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Tentatives d'espionnage de la Chine : le MI5 alerte les parlementaires britanniques

Le service britannique de renseignement intérieur (MI5) a alerté les parlementaires sur des tentatives d'espionnage et de recrutement de la Chine, a annoncé mardi 18 novembre le ministre en charge de la Sécurité, Dan Jarvis, qui a dévoilé un ensemble de mesures visant à mieux protéger les élus. "Un peu plus tôt mardi, le MI5 a émis une alerte espionnage" à destination des parlementaires, "pour les avertir du ciblage en cours de nos institutions démocratiques par des acteurs chinois", a déclaré le ministre devant les députés à la chambre des Communes.

Cette alerte intervient quelques semaines après la polémique soulevée par l'abandon de charges contre deux hommes, dont un travaillant au Parlement britannique, soupçonnés d'espionnage au profit de Pékin. Le gouvernement travailliste a été accusé d'avoir fait échouer leur procès pour ménager ses relations avec la Chine, ce dont il s'est toujours fermement défendu.

Des agents chinois pourraient se faire passer pour des "chasseurs de tête"

Selon le ministre, des agents chinois tentent de "recruter et de cultiver des relations avec des individus ayant accès à des informations sensibles sur le parlement et le gouvernement", par exemple en se faisant passer pour des "chasseurs de tête" externes. Ces tentatives peuvent aussi viser "les assistants parlementaires, des économistes, des employés de think tanks, des consultants en géopolitique ou des fonctionnaires", a-t-il détaillé.

La ministre des Affaires étrangères Yvette Cooper a évoqué ce sujet avec son homologue chinois Wang Yi début novembre et a "été claire (...) sur le fait qu'aucune activité qui menace la sécurité nationale britannique, en particulier en ce qui concerne son Parlement et son système démocratique ne sera tolérée", a ajouté Dan Jarvis.

Pour tenter de "contrer les menaces posées par la Chine et d'autres acteurs étatiques", le ministre a dévoilé mardi un ensemble de mesures, notamment pour protéger le système électoral, avec un renforcement des règles sur les dons aux candidats et partis politiques, et un durcissement des sanctions pour les personnes accusées d'ingérence dans les élections.

Le gouvernement va lancer des campagnes de sensibilisation auprès du personnel politique et parlementaire, ainsi qu'auprès des dirigeants d'universités et du monde des affaires. "C'est dans notre intérêt de long terme de continuer à avoir des relations avec la Chine, (...) mais nous nous défendrons toujours contre tout pays, y compris la Chine, qui tente d'interférer, d'influencer ou de saper l'intégrité de nos institutions démocratiques", a insisté Dan Jarvis.

© PETER NICHOLLS / GETTY IMAGES EUROPE / Getty Images via AFP

Le ministre en charge de la Sécurité, Dan Jarvis, a dévoilé un ensemble de mesures visant à mieux protéger les élus.
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Pologne : deux Ukrainiens au service de la Russie suspectés d'avoir saboté une voie ferrée stratégique

"Une limite a été franchie." Ce mardi 18 novembre, Donald Tusk, le Premier ministre polonais, s'adresse aux parlementaires du pays sur un ton grave. Lundi, une portion de la voie ferrée reliant sa capitale, Varsovie, et Lublin, ville proche de la frontière avec l'Ukraine, a été retrouvée détruite par des explosifs, la rendant un temps impraticable. Plus loin sur la ligne, d'autres dégâts ont été constatés sur une caténaire, forçant un train transportant plusieurs centaines de passagers à s'immobiliser. Dans ce second cas, un "collier" en acier a été retrouvé posé sur un rail et était "destiné probablement à faire dérailler un train", assure Donald Tusk. Des faits que les autorités polonaises ont rapidement qualifiés de sabotage, possiblement commis "pour le compte d’un service de renseignement étranger".

