été le principal promoteur du "processus de dialogue" bidon [NDLR : qui a duré onze années et échoué, de 2014 à 2025] entre la dictature et les forces démocratiques. Ce processus n’a servi à rien, sinon à gagner du temps et à procurer de l’oxygène à Maduro. De notoriété publique, Zapatero était du côté de Maduro. Par ailleurs, Zapatero joue un rôle méconnu (mais dont des journalistes commencent à parler) de lobbyiste au profit de la dictature de Maduro. Il était la "porte d’entrée" à Caracas pour des entreprises espagnoles désireuses de faire du business au Venezuela, notamment dans le secteur pétrolier. Tout en étant "négociateur" du processus de paix, il faisait des affaires. Soit dit en passant, il joue maintenant ce rôle avec la Chine. Affairiste sans morale, José Luis Rodríguez Zapatero est celui qui a rapproché le PSOE de Maduro.

Le 21 juillet 2016 le président vénézuélien Nicolas Maduro(D) aux côtés de l'ancien chef du gouvernement espagnol Jose Luis Rodriguez Zapatero (G) à Caracas
Le 21 juillet 2016 le président vénézuélien Nicolas Maduro(D) aux côtés de l'ancien chef du gouvernement espagnol Jose Luis Rodriguez Zapatero (G) à Caracas

En quoi Pedro Sanchez est-il comptable des agissements de Zapatero ?

Beaucoup de choses restent à découvrir. Mais si le régime de Maduro tombe, préparez-vous à des révélations. En attendant, voici un exemple. Le 20 janvier 2020, en pleine nuit (à 0 h 01 exactement) la vice-présidente vénézuélienne Delcy Rodriguez a atterri dans un avion privé à l’aéroport madrilène de Barajas alors qu’elle était sous sanctions de l’Union européenne depuis deux ans [NDLR : bras droit de Nicolas Maduro, Delcy Rodriguez et dix autres dirigeants sont sanctionnés en raison de la corruption, des crimes et des actes de tortures pratiqués dans les prisons vénézuéliennes]. Or, qui était là, en pleine nuit, pour accueillir cette personnalité interdite d’entrée sur le territoire de l’UE ? Rien moins que José Luis Abalos, alors numéro 3 du PSOE et ministre des Transports, de la Mobilité et des Travaux Publics. [NDLR : Abalos est emprisonné en Espagne depuis le 25 novembre pour soupçons de corruption et autres délits].

Que se sont dit, cette nuit-là, dans un salon privé de la zone de transit, le bras droit de Sanchez et madame Delcy Rodriguez ? Mystère. Certains soupçonnent des négociations secrètes entre le régime vénézuélien et le gouvernement espagnol. D’autres parlent de financement illégal du PSOE avec des fonds chavistes. D’autres encore évoquent un schéma de corruption sur la base de financements issus du pétrole. Bref, aux affinités idéologiques et à la connivence politique s’ajoute probablement une dimension économique.

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov reçoit la vice-présidente du Venezuela Delcy Rodriguez, le 1er mars 2019 à Moscou
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov reçoit la vice-présidente du Venezuela Delcy Rodriguez, le 1er mars 2019 à Moscou

N’est-ce pas le parti de gauche radical Podemos qui, le premier, a collaboré avec le régime d’Hugo Chavez et Nicolás Maduro ?

Certes, Podemos a été très proche de Chavez [NDLR : des membres du parti espagnol ont travaillé comme conseillers au Venezuela dès le début des années 2000], mais cette formation, qui compte 4 députés, ne pèse plus grand-chose. Aujourd’hui, les socialistes espagnols sont alliés au parti Sumar.

Cette force d’extrême gauche compte 26 députés et 5 ministres, dont certains sont ouvertement pro-chavistes. Pedro Sanchez lui-même a effectué un virage à 180 degrés à propos du Venezuela. Lorsqu’il était dans l’opposition, il était proche de l’opposition vénézuélienne. Mais tout a changé quand il est entré au Palais de La Moncloa, le siège du gouvernement à Madrid. Il a alors cessé de soutenir les forces démocratiques pour devenir le plus grand allié de la dictature vénézuélienne en Europe.

