Papa don't preach
Elon Musk a 14 enfants publiquement connus, et « certainement beaucoup plus » selon ses proches. Plongée dans une réflexion tout à fait liée à ses projets entrepreneuriaux.
Elon Musk a 14 enfants connus de 4 mĂšres diffĂ©rentes. La derniĂšre Ă sâĂȘtre fait connaĂźtre publiquement : lâinfluenceuse pro-Trump Ashley St. Clair. En fĂ©vrier, la jeune femme de 26 ans a publiĂ© un message sur X dans lequel elle dĂ©clarait ĂȘtre la mĂšre dâun enfant de 5 mois, conçu avec Elon Musk. Elle expliquait au passage publier cette dĂ©claration pour prendre de vitesse des tabloĂŻds qui sâapprĂȘtaient Ă rĂ©vĂ©ler lâaffaire.
Outre les mĂ©dias Ă lâaffut du scoop, lâautre victime de cette publication semble ĂȘtre Ashley St. Clair elle-mĂȘme. Dans une longue enquĂȘte sur la maniĂšre dont Elon Musk gĂšre ses relations avec les mĂšres de ses multiples enfants, le Wall Street Journal revient en effet sur lâimbroglio judiciaire dans lequel lâinfluenceuse a Ă©tĂ© propulsĂ©e aprĂšs avoir refusĂ© de signer un accord liant confidentialitĂ© et soutien financier.
La reproduction, partie intégrante du projet de Musk
Car dans le parcours de lâhomme le plus riche du monde et actuelle tĂȘte du « ministĂšre de lâefficacitĂ© gouvernementale » (DOGE) des Ătats-Unis, la reproduction est une entreprise Ă part entiĂšre. Proche du courant de pensĂ©e long-termiste, adepte de thĂšses complotistes comme celle du grand remplacement, Elon Musk encourage les personnes de son milieu social Ă se reproduire pour peupler la planĂšte de ce quâil considĂšre ĂȘtre des personnes dâintelligence supĂ©rieure.
Ceci explique les dĂ©bats rĂ©currents en ligne sur le quotient intellectuel (QI) de lâentrepreneur â comme nous le rappelions dans notre article sur les idĂ©ologies TESCREAL, auxquelles appartient le long-termisme, la validitĂ© scientifique de la notion de QI est largement dĂ©battue.
Ouvertement pronataliste, Musk se dĂ©clare en effet inquiet devant les taux de natalitĂ© plus Ă©levĂ©s dans les pays du Sud mondial que dans les pays du Nord. Ă de multiples reprises, il a qualifiĂ© la question de la natalitĂ© de prioritĂ© absolue pour la « survie de lâhumanitĂ© au long-terme », un projet quâil prĂ©voit par ailleurs dâaider en envoyant des fusĂ©es Space X vers la planĂšte Mars, quâil souhaite coloniser (lors dâun meeting politique, il a rĂ©cemment dĂ©clarĂ© la planĂšte comme faisant partie des Ătats-Unis, au mĂ©pris du traitĂ© de lâespace de 1967 interdisant lâappropriation nationale des corps cĂ©lestes).
Musk se rĂ©fĂšre enfin Ă sa progĂ©niture en Ă©voquant une « lĂ©gion », en rĂ©fĂ©rence Ă lâunitĂ© militaire utilisĂ©e pour Ă©voquer les milliers de soldats nĂ©cessaires Ă lâextension de lâEmpire romain. Lors de sa relation avec Ashley St. Clair, Musk a notamment soulignĂ© le besoin « de recourir Ă des mĂšres porteuses » pour avoir des enfants plus rapidement et « atteindre le niveau de la lĂ©gion avant lâapocalypse ».
Rapports financiers
La question de la reproduction occupe Musk au point quâil aborde des utilisatrices de X par message privĂ©, jusquâĂ leur proposer dâavoir des enfants. Dans le cas de lâinfluenceuse crypto Tiffany Fong, la proposition a Ă©tĂ© formulĂ©e aprĂšs plusieurs semaines de discussions en ligne, mais sans que Musk et Fong ne se soient rencontrĂ©s, rapporte le Wall Street Journal.
Vu la position publique et politique dâElon Musk, le procĂ©dĂ© se met en place dans un Ă©vident contexte de rapport de pouvoir. La place quâil occupe sur son propre rĂ©seau social et lâaudience quâil y accumule fait par ailleurs mĂ©caniquement monter lâaudience des internautes avec lesquels il interagit, donc leurs revenus. Tiffany Fong explique ainsi avoir enregistrĂ© une nette hausse de revenus et gagnĂ© 21 000 dollars pendant deux semaines dâinteractions avec Elon Musk.
Lorsque lâentrepreneur lui a proposĂ© de se reproduire, cela lâa obligĂ©e Ă sâinterroger sur les consĂ©quences financiĂšres de son refus. DĂšs que le milliardaire a appris que Tiffany Fong avait demandĂ© lâavis de ses proches, il a arrĂȘtĂ© de suivre la jeune femme et cessĂ© de communiquer avec elle.