Une voie cruciale à l'acheminement de l'aide en Ukraine

Cette voie ferrée est une composante essentielle à l'acheminement de l'aide humanitaire et militaire à l'Ukraine. Chaque jour, 115 trains y circulent. Dès mardi matin, Varsovie n'a pas hésité à faire comprendre que l'ombre de Moscou planait au-dessus de ces incidents. Le porte-parole du ministre polonais des services de sécurité, Jacek Dobrzyński, avait ainsi déclaré que "tout indique" que le renseignement russe serait impliqué dans cette affaire. Devant la Diète, la chambre basse du Parlement polonais, Donald Tusk s'est fait ce mardi midi encore plus précis. Le responsable a annoncé l'identification de deux suspects, des "citoyens ukrainiens qui collaborent depuis longtemps avec les services de renseignement russes", a-t-il déclaré.

Selon Donald Tusk, l'un de ces deux hommes a déjà été condamné à Lviv, en Ukraine, pour de précédents faits de sabotage. L'autre serait originaire de la région du Donbass, en partie occupée par les forces russes. Tous deux auraient franchi la frontière polonaise depuis la Biélorussie. "Nous sommes confrontés à un événement sans précédent", a souligné le Premier ministre. "Ne soyez pas surpris par les réactions émotionnelles qu'il suscite. Il s'agit peut-être de la situation la plus grave de ce type, du point de vue de la sécurité nationale, depuis le début de la guerre en Ukraine." Aucun détail supplémentaire sur l'identité précise des suspects n'a été fournie par Donald Tusk, expliquant que des opérations étaient toujours en cours dans le cadre de cette enquête.

La Pologne en première ligne face à la Russie

Frontalière de l'Ukraine, de la Biélorussie – alliée à Moscou – et de la Russie via son enclave de Kaliningrad, la Pologne se situe en première ligne face à la menace provoquée par le Kremlin à l'est de l'Europe. En septembre, le pays avait déjà connu une situation d'urgence, avec l'incursion d'une vingtaine de drones russes au-dessus de son territoire. L'épisode avait contraint l'Otan à remodeler son dispositif de défense dans la région. Mais ce sabotage risque de marquer un nouvel échelon de la gradation des tensions entre Varsovie et Moscou – et plus généralement entre les puissances du Vieux continent et la Russie. À Bruxelles, la situation a d'ailleurs fait réagir Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. "L'Europe doit d'urgence renforcer sa capacité à protéger nos cieux et nos infrastructures", a-t-elle exhorté lundi, sur son compte X.

Moscou a-t-il souhaité tester une nouvelle fois les limites des Européens avec un tel sabotage ? "Je doute que quiconque se donne autant de mal juste pour endommager les voies, et non pour faire dérailler un train et tuer des passagers", alerte Michał Piekarski, chercheur à l’Institut d’études internationales et de sécurité à l’université de Wroclaw, auprès de la Gazeta Wyborcza, un des principaux quotidiens polonais. "La question est de savoir si les auteurs visaient un train en particulier, ou s'ils essayaient simplement de faire dérailler n'importe quel train qui pourrait arriver." Dans un article consacré à l'incident, la Gazeta Prawna, un autre média polonais, rapporte que des caméras ont été retrouvées aux abords des rails. De quoi faire suggérer aux enquêteurs qu'une vidéo de propagande aurait pu être filmée sur les lieux du crime pour le compte de Moscou.

Silencieux sur les accusations de Varsovie à son encontre jusqu'ici, le Kremlin a dénoncé mardi après-midi une campagne de "russophobie" de la part de la Pologne. Mais il n'a pas non plus démenti formellement ces mises en cause. "La Russie est accusée de toutes les formes de guerre hybride ou directe qui se produisent et en Pologne, ils font du zèle à ce sujet. La russophobie y fleurit dans toute sa splendeur", a ainsi lancé le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, interrogé par un journaliste russe.

© Wojtek RADWANSKI / AFP

Les enquêteurs examinent les rails d'une voie ferrée endommagée par des explosifs à Mika (Pologne), le 17 novembre 2025.
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Transparence des salaires : les cadres français plus critiques que leurs voisins européens

Communiquer aux salariés les rémunérations de leurs collègues. Cela ne sera plus une option mais une obligation pour les entreprises françaises à partir de 2026. Dès l'année prochaine en effet, une directive européenne en ce sens sera transposée dans le droit national. Une initiative de transparence largement plébiscitée par les cadres français, révèle une étude de l'Apec, d'autant que ces derniers se montrent plus critiques que leurs voisins européens sur la situation actuelle dans leur entreprise.

