En Afrique du Sud, la fille d’un ex-président accusée d’enrôler de force des hommes pour la Russie
On leur avait promis une formation en sécurité pour devenir gardes du corps pour des personnalités haut placées en Afrique du Sud ; ils se retrouvent aujourd’hui bloqués en Ukraine, forcés de combattre pour la Russie. C’est le calvaire que vivent actuellement 17 Sud-Africains, enrôlés de force dans l’armée russe, après s’être vu promettre un stage d’entraînement dans le pays. L’affaire suscite d’autant plus un tollé que l’une des personnes à l’origine de ce recrutement ne serait autre que la fille de l’ex-président Jacob Zuma, Duduzile Zuma-Sambudla, députée du parti Umkhonto we Sizwe (MK).
C’est sa sœur, Nkosazana Zuma-Mncube, qui a annoncé dans un communiqué avoir déposé plainte, samedi 22 novembre, auprès des autorités sud-africaines, accusant Duduzile Zuma-Sambudla et deux autres personnes d’avoir recruté illégalement une vingtaine d’hommes, dont huit de leur propre famille. Elle les accuse de trafic d’êtres humains, d’escroquerie et de soutien à une armée étrangère.
Bloqués dans le Donbass
"Ces hommes ont été attirés en Russie sous de faux prétextes et livrés à un groupe de mercenaires russes pour combattre en Ukraine, à leur insu et sans leur consentement. Parmi ces 17 hommes, qui sollicitent l’aide du gouvernement sud-africain, figurent huit membres de ma famille", a indiqué l’autre fille de l’ex-président Jacob Zuma, dans une déclaration diffusée par plusieurs médias sud-africains. Le 6 novembre, la présidence sud-africaine avait, elle aussi, annoncé avoir reçu des appels de détresse de 17 hommes âgés de 20 à 39 ans, pris au piège dans la région du Donbass, dans l’est de l’Ukraine, indique Le Monde.
Duduzile Zuma-Sambudla, dont les réseaux sociaux abondent de contenus pro-russes, conteste pour sa part ces accusations et assure avoir été piégée. Elle dit avoir été approchée via la messagerie WhatsApp par un homme avec qui elle n’avait jamais eu de contact auparavant : Blessing Khoza. Ce dernier lui aurait offert un programme de formation paramilitaire ouvert aux civils. Elle évoque également une femme, Siphokazi Xuma, impliquée dans le recrutement forcé de ces personnes.
La fille de l’ex-président sud-africain explique avoir elle-même participé à un de ces fameux stages en Russie, pendant un mois, sans jamais avoir été exposée à des combats. "Ces personnes sont arrivées environ une semaine après moi. J’ai partagé des informations innocemment : je n’ai persuadé ni fait pression sur aucune d’entre elles. Le fait que des membres de ma propre famille aient choisi de participer prouve que je n’avais aucune raison de soupçonner que le programme était dangereux", mentionne-t-elle dans sa déclaration à la police, consultée par le média sud-africain Daily News.
Personnage controversé, Duduzile Zuma-Sambudla est actuellement en procès, accusée d’incitation au terrorisme et à la violence, pour son rôle présumé lors des émeutes de 2021, ayant fait plusieurs centaines de morts, après l’arrestation de son père. Elle a dit collaborer avec les autorités dans le cadre de l’affaire des enrôlements forcés. La Direction des enquêtes sur les crimes prioritaires, connue en Afrique du Sud sous le nom de Hawks, a pour sa part confirmé qu’elle enquêtait actuellement sur Sambudla-Zuma. Les charges restent à déterminer, ont précisé les autorités.
Trafic humain
Alors que l’invasion russe de l’Ukraine approche de son quatrième anniversaire, le recours par les deux camps à des soldats étrangers se multiplie. Kiev a récemment fait appel à des mercenaires colombiens. Mais Moscou a, quant à elle, surpassé les manœuvres pour se procurer des combattants dans d’autres pays. Des rapports font ainsi état d’agents de l’Etat russe ou d’intermédiaires recrutant, de manière obscure, des personnes en Afrique, en Inde, au Népal, en Syrie ou encore à Cuba. Les personnes sont souvent attirées par de fausses promesses d’emplois n’ayant rien à voir avec l’industrie militaire, et bien rémunérées.
En août, le gouvernement sud-africain avait annoncé enquêter sur des "programmes étrangers" soupçonnés de recruter de jeunes Sud-Africains "sous de fausses excuses", rappelle Le Monde. Des jeunes femmes africaines ont notamment été envoyées assembler des drones en Russie, après s’être vues proposer un travail dans la restauration ou l’hôtellerie.

© AFP