Les rapports financiers sâinstallent aussi avec celles qui acceptent les propositions de Musk, dâaprĂšs Ashley St. Clair. Au Wall Street Journal, elle explique sâĂȘtre vue proposer 15 millions de dollars et 100 000 $ de soutien mensuel jusquâaux 21 ans de leur fils Romulus en Ă©change de son silence sur lâidentitĂ© du pĂšre. Jared Birchall, lâanalyste financier Ă la tĂȘte du family office dâElon Musk depuis 2016, lui aurait expliquĂ© que des accords similaires avaient Ă©tĂ© signĂ©s avec les mĂšres dâautres enfants. Leur nombre nâest pas connu â Jenna Wilson, fille de Musk ayant rompu tout contact avec son pĂšre aprĂšs que celui-ci a refusĂ© dâaccepter sa transition, indique ainsi ne pas connaĂźtre le nombre exact de ses frĂšres et sĆurs.
Ashley St. Clair a refusĂ© lâaccord, car celui-ci lui interdisait dâĂ©voquer le lien entre Musk et son fils, mais nâempĂȘchait pas le milliardaire de parler mal dâelle sâil le souhaitait. La jeune femme indique ne pas vouloir que son fils se sente illĂ©gitime, et que le contrat ne prĂ©voyait aucune sĂ©curitĂ© en cas de maladie de lâenfant, ou de dĂ©cĂšs de Musk avant les 21 ans du petit garçon.
Quatre jours aprĂšs sa publication sur X, lâinfluenceuse indique que Musk a mis fin Ă lâoffre de 15 millions de dollars. Alors que St. Clair demandait un test de paternitĂ© â depuis revenu avec une probabilitĂ© de 99, 9999 % sur le fait que Musk soit le pĂšre â, celui-ci a rĂ©duit lâallocation mensuelle Ă 40 000, puis 20 000 dollars. Les dates des rĂ©ductions de paiement coĂŻncident avec des dĂ©saccords juridiques, explique lâun des avocats de la mĂšre de famille : « La seule conclusion que nous puissions en tirer est que lâargent est utilisĂ© comme une arme ».
Avant Ashley St. Clair, la chanteuse Grimes (Claire Boucher Ă la ville) a, elle aussi, eu Ă se battre contre lâentrepreneur politique. AprĂšs avoir frĂ©quentĂ© Musk Ă partir de 2018, lâartiste a eu avec lui trois enfants, puis sâest battue dans les tribunaux pour obtenir leur garde â la chanteuse accuse le chef dâentreprises de lâavoir empĂȘchĂ©e de voir lâun de leurs enfants pendant cinq mois. Elle dĂ©clare en outre avoir Ă©tĂ© ruinĂ©e par la bataille judiciaire.
Obsession partagée
Outre Ashley St. Clair et Grimes, les deux autres mĂšres connues dâenfants de Musk sont son ex-femme Justine Musk et lâinvestisseuse Shivon Zilis. Cette derniĂšre vit dans un complexe fermĂ© dont lâacquisition a Ă©tĂ© gĂ©rĂ©e par Jared Birchall, qui supervise lâessentiel des nĂ©gociations liĂ©es aux grossesses et au soutien financier post-naissance des femmes liĂ©es Ă Musk. Dans lâidĂ©e initiale de Musk, le complexe aurait accueilli tous ses enfants â il a tentĂ© de convaincre Grimes de sây installer, puis St. Clair de venir y passer du temps.
Aussi étranges que puissent sonner ces récits, ils ne sont pas propres à Elon Musk.
Dans lâunivers de la tech, ils sâintĂšgrent dans un courant plus large de promotion dâune forme dâeugĂ©nisme « positif », qui permettrait de faire naĂźtre des enfants « plus intelligents » que la moyenne. Le fondateur de Telegram Pavel Durov sâest ainsi fĂ©licitĂ© que ses dons de spermes aient aidĂ© plus de 100 couples dans 12 pays diffĂ©rents Ă concevoir des enfants. Si le projet peut sembler philanthropique (en France, les dons de sperme sont trĂšs insuffisants), ils prennent un tour plus sujet Ă dĂ©bat lorsquâon lit lâentrepreneur dĂ©crire ses dons comme du « matĂ©riel de haute qualitĂ© » et vouloir rendre son ADN « open source ».
Dâun point de vue plus entrepreneurial, le patron dâOpenAI Sam Altman a notamment investi dans la start-up Conception, qui cherche Ă rendre possible la conception biologique possible entre personnes de mĂȘme sexe.
Le cas de Musk sâinscrit, aussi, dans un contexte politique. Fin mars, des influenceurs dâextrĂȘme-droite organisaient par exemple un Ă©vĂ©nement dâun week-end au Texas pour permettre Ă des personnes fortunĂ©es de se rencontrer, dans le but de leur faire concevoir des enfants.
Alors que le Parti rĂ©publicain est divisĂ© sur la question de la procrĂ©ation mĂ©dicalement assistĂ©e, Donald Trump a rĂ©cemment dĂ©clarĂ© vouloir devenir le « prĂ©sident de la fĂ©condation ». Câest aussi au prĂ©sident, par lâintermĂ©diaire de ses nominations Ă la cour suprĂȘme, que les Ătats-Unis doivent le recul du droit Ă lâavortement Ă lâĂ©chelle fĂ©dĂ©rale.