Un manque de transparence ressenti davantage en France qu'ailleurs en Europe

Près d'un cadre français sur deux (46 %) considère ainsi que la politique salariale de sa société est opaque, contre 38 % des cadres en Allemagne, 33 % en Espagne et seulement 28 % en Italie, selon cette étude publiée ce mardi 18 novembre. En France, cette sensation d'opacité est particulièrement répandue chez les femmes (52 %), mais aussi chez les cadres des grandes entreprises (58 %) et les non-managers (60 %). Les critères d'augmentation des salaires eux-mêmes sont jugés opaques par 49 % des cadres français. C'est là encore plus qu'ailleurs en Europe (38 % en Allemagne, 43 % en Espagne et en Italie).

S'ils sont plus critiques que leurs voisins sur la situation actuelle, les Français aspirent tout autant qu'eux à plus de transparence salariale. En France, environ six cadres sur dix se déclarent ainsi favorables à ce que les salaires de chacun soient connus de tous dans les entreprises, comme en Espagne, en Italie, ou en Allemagne.

Les cadres français "globalement moins informés"

Ces chiffres varient toutefois légèrement en fonction de l'âge. Le besoin de transparence est encore plus fort chez les cadres français de moins de 35 ans avec 71 % de personnes favorables, contre 62 % chez les 35-54 ans, ou 59 % chez les 55 ans et plus. Une autre mesure de la future directive est d'ailleurs censée permettre de répondre à ce besoin accru de transparence : le salaire devra désormais automatiquement être communiqué dans les offres d'emploi.

Une évolution d'autant plus nécessaire que les cadres français disent davantage avoir du mal à situer leur rémunération que leurs homologues européens. En France, 42 % des cadres peinent à situer leur salaire par rapport à ceux des personnes occupant un poste similaire dans d’autres entreprises, contre 35 % en Allemagne, 30 % en Espagne et 29 % en Italie. Et ils sont encore plus (50 %) à éprouver de telles difficultés en interne, dans leur entreprise. En comparaison avec leurs voisins, "les cadres français se considèrent donc globalement moins informés sur ces aspects", note l'étude de l'Apec.

Craintes des managers

Si la directive européenne pour la transparence semble donc largement attendue en France, certains managers craignent toutefois une détérioration du climat social dans leurs équipes. 62 % des managers français estiment ainsi qu’elle pourrait entraîner des conflits. D'autant que la plupart d'entre eux (63 %) admettent qu'ils auraient du mal à justifier certains écarts de rémunération dans leur équipe.

Interrogés sur l'attitude qu'ils adopteraient s'ils apprenaient être moins bien payés qu'un collègue à poste équivalent, 9 cadres sur 10 confient qu'ils chercheraient à renégocier leur salaire et 6 sur 10 songeraient même à changer d'entreprise. Une proportion encore plus importante chez les moins de 35 ans : les trois quarts d'entre eux envisageraient de chercher un emploi ailleurs dans une telle situation, toujours selon l'Apec.

© Shutterstock

Les salariés pourront dès 2026 demander à connaître la rémunération de leurs collègues.
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Gaza : quels pays pour la "force internationale" prévue par la résolution votée à l'ONU ?

Le Conseil de sécurité des Nations unies a voté lundi 17 novembre pour la résolution américaine endossant le plan de Donald Trump pour Gaza, qui prévoit notamment le déploiement d’une force internationale, rejetée par le Hamas. Cette "Force de stabilisation internationale" (ISF) était déjà prévue dans l’accord qui a conduit à un fragile cessez-le-feu le 10 octobre entre Israël et le Hamas palestinien. Selon les termes de cet accord, elle sera composée d’une coalition en majorité composée de pays arabes et musulmans, et déployée à Gaza pour y superviser la sécurité à mesure que l’armée israélienne s’en retirera.