Quelles leçons tirez-vous du "cas" du Venezuela, pays à la dérive ?

C’est un cas d’école qu’il faudrait, dès maintenant, étudier dans des manuels de sciences politiques. Il s’agit d’un processus de subversion de la démocratie par l’intérieur, non pas à l’aide d’un Cheval de Troie (le cheval a une certaine noblesse) mais d’un "Âne de Trois" (l’âne est un symbole de la bêtise). Ses promoteurs s’appuient en effet sur l’ignorance des honnêtes gens pour atteindre leurs objectifs. Ainsi "l’Âne de Troie" arrive au pouvoir par la voie démocratique, à l’occasion d’élections libres. Mais dès qu’il a conquis le pouvoir, il cherche à s’y perpétuer par tous les moyens, toujours selon le même mode d’emploi. C’est vrai au Venezuela, mais aussi en Espagne.

Dans une première phase, les aspirants à la dictature colonisent les institutions de l’État en y plaçant partout des personnes loyales – non pas loyales à l’État, mais à leur parti. Au Venezuela, c’est évident : les chavistes ont très vite tout "colonisé", y compris l’entreprise pétrolière nationale PDVSA, ce qui d’ailleurs a conduit à sa ruine. Dans un deuxième temps, ils harcèlent et sapent les trois principaux contre-pouvoirs : la presse libre, la justice indépendante et l’opposition parlementaire.

Enfin, troisièmement, ils polarisent délibérément la vie politique afin de "diviser pour mieux régner". En arrivant à la présidence en 1999, Hugo Chavez a mis en œuvre ce mécanisme : politisation des institutions, élimination progressive des contre-pouvoirs, polarisation de la société. Ainsi a commencé la mutation du Venezuela, passé de "démocratie pleine et entière" à "démocratie faillie" puis à "dictature" et maintenant à "narco-État criminel".

Selon vous, l’Espagne suit la même pente que le Venezuela. Qu’entendez-vous par-là ?

En Espagne, nous vivons la première étape de ce processus. Nous sommes en train de passer de démocratie "pleine et entière" à démocratie "faillie". Pedro Sanchez est arrivé au pouvoir par les urnes mais il s’emploie à "coloniser" les institutions (par exemple le Tribunal Constitutionnel, la Cour des comptes ou l’audiovisuel public), à fragiliser et démolir les contre-pouvoirs démocratiques et à polariser la société. Aux élections de juillet 2023, le PSOE est arrivé en deuxième position derrière le Parti populaire (PP, droite).

Pour conserver le pouvoir, il n’a pas hésité une seconde à pactiser avec des partis qui visent la destruction du système constitutionnel espagnol : Euskal Herria Bildu (héritier du mouvement terroriste ETA qui ne condamne pas l’assassinat de plus de 850 Espagnols) ou Gauche républicaine de Catalogne. Pedro Sanchez a aussi négocié avec un fugitif de la justice, Carles Puigdemont. Pour mémoire, ce leader du parti catalan Junts per Catalunya avait tenté un coup d’État en Catalogne en 2017 et se trouve actuellement en Belgique, où il réside, sans possibilité de remettre les pieds en Espagne.

Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez s'exprime lors d'une session plénière au Parlement espagnol à Madrid, le 9 juillet 2025
Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez s'exprime lors d'une session plénière au Parlement espagnol à Madrid, le 9 juillet 2025

Sans vergogne, le Premier ministre lui a proposé de faire passer une loi d’amnistie en échange de ses 7 voix à la chambre de députés : les élus de Junts per Catalunya lui ont permis d’être réinvesti à la tête du gouvernement espagnol. Une telle négociation, avec un fugitif, n’a pas de précédent dans l’UE. Bien sûr, il existe des amnisties politiques, économiques, fiscales. Mais ce qui est unique ici, c’est qu’un politicien efface les délits d’un autre politicien en échange du pouvoir. Heureusement, le Tribunal Suprême s’est en partie opposé à cette amnistie. Et Puigdemont, réfugié en Belgique, ne peut toujours pas rentrer en Espagne.

