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Reçu aujourd’hui — 11 décembre 2025

Avion de combat du futur : les parties prenantes européennes tentent de sortir de l’impasse

11 décembre 2025 à 15:58

Le projet d’envergure de lancer un avion de combat européen verra-t-il le jour ? L’ambitieux chantier du Scaf (NDLR : système de combat aérien du futur), lancé en 2017 par Emmanuel Macron et Angela Merkel, bat de l’aile. Il s’agit en effet d’un projet commun entre l’Allemagne, la France et l’Espagne, dont l’avionneur Dassault est le maître d’œuvre et dans lequel Airbus est engagé aussi au nom d’industriels allemands et espagnols. Or, les parties prenantes s’écharpent sur la gouvernance.

Les trois pays concernés tentent de sauver les meubles avant la fin de l’année. Est-ce la réunion de la dernière chance ? L’ordre du jour n’a pas été précisé, mais le gouvernement allemand indique sur son site que les ministres de la Défense allemand, Boris Pistorius, et français, Catherine Vautrin, se rencontreront ce jeudi à Berlin. Ils seront ensuite rejoints par leur homologue espagnole, Margarita Robles.

Dassault veut faire cavalier seul

La réunion a lieu alors qu’Airbus et Dassault affichent publiquement leurs désaccords sur la répartition du travail. En septembre dernier, Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation - qui fabrique le Rafale - avait déclaré que son groupe était capable de développer le Scaf "tout seul". Il avait également réclamé une révision de la gouvernance paritaire à trois (avec Allemagne et Espagne) du projet. Le futur Scaf est en effet composé d’un avion, de drones accompagnateurs et d’un "cloud de combat" qui connecte le tout. Selon la chaîne de télévision allemande Tagesschau, le dirigeant de Dassault serait prêt à coopérer avec Airbus sur les drones et le cloud, mais estime avoir les compétences clés pour construire l’avion de combat, en atteste la réussite de son Rafale.

Une vision qui n’a pas plu à Airbus. Le président du comité d’entreprise d’Airbus Defense & Space, Thomas Pretzl, a, à plusieurs reprises - dans les médias ou lors de réunions - abordé l’hypothèse d’un programme Scaf sans la France. Il a d’ailleurs cosigné avec le vice-président du puissant syndicat de l’industrie allemande IG Metall, Jürgen Kerner, une lettre adressée lundi aux ministres allemands de la Défense, Boris Pistorius, et des Finances, Lars Klingbeil. Les deux hommes ont indiqué ne "plus faire confiance à Dassault" sur le programme d’avion de combat européen. L’avionneur français s’est selon eux "complètement disqualifié en tant que partenaire fiable au sein de l’Europe en cette période de menace aiguë". "Dassault n’a jusqu’à présent pas renoncé à exiger la prise en charge intégrale du développement de l’avion de combat", ajoute le courrier d’IG Metall. "Nous aimons travailler avec des entreprises françaises", assure IG Metall, "mais pas avec Dassault".

En réponse, le syndicat patronal des industries métallurgiques (UIMM), présidé par Eric Trappier, a fait part mercredi de son "étonnement" face à la déclaration d’IG Metall, qui souhaite d’après elle "évincer un fleuron technologique français de l’aviation militaire du projet européen d’avion de combat". "Les entreprises de l’industrie française ne sauraient accepter une telle position visant à écarter les intérêts industriels de la France de ce projet stratégique", a-t-elle ajouté.

Un "chemin de croix"

Mercredi également, le patron exécutif d’Airbus reconnaissait les difficultés des parties prenantes à s’entendre. Guillaume Faury, interrogé sur France Inter, a qualifié de "chemin de croix" le processus de construction d’une industrie européenne de défense, notamment à travers le Scaf. Ce dernier doit remplacer les Rafale français et les Eurofighter allemands et espagnols d’ici 2040, dans un contexte de menace croissante de la part de la Russie. Si, selon le dirigeant, le programme "va se faire", il a toutefois regretté le "différent assez significatif avec Dassault "sur la façon de conduire le développement de l’avion".

"Le Scaf, c’est un système de combat dans lequel il y a un avion, des drones, ce qu’on appelle un cloud de combat, un système digital dans lequel l’ensemble des objets sont connectés" a-t-il rappelé. "Quels sont les modes de coopération sur chacun des piliers, ce n’est pas encore acquis", a-t-il dit.

Le plan B de l’Allemagne

L’Allemagne, de son côté, prépare déjà "un plan B, voire un plan C", rapporte la Tagesschau. Airbus pourrait ainsi se concentrer sur le système de drones et de leur connexion via le "cloud de combat".

Par ailleurs, le ministre italien de la Défense, Guido Crosetto, a évoqué début décembre une possible participation de l’Allemagne à un autre programme, le GCAP. Ce dernier cherche à faire voler un avion de combat de nouvelle génération d’ici 2035 et réunit l’Italie, le Japon et le Royaume-Uni. "L’Allemagne pourrait probablement rejoindre ce projet dans le futur", a déclaré le ministre, selon Reuters. Airbus & Defense aurait également envisagé de coopérer avec la Pologne et la Suède, rapporte la Tagesschau. L’administration allemande a quant à elle souligné la nécessité de trouver une solution d’ici la fin de l’année.