Si aucune composition n’a été dévoilée, selon des sources diplomatiques à l’AFP, certains pays ont déjà dit qu’ils étaient prêts à participer à cette force de stabilisation internationale, notamment l’Indonésie - qui a dit en septembre être disposée à "déployer 20 000 ou plus de ses fils et filles pour aider à maintenir la paix à Gaza" - mais tiennent à un mandat du Conseil de sécurité pour effectivement déployer des troupes dans le territoire palestinien. Selon Politico, qui citait mi-octobre un officiel de la Défense américaine, et un ancien responsable de la Défense, l’Indonésie, l’Azerbaïdjan et le Pakistan "sont les principaux candidats pour fournir des troupes à une future force de stabilisation dans la bande de Gaza". D’après le Guardian, qui cite "des diplomates", l’Egypte pourrait chapeauter cette force internationale.

La Turquie veut participer, Israël dit non

La Turquie souhaiterait également participer, mais les efforts d’Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d’un mauvais œil par Israël qui juge la Turquie trop proche du Hamas. Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir le pays prendre part à la force internationale de stabilisation à Gaza. "Nous avons […] clairement indiqué au sujet des forces internationales qu’Israël déciderait quelles forces sont inacceptables pour nous", déclarait Benyamin Netanyahou fin octobre.

L’Allemagne soutient de son côté l’idée d’un mandat de l'ONU pour cette force internationale, qui devra reposer sur "une base légale claire en droit international". "C’est très important pour les pays disposés à envoyer leurs troupes à Gaza, et pour les Palestiniens", a déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul début novembre.

A date du 10 novembre, la France était quant à elle représentée par trois officiers dans une structure mise en place par les Américains en Israël. Ils "y sont à titre d’observation et de mise à disposition pour pouvoir examiner (une) contribution supplémentaire" possible, selon la présidence française. Comme le souligne le Guardian, "il n’est pas prévu que des troupes européennes ou britanniques soient impliquées", mais la Grande-Bretagne a également "envoyé des conseillers auprès d’une petite cellule dirigée par les États-Unis en Israël".

La Jordanie "trop impliquée" pour participer

Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman Safadi, a précisé le 1er novembre que son pays n’enverrait pas de soldats à Gaza : "Nous sommes trop impliqués sur ce sujet et ne pouvons pas déployer de troupes", a-t-il dit, précisant que la Jordanie était toutefois disposée à former la force et à coopérer avec elle. Il souhaite comme l’Allemagne que la force soit mandatée par l'ONU.

Les Emirats arabes unis ne rejoindront "probablement pas" non plus la force de stabilisation prévue dans le plan de Donald Trump pour Gaza. Les Emirats "ne voient pas encore de cadre clair pour la force de stabilisation et, dans ces circonstances, ne participeront probablement pas à une telle force", a déclaré récemment le conseiller présidentiel Anwar Gargash, lors d’un forum à Abou Dhabi. Mais ils "soutiendront tous les efforts politiques en faveur de la paix et resteront en première ligne au niveau de l’aide humanitaire", a-t-il ajouté en affirmant que son pays avait fourni 2,57 milliards de dollars d’aides à la bande de Gaza depuis le début de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas.

Comme l’a noté un observateur auprès de l’AFP, il pourrait en outre être compliqué pour des troupes de certains autres pays musulmans de se retrouver dans un contexte d’affrontement direct face au Hamas.

© afp.com/Jack GUEZ

Des soldats de l'armée israélienne observent des bâtiments détruits dans la bande de Gaza depuis la frontière avec le territoire palestinien, le 13 août 2025
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Ukraine : la Russie accuse la France d'"alimenter" la guerre en vendant des Rafale à Kiev

En visite à Paris lundi 17 novembre, Volodymyr Zelensky a signé avec Emmanuel Macron une "déclaration d’intention" en vue de l’achat futur de cent avions de combat français Rafale, dont l’Ukraine entend se doter pour la première fois, et de systèmes de défense aérienne. "C’est un accord historique et nous apprécions beaucoup le soutien de la France", a salué le président ukrainien Volodymyr Zelensky. La Russie, elle, a bien sûr vu d’un mauvais œil cette annonce : Moscou a accusé ce mardi Paris d'"alimenter" la guerre en Ukraine.