Comment analysez-vous les scandales de corruption qui touchent l’entourage immédiat de Pedro Sanchez ?

En avril 2024, la presse a commencé à publier des informations et à enquêter sur des affaires qui concernent l’épouse de Pedro Sanchez ainsi que son frère (tous deux soupçonnés de trafic d’influence), mais aussi son bras droit José Luis Abalos (celui qui avait rencontré nuitamment la vice-présidente vénézuélienne à l’aéroport de Madrid) et Koldo García Izaguirre, son plus proche collaborateur et confident, lui aussi accusé de corruption. A l’époque, Pedro Sanchez annonce qu’il se retire cinq jours pour réfléchir à son avenir. Il se présente comme une victime et affirme qu’il envisage d’abandonner la politique. Mais après cinq jours, il entame une campagne de déstabilisation des contre-pouvoirs.

Il traite tout le monde de "facho"

Cayetana Alvarez de Toledo

Hyperagressif, il attaque les médias en les qualifiant de "marchands de mensonges", de "machines de boue", de "laquais du PP et de Vox" [NDLR : Vox est le parti d’extrême droite], de "propagateurs de fake news", de suppôts de la fachosphère", de "fascistes", de "fachos", d'"ultradroitiers", etc. Il cherche aussi à contrôler l’organe qui a autorité sur la télévision publique [NDLR : l’équivalent de l’Arcom française]. La télé nationale se transforme d’ailleurs en organe de propagande pro-Sanchez : servile à l’égard du gouvernement, agressif contre l’opposition. Un peu comme en Hongrie, où Viktor Orban a mis les médias sous sa coupe.

La vie politique en Espagne est de plus en plus polarisée…

Pedro Sanchez s’en prend aussi à la justice. Lui et ses ministres livrent en pâture les noms et prénoms des juges qui enquêtent sur sa famille. Ils dénigrent les tribunaux qui prennent des décisions contraires aux intérêts du Premier ministre. Pedro Sanchez emploie une rhétorique populiste, purement chaviste : il insinue que la vox populi est au-dessus du pouvoir judiciaire, comme s’il y pouvait avoir une démocratie sans loi, ni juges garants d’un contre-pouvoir…

Cette escalade verbale prend des proportions dangereuses. D’autant que Pedro Sanchez politise la justice : il a nommé successivement au poste de "fiscal general" [NDLR : procureur général de l’État espagnol] deux personnalités qui lui sont proches alors que selon la tradition et l’esprit de justice, le titulaire du poste doit être incontestable, impartial et indépendant. Le premier a été condamné par la justice pour avoir divulgué des secrets visant à nuire à une adversaire politique de Sanchez. L’intéressé est resté en fonction pendant toute la durée du procès : il refusait de démissionner tandis que le gouvernement le soutenait ouvertement. Encore un exemple du dévoiement des institutions…

Pedro Sanchez affirme que les accusations contre son entourage ont été lancées par des associations d’extrême droite, notamment Manos Limpias.

C’est son unique ligne de défense… Mais Manos Limpias n’est pas la seule entité à avoir déposé une plainte. Une association d’avocats madrilènes a également entamé une action en justice. Et il y a d’autres exemples. Mais, même si Manos Limpias – avec qui mon parti, le PP, n’a aucun lien – avait été seul à la manœuvre, cela n’absoudrait en rien le Premier ministre. Ce n’est pas "l’ultradroite" qui enquête sur l’entourage de Pedro Sanchez et réclame vingt-cinq ans de prison pour ses deux plus proches collaborateurs. Ce sont la police, la Guardia Civil [NDLR : équivalent de la Gendarmerie française], des procureurs, des juges… Pedro Sanchez a trouvé un argument commode : il affirme que la Justice et les juges sont sous l’emprise du fascisme. D’ailleurs il traite tout le monde de "facho" : moi, bien sûr, mais aussi l’ancien Premier ministre socialiste Felipe Gonzalez ou des dirigeants historiques du PSOE comme Alfonso Guerra ou Nicolas Redondo Terreros.