© AFP

Avion de combat du futur : les parties prenantes européennes tentent de sortir de l’impasse

11 décembre 2025 à 15:58

Le projet d’envergure de lancer un avion de combat européen verra-t-il le jour ? L’ambitieux chantier du Scaf (NDLR : système de combat aérien du futur), lancé en 2017 par Emmanuel Macron et Angela Merkel, bat de l’aile. Il s’agit en effet d’un projet commun entre l’Allemagne, la France et l’Espagne, dont l’avionneur Dassault est le maître d’œuvre et dans lequel Airbus est engagé aussi au nom d’industriels allemands et espagnols. Or, les parties prenantes s’écharpent sur la gouvernance.

Les trois pays concernés tentent de sauver les meubles avant la fin de l’année. Est-ce la réunion de la dernière chance ? L’ordre du jour n’a pas été précisé, mais le gouvernement allemand indique sur son site que les ministres de la Défense allemand, Boris Pistorius, et français, Catherine Vautrin, se rencontreront ce jeudi à Berlin. Ils seront ensuite rejoints par leur homologue espagnole, Margarita Robles.

Dassault veut faire cavalier seul

La réunion a lieu alors qu’Airbus et Dassault affichent publiquement leurs désaccords sur la répartition du travail. En septembre dernier, Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation - qui fabrique le Rafale - avait déclaré que son groupe était capable de développer le Scaf "tout seul". Il avait également réclamé une révision de la gouvernance paritaire à trois (avec Allemagne et Espagne) du projet. Le futur Scaf est en effet composé d’un avion, de drones accompagnateurs et d’un "cloud de combat" qui connecte le tout. Selon la chaîne de télévision allemande Tagesschau, le dirigeant de Dassault serait prêt à coopérer avec Airbus sur les drones et le cloud, mais estime avoir les compétences clés pour construire l’avion de combat, en atteste la réussite de son Rafale.

Une vision qui n’a pas plu à Airbus. Le président du comité d’entreprise d’Airbus Defense & Space, Thomas Pretzl, a, à plusieurs reprises - dans les médias ou lors de réunions - abordé l’hypothèse d’un programme Scaf sans la France. Il a d’ailleurs cosigné avec le vice-président du puissant syndicat de l’industrie allemande IG Metall, Jürgen Kerner, une lettre adressée lundi aux ministres allemands de la Défense, Boris Pistorius, et des Finances, Lars Klingbeil. Les deux hommes ont indiqué ne "plus faire confiance à Dassault" sur le programme d’avion de combat européen. L’avionneur français s’est selon eux "complètement disqualifié en tant que partenaire fiable au sein de l’Europe en cette période de menace aiguë". "Dassault n’a jusqu’à présent pas renoncé à exiger la prise en charge intégrale du développement de l’avion de combat", ajoute le courrier d’IG Metall. "Nous aimons travailler avec des entreprises françaises", assure IG Metall, "mais pas avec Dassault".

En réponse, le syndicat patronal des industries métallurgiques (UIMM), présidé par Eric Trappier, a fait part mercredi de son "étonnement" face à la déclaration d’IG Metall, qui souhaite d’après elle "évincer un fleuron technologique français de l’aviation militaire du projet européen d’avion de combat". "Les entreprises de l’industrie française ne sauraient accepter une telle position visant à écarter les intérêts industriels de la France de ce projet stratégique", a-t-elle ajouté.

Un "chemin de croix"

Mercredi également, le patron exécutif d’Airbus reconnaissait les difficultés des parties prenantes à s’entendre. Guillaume Faury, interrogé sur France Inter, a qualifié de "chemin de croix" le processus de construction d’une industrie européenne de défense, notamment à travers le Scaf. Ce dernier doit remplacer les Rafale français et les Eurofighter allemands et espagnols d’ici 2040, dans un contexte de menace croissante de la part de la Russie. Si, selon le dirigeant, le programme "va se faire", il a toutefois regretté le "différent assez significatif avec Dassault "sur la façon de conduire le développement de l’avion".

"Le Scaf, c’est un système de combat dans lequel il y a un avion, des drones, ce qu’on appelle un cloud de combat, un système digital dans lequel l’ensemble des objets sont connectés" a-t-il rappelé. "Quels sont les modes de coopération sur chacun des piliers, ce n’est pas encore acquis", a-t-il dit.

Le plan B de l’Allemagne

L’Allemagne, de son côté, prépare déjà "un plan B, voire un plan C", rapporte la Tagesschau. Airbus pourrait ainsi se concentrer sur le système de drones et de leur connexion via le "cloud de combat".

Par ailleurs, le ministre italien de la Défense, Guido Crosetto, a évoqué début décembre une possible participation de l’Allemagne à un autre programme, le GCAP. Ce dernier cherche à faire voler un avion de combat de nouvelle génération d’ici 2035 et réunit l’Italie, le Japon et le Royaume-Uni. "L’Allemagne pourrait probablement rejoindre ce projet dans le futur", a déclaré le ministre, selon Reuters. Airbus & Defense aurait également envisagé de coopérer avec la Pologne et la Suède, rapporte la Tagesschau. L’administration allemande a quant à elle souligné la nécessité de trouver une solution d’ici la fin de l’année.

© AFP

En septembre dernier, Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation avait déclaré que son groupe était capable de développer le Scaf "tout seul".
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