Les infos à retenir

⇒ La Russie accuse la France d'"alimenter" la guerre en vendant des Rafale à Kiev

⇒ Volodymyr Zelensky en Turquie mercredi pour "raviver" des négociations

⇒ Une attaque de missile russe tue une adolescente dans l’est de l’Ukraine

La Russie accuse la France d'"alimenter" la guerre en vendant des Rafale à Kiev

Moscou a accusé ce mardi la France d'"alimenter" la guerre en Ukraine en signant un accord sur le futur achat par Kiev de 100 avions de combat français Rafale. "Paris ne contribue en aucun cas à la paix, mais alimente au contraire les sentiments militaristes et proguerre", a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, en réponse à une question de l’AFP, lors de son briefing quotidien.

Lundi, les présidents ukrainien, Volodymyr Zelensky, et français, Emmanuel Macron, ont signé à Paris une "déclaration d’intention", qualifiée d'"historique" par Volodymyr Zelensky, portant sur l’achat futur par Kiev de 100 Rafale avec leurs armements associés.

Depuis le début du conflit, déclenché par la Russie en février 2022, Moscou critique à l’envi les pays de l’Otan pour leurs livraisons d’armes à l’Ukraine, en affirmant dans le même temps que celles-ci sont inefficaces sur le champ de bataille. "Peu importe quels avions sont vendus au régime de Kiev, cela ne changera rien à la situation sur le front et cela ne modifiera pas la dynamique du conflit", a ajouté Dmitri Peskov mardi, après avoir critiqué la vente des Rafale à l’Ukraine.

Volodymyr Zelensky en Turquie mercredi pour "raviver" des négociations

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a annoncé mardi se rendre en Turquie mercredi pour tenter de "raviver" des négociations de paix et reprendre les échanges de prisonniers de guerre avec la Russie. "Demain (mercredi), je tiendrai des réunions en Turquie. Nous nous préparons à raviver les négociations et avons élaboré des solutions que nous proposerons à nos partenaires", a-t-il annoncé sur les réseaux sociaux.

Le dirigeant veut notamment "réengager" les Etats-Unis dans les efforts de paix visant à arrêter l’invasion russe de l’Ukraine, a indiqué à l’AFP un responsable ukrainien. "L’objectif principal est que les Américains se réengagent" dans les efforts de paix, a indiqué un responsable ukrainien sous couvert d’anonymat, précisant que Volodymyr Zelensky devait rencontrer à Ankara son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan.

Un responsable ukrainien a précisé peu après que l’émissaire américain Steve Witkoff était attendu à Istanbul. Le Kremlin a en revanche indiqué qu’aucun émissaire russe ne se rendrait en Turquie pendant la visite du président ukrainien.

Une attaque de missile russe tue une adolescente dans l’est de l’Ukraine

Une attaque de missile russe a tué une adolescente et fait au moins neuf blessés dans la région de Kharkiv, dans l’est de l’Ukraine, ont annoncé les autorités locales tôt mardi.

"L’ennemi a lancé des attaques de missile sur la ville de Berestyn" et "une fille de 17 ans qui avait été grièvement blessée […] est morte à l’hôpital", a écrit le gouverneur régional Oleg Synegoubov sur Telegram. "Il y a à l’heure actuelle neuf blessés recensés, dont sept sont hospitalisés", a-t-il ajouté, précisant que les services d’urgence se trouvaient sur les lieux.

Dans la région voisine de Dnipropetrovsk, le gouverneur Vladyslav Gaïvanenko a fait état d'"incendies" à Dnipro liés à une attaque de drone, mais sans mentionner d’éventuels morts ou blessés.

© afp.com/Christophe Ena

Un avion Rafale, des drones et des munitions exposés à l'occasion de la visite en France du président ukrainien Volodymyr Zelensky, le 17 novembre 2025, à Vélizy-Villacoublay, dans les Yvelines
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Tensions avec le Venezuela : Donald Trump souffle le chaud et le froid face à Nicolas Maduro

Donald Trump a déclaré lundi 17 novembre qu’il parlerait "à un moment donné" au président vénézuélien Nicolas Maduro, qui s’est dit prêt à échanger "en tête-à-tête" avec son homologue, au moment où le déploiement militaire américain au large du Venezuela fait monter les tensions. "A un moment donné, je vais lui parler", a déclaré à des journalistes le président américain dans le bureau Ovale, tout en ajoutant que Nicolas Maduro "n’a pas été bon pour les Etats-Unis".