Pedro Sanchez crée un climat de guerre civile verbale

Cayetana Alvarez de Toledo

Aujourd’hui, si on ne vous traite pas de "facho", vous n’existez pas ! (rires). Aux yeux des socialistes, quiconque défend la démocratie, la vérité, la raison, le vivre-ensemble, le pluralisme politique, l’ordre constitutionnel, la liberté individuelle, l’égalité devant la loi, est un "facho". Seuls les gens servilement soumis au pouvoir ne le sont pas… Se présenter comme la victime de l’extrême droite permet à Pedro Sanchez deux choses : resserrer les rangs de la gauche espagnole et, à l’échelle européenne, se présenter comme la victime de la vague réactionnaire qui touche beaucoup d’autres pays du Vieux continent. En fait, il cherche à créer un climat de guerre civile verbale et, conformément au mode d’emploi vénézuélien, à polariser le pays.

En France, son image et celle du PSOE restent plutôt bonnes, avec une croissance économique de + 3 % et la récente augmentation du salaire minimum de 61 %. Votre commentaire ?

Les Français, mais aussi tous les Européens, devraient ouvrir les yeux sur la dérive extrêmement dangereuse et antidémocratique qui se produit actuellement en Espagne. Je regarde ce qui se passe en Hongrie et je vous affirme qu’il y a actuellement en Espagne un "Viktor Orban du Sud" qui se nomme Pedro Sanchez. Il se déguise en social-démocrate mais il est tout sauf ça. Au contraire, il détruit la social-démocratie, le vivre-ensemble et, in fine, la démocratie. Sachons reconnaître que les menaces contre la démocratie proviennent parfois de la droite, mais aussi de la gauche.

Voilà dix ans, le premier ministre Mariano Rajoy, du Parti populaire comme vous, avait dû quitter le pouvoir à cause du scandale de la "caisse noire" du PP. En matière de corruption, la gauche et la droite se valent ?

La corruption n’a pas de couleur politique. Qu’elle soit de gauche ou de droite, il faut la combattre. A l’époque de Mariano Rajoy, Pedro Sanchez avait d’ailleurs exigé une motion de censure. Il réclamait la démission du Premier ministre parce qu’il avait été cité comme témoin dans une enquête judiciaire. C’est grâce à cette motion de censure qu’il est arrivé au pouvoir en brandissant l’étendard de la lutte contre la corruption. Aujourd’hui, il est cerné par les affaires de corruption. Tout son entourage, personnel ou politique, fait l’objet d’enquêtes. Au reste, lui-même a déjà été cité deux fois comme témoin par la justice. Il devrait appliquer à sa propre personne ce qu’il exigeait de Rajoy naguère. D’autant que son niveau de corruption dépasse de loin l’affaire de la caisse noire du PP en 2017. Pedro Sanchez abîme l’Espagne à un niveau inédit depuis le retour de la démocratie en 1975, après la mort du dictateur Franco.

Parmi "la bande de la Peugeot" [NDLR : en 2016, Pedro Sanchez était reparti à la conquête du PSOE à travers l’Espagne à bord d’une Peugeot 407, avec trois proches amis : José Luis Ábalos, Santos Cerdán y Koldo García], deux sur quatre sont actuellement emprisonnés dans le cadre dans le cadre d’une enquête pour corruption et un troisième, sous contrôle judiciaire, vient d’être libéré après cinq mois derrière les barreaux. Quant à Pedro Sanchez, s’il est aujourd’hui épargné par les scandales, sa sœur et son frère ne le sont pas. La corruption est devenue une manière de faire de la politique afin de conserver le pouvoir. Sanchez n’a qu’une idée en tête : rester au pouvoir à tout prix. Y compris au prix de l’affaissement de la démocratie.

