Chili : une gouvernance à construire pour José Antonio Kast
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A Washington, la victoire de José Antonio Kast à l’élection présidentielle chilienne est observée avec bienveillance. En élisant un dirigeant d’extrême droite, admirateur assumé d’Augusto Pinochet, le Chili opère un virage politique majeur, devenant le pays le plus conservateur de la région depuis la fin de la dictature en 1990. Un tournant qui résonne favorablement avec la stratégie régionale de l’administration Trump qui place ses pions en Amérique latine, longtemps appelée "l’arrière-cour des Etats-Unis".
Avec près de 58 % des suffrages face à Jeannette Jara, candidate d’une large coalition de gauche, l’ultraconservateur de 59 ans s’impose largement. Dès l’annonce des résultats, les félicitations américaines n’ont pas tardé. Le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio, a salué une victoire qui, selon lui, permettra de faire avancer des "priorités communes", notamment en matière de sécurité publique, de lutte contre l’immigration clandestine et de relations commerciales.
Le programme de José Antonio Kast - qui prendra ses fonctions en mars - présente en effet de nombreux points de convergence avec celui de Donald Trump. L’ancien député a fait campagne sur une ligne sécuritaire très dure, promettant d’expulser près de 340 000 personnes migrantes en situation irrégulière et de renforcer le rôle de l’armée dans les zones touchées par la criminalité. "Tout au long de sa longue carrière politique, Kast a toujours défendu une ligne dure de droite. Il a proposé la construction de murs aux frontières, le déploiement de l’armée dans les zones à forte criminalité et l’expulsion de tous les migrants en situation irrégulière", contextualise la chaîne américaine CNN.
Mais pour la Maison-Blanche, l’intérêt dépasse la simple affinité idéologique. Le président américain entend s’appuyer sur des pays alliés afin de leur confier une partie de la gestion de sa politique migratoire. L’Argentine de Javier Milei, qui revendique sa proximité avec l’administration Trump, s’inscrit dans cette logique, tout comme le Salvador de Nayib Bukele, où sont détenus dans une prison de haute sécurité des migrants expulsés des Etats-Unis. L’ultralibéral argentin Javier Milei a d’ailleurs exprimé sur le réseau X son "immense joie", saluant l’"écrasante victoire" de son "ami".
Ce réalignement intervient alors que Donald Trump, revenu à la Maison-Blanche en janvier 2025, tente d’étendre son influence en Amérique latine. Sa politique, mêlant pressions diplomatiques et signaux de fermeté, a ravivé les inquiétudes sur le continent. Le président américain s’est immiscé dans les débats politiques de plusieurs pays, du Brésil à la Colombie, tandis que le déploiement d’une armada dans les Caraïbes alimente les spéculations sur une possible intervention contre le régime de Nicolas Maduro au Venezuela.
Vendredi 5 décembre, l’administration Trump a même franchi une nouvelle étape en publiant une version actualisée de sa "Stratégie de sécurité nationale". Le document assume une lecture offensive du principe "l’Amérique d’abord" et ressuscite la doctrine Monroe, selon laquelle l’Amérique latine constitue une zone d’influence privilégiée des Etats-Unis.
Dans ce que Washington qualifie de "corollaire Trump", l’objectif est clair : restaurer la suprématie américaine, sécuriser l’accès aux ressources stratégiques et s’assurer que les gouvernements de la région soient suffisamment stables pour contenir les migrations vers le nord. Dans ce contexte, la victoire de l’extrême droite chilienne apparaît, pour les Etats-Unis, comme une opportunité stratégique autant qu’idéologique. Un nouveau basculement régional dont Donald Trump entend tirer parti.

© afp.com/Eitan ABRAMOVICH