Mais dans le même temps, interrogé pour savoir s’il excluait l’envoi de troupes américaines au Venezuela, Donald Trump a répondu : "Non, je n’exclus pas cette possibilité, je n’exclus rien."

Nicolas Maduro a déclaré dans la foulée être prêt à discuter "en tête-à-tête". "Aux États-Unis, celui qui veut parler avec le Venezuela (on) parlera (avec lui), 'face to face', en tête-à-tête. Sans aucun problème. Ce qu’on ne peut pas permettre […] c’est que le peuple chrétien du Venezuela soit bombardé et massacré", a-t-il dit.

Les Etats-Unis ont mené ces dernières semaines une vingtaine de frappes contre des embarcations qu’ils accusent - sans présenter de preuves - de transporter de la drogue, faisant au moins 83 victimes. Le déploiement militaire américain dans la région s’est considérablement renforcé avec l’arrivée toute récente du porte-avions Gerald Ford, le plus grand au monde.

"Nous devons simplement nous occuper du Venezuela", a jugé Donald Trump, accusant Caracas d’avoir "déversé des centaines de milliers de personnes issues des prisons dans notre pays". Caracas accuse de son côté Washington de prendre prétexte du narcotrafic "pour imposer un changement de régime" au Venezuela et s’emparer de son pétrole.

Donald Trump n’aurait "aucun problème" avec des frappes au Mexique

Le président américain a ajouté qu’il n’aurait "aucun problème" avec d’éventuelles frappes américaines au Mexique pour lutter contre les cartels. "Il y a de gros problèmes là-bas", a assuré le dirigeant républicain, suggérant de mener des frappes aériennes contre des bateaux suspectés de transporter de la drogue à l’image de ce que fait Washington dans les Caraïbes et le Pacifique.

La Première ministre de Trinité-et-Tobago, fidèle alliée du président Donald Trump, a assuré lundi que Washington "n’avait jamais demandé" à utiliser l’archipel pour lancer des attaques contre le Venezuela alors qu’un contingent de Marines américains effectue des exercices dans ce pays situé à une dizaine de kilomètres des côtes vénézuéliennes. "Les Etats-Unis n’ont JAMAIS demandé à utiliser notre territoire pour lancer des attaques contre le peuple du Venezuela. Le territoire de Trinité-et-Tobago ne sera PAS utilisé pour lancer des attaques contre le peuple du Venezuela", a écrit Kamla Persad-Bissessar à l’AFP via la messagerie WhatsApp à propos des exercices militaires.

Ces manœuvres ont été qualifiées d'"irresponsables" par le président vénézuélien Nicolas Maduro qui considère comme une "menace" le déploiement américain dans les Caraïbes. Elles doivent avoir lieu jusqu’à vendredi. Ce sont les deuxièmes en moins d’un mois entre Washington et le petit archipel anglophone.

Les Etats-Unis ont désigné ou s’apprêtent à le faire en parallèle à leur déploiement militaire plusieurs cartels de la drogue dans la région comme étant des "organisations terroristes étrangères", dont le "Cartel des Soleils" au Venezuela.

© afp.com/Juan BARRETO, ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Combo réalisé en 2025 de portraits de Nicolas Maduro (g) et Donald Trump
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La vendetta judiciaire de Donald Trump contre l’ex-directeur du FBI pourrait bien tourner court

La procédure pénale contre l’ancien directeur du FBI James Comey, désigné par Donald Trump à son ministère de la Justice comme une cible prioritaire, apparaît mal embarquée, après une nouvelle décision d’un juge fédéral de Virginie très sévère pour l’accusation, lundi 17 novembre.

Donald Trump a maintes fois exprimé pendant sa campagne électorale sa volonté de se venger de tous ceux qu’il considère comme des ennemis personnels. James Comey, 64 ans, est devenu fin septembre la première de ces personnalités à être inculpée depuis le retour au pouvoir du milliardaire. Il avait témoigné en 2020 devant le Congrès au sujet de l’enquête du FBI sur les liens supposés entre la Russie et la première campagne présidentielle de Donald Trump en 2016.

Vers un classement sans suite ?

Un juge a relevé dans une décision rendue lundi "une série troublante de faux pas dans la conduite des investigations", susceptible selon lui de motiver une annulation de l’inculpation si la défense en faisait la demande. "L’évaluation du juge d’instance renforce la possibilité croissante que l’affaire Comey soit classée sans suite avant même d’être jugée", explique Politico.