Notre objectif numéro un: empêcher Pedro Sánchez de rester au pouvoir

Cayetana Alvarez de Toledo

Comment vous positionnez-vous par rapport à Vox, le parti anti-immigration qui a percé en 2023, devenant la troisième force politique du pays avec 12 % des voix?

C’est un parti nationaliste qui s’est rapproché de Viktor Orban bien plus qu’il ne le devrait. L’objectif du Parti populaire – mon parti – est de gouverner seul. Entre Vox et le PP, les différences sont importantes, notamment sur l’Europe. Mais nous savons aussi qu’il existe un danger plus grand pour notre démocratie : c’est Pedro Sánchez. Evidemment, le PP aspire à gouverner seul mais le réalisme, c’est de former des alliances, comme nous l’avons déjà fait localement. Notre objectif numéro un est d’empêcher que Pedro Sánchez reste au pouvoir car ce qui est en jeu, c’est la survie de l’ordre démocratique et constitutionnel établi en 1978. L’objectif de Sanchez, à l’inverse, est que Vox progresse encore pour accentuer la polarisation et affaiblir le PP.

En quels termes la question de l’immigration se pose-t-elle en Espagne ?

Le gouvernement est dans le déni. Il ne veut pas reconnaître qu’il existe un vrai problème d’intégration alors même que, en Europe, de nombreux gouvernements de gauche, comme au Danemark, sont en train de changer de pied sur ce sujet. En Espagne, l’immigration est majoritairement composée de Latino-américains qui s’intègrent d’une manière exceptionnelle. Mais il y a aussi une autre immigration qui, par endroits, pose des problèmes, notamment en Catalogne. Dans cette région, un nouveau parti politique se développe à grande vitesse : c’est Aliança Catalana (Alliance catalane), à la fois ouvertement anti-islam et anti-Espagne. C’est un mouvement séparatiste, indépendantiste et ouvertement islamophobe, encore beaucoup plus à droite que Vox.

© afp.com/Javier SORIANO

Le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, lors de son audition devant une commission d'enquête du Sénat, le 30 octobre 2025 à Madrid

En Ukraine, la Russie accusée de multiplier les exécutions de soldats ayant déposé les armes

9 décembre 2025 à 16:42

Quatre soldats allongés face contre terre, devant une ligne d’arbres calcinés. Un autre qui se place à leurs côtés et les exécute de rafales en pleine tête. Avant de faire de même avec un cinquième qui commençait à ramper, à quelques mètres de là. La scène, glaçante, a été filmée par un drone et diffusée par l’organisation ukrainienne d’analyse militaire Deepstate sur Telegram, le 22 novembre. Selon nos confrères du Temps, elle se serait déroulée près du village de Kotlyne, non loin de Pokrovsk, que les troupes du Kremlin tentent de conquérir depuis des mois et dont Vladimir Poutine a revendiqué la conquête la semaine dernière – Kiev, toutefois, affirme toujours tenir la partie nord de la ville.

La vidéo témoigne d’une recrudescence des exécutions de soldats ukrainiens ayant déposé les armes au cours des derniers mois. "Depuis la mi-novembre, nous avons enregistré une augmentation du nombre de rapports faisant état d’exécutions de militaires ukrainiens capturés par les forces armées russes", explique au Temps Danielle Bell, cheffe de la Mission de surveillance des droits de l’homme des Nations unies en Ukraine (HRMMU).

Crimes de guerre

Deux soldats ukrainiens capturés dans la banlieue de Zatyshshia, dans l’oblast de Zaporijia, auraient été exécutés, selon une autre vidéo de DeepState, publiée le 15 novembre. Le 27, cinq d’entre eux qui venaient d’être faits prisonniers, toujours dans l’oblast de Zaporijia, auraient subi le même sort après avoir été interrogés puis contraints à s’allonger, a indiqué le parquet régional. Un soldat capturé près du village de Hnativka, dans le district de Pokrovsk, aurait également été frappé à la tête avec la crosse d’une mitrailleuse avant d’être abattu. Depuis l’invasion russe en février 2022, la HRMMU a pu "vérifier" l’exécution de 96 prisonniers de guerre ukrainiens et de personnes "hors de combat" par les forces armées russes et juge "crédibles" au moins 119 autres allégations d’exécutions de ce type.

La justice ukrainienne tente de répliquer comme elle le peut. Le 22 novembre, le procureur général de la région de Donetsk a ouvert une enquête pour crimes de guerre à la suite de la vidéo diffusée par Deepstate. Le bureau du procureur général ukrainien a indiqué au Temps avoir, entre le 24 février 2022 et le 2 décembre 2025, suivi 103 procédures pénales relatives au meurtre de 333 militaires de Kiev qui avaient déposé les armes.

Un premier soldat russe vient d'être condamné. Dimitri Kourachov, 27 ans, était accusé d’avoir abattu, le 6 janvier 2024, un soldat ukrainien qui s’était rendu, près du village de Pryioutné, dans l’oblast de Zaporijia. Il avait déclaré à la BBC avoir reçu l’instruction de ses supérieurs de ne faire aucun prisionnier. Reconnu coupable de "violation des lois et coutumes de la guerre" ainsi que "d’homicide volontaire" par un tribunal de Zaporijia, il a été condamné le 6 novembre à la réclusion à perpétuité.

Les organisations internationales tentent de documenter ces exactions, comme l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui a envoyé cette année trois experts sur le terrain. Dans son rapport publié fin septembre, l’OSCE écrit que les exécutions arbitraires, bien que difficiles à démontrer du fait de l’absence de coopération de Moscou, se "produisent régulièrement". Elles concernent aussi les détenus ukrainiens. Au moins 169 d'entre eux auraient trouvé la mort, selon le rapport, qui estime à 6 300 le nombre de soldats ukrainiens toujours en captivité. L’organisation estime que ces pratiques peuvent "constituer des crimes de guerre et, dans certains cas, peut-être des crimes contre l’humanité".

"Exécutez, exécutez et exécutez"

Les exécutions sommaires de militaires désarmés contreviennent au droit international humanitaire, et en particulier aux Conventions de Genève, qui protègent les prisonniers de guerre dès qu’ils déposent les armes et se rendent à l’ennemi ou sont considérés comme "hors de combat". Mais la Russie "refuse systématiquement" aux membres des forces armées ukrainiennes le statut de prisonnier de guerre, poursuit le rapport : son subterfurge consiste à les désigner comme des "personnes détenues pour s’être opposées à l’opération militaire spéciale."

Toujours selon le rapport, les injonctions viennent du plus haut niveau. L’ancien chef d’Etat russe Dmitri Medvedev avait ainsi affirmé sur son canal Telegram : "Pas d’humanité. Pas de pardon. Ils n’ont pas le droit à la vie. Exécutez, exécutez et exécutez." Des enregistrements de conversations radio interceptées puis diffusées par les services de renseignement ukrainiens attestent aussi de ces pratiques. En mai 2025, CNN publiait les ordres d'un commandant russes à ses troupes : "Prenez le commandant en captivité et tuez tous les autres." Un autre enregistrement fin septembre va dans le même sens : "Tirez dessus, on ne fera pas de prisonniers. Partez vite."

Ces pratiques s’inscrivent dans la politique de terreur de Moscou, qui englobe enlèvements d’enfants, tortures de prisonniers, bombardements d’infrastructures énergétiques ou d’habitations depuis bientôt quatre ans, sans relâche.

© afp.com/Sergei GAPON

Tombes de soldats ukrainiens dans un cimetière militaire à Lviv, en Ukraine, le 2 décembre 2025
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