En cause notamment, la présentation par Lindsey Halligan, la procureure choisie par Donald Trump, des éléments du dossier au grand jury - commission de citoyens investie de pouvoirs d’enquête. "Le tribunal a identifié deux déclarations de la procureure au grand jury qui de prime abord apparaissent comme des formulations fondamentalement erronées de la loi qui pourraient compromettre l’intégrité du processus", explique le juge William Fitzpatrick.

De graves erreurs prononcées devant le grand jury

La procureure Lindsey Halligan, ancienne avocate personnelle de Donald Trump qui n’avait auparavant aucune expérience en matière de poursuites judiciaires, a ainsi notamment laissé entendre au grand jury que James Comey ne pourrait pas se prévaloir du 5e Amendement de la Constitution américaine, autorisant tout justiciable à ne pas témoigner à son propre procès. Selon Politico, le juge a également relevé que Lindsey Halligan semblait suggérer à tort aux membres du grand jury que le gouvernement disposait de plus de preuves contre James Comey que celles qui leur avaient été présentées.

En conséquence, le juge a donné satisfaction à la défense, ordonnant à l’accusation de fournir à celle-ci d’ici lundi soir tous les documents présentés au grand jury pour obtenir l’acte d’accusation contre James Comey.

Le bureau de Lindsey Halligan et le ministère de la Justice ont refusé de commenter la décision du juge auprès de NBC News, mais selon la chaîne américaine, les procureurs ont fait appel de la décision et demandé de suspendre l’ordonnance du juge, et donc le transfert des documents du grand jury à l’équipe de la défense.

Un "revers" dans le bras de fer de Donald Trump contre ses opposants

Pour le New York Times, "la décision du juge Fitzpatrick n’est que le dernier revers en date dans les efforts du ministère de la Justice pour poursuivre James Comey". Le quotidien américain rappelle que la décision de poursuivre l’ancien directeur du FBI avait été rejetée par le prédécesseur de Lindsey Halligan, Erik S. Siebert, selon qui il n’y avait pas suffisamment de preuves pour engager des poursuites, et que ce dernier avait alors été limogé par Donald Trump en septembre.

Les avocats de l’ex-directeur du FBI ont introduit une série de recours en annulation des poursuites, faisant notamment valoir qu’elles étaient motivées par la seule "rancune personnelle" de Donald Trump et que la nomination de la procureure était "illégale".

La procureure générale de l’Etat de New York, Letitia James, elle aussi inculpée à la suite de pressions publiques de Donald Trump, a également exercé des recours sur ces mêmes motifs. Lors d’une audience la semaine dernière, une autre juge s’est montrée très sceptique sur la légalité de la désignation de la procureure, promettant de rendre une décision à ce sujet d’ici Thanksgiving, le 27 novembre. Après avoir poussé à la démission le procureur du district est de Virginie en charge de ces dossiers, Donald Trump l’avait aussitôt remplacé à ce poste stratégique par Lindsey Halligan, conseillère à la Maison-Blanche.

© afp.com/Brendan Smialowski

L'ancien directeur du FBI James Comey, le 8 juin 2017 à Washington
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Gaza : Israël affirme que le plan de Donald Trump apportera "paix et prospérité"

Donald Trump a salué lundi 17 novembre l’adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU d’une résolution endossant son plan de paix pour Gaza, qui entraînera selon lui "davantage de paix dans le monde". "Cela restera comme l’une des approbations les plus importantes de l’histoire des Nations Unies", a réagi le président américain sur Truth Social, remerciant les pays siégeant au Conseil de sécurité, y compris la Russie et la Chine, qui se sont abstenues. Le texte prévoit notamment le déploiement d'une force de "stabilisation" internationale, et la création d'un "Comité de la paix", organe de "gouvernance de transition" jusqu'à la réforme de l'Autorité palestinienne. Contrairement aux premières versions, l’éventualité d’un Etat palestinien est également mentionnée par cette résolution.

Les infos à retenir

⇒ Le Conseil de sécurité de l'ONU vote pour le plan de paix de Donald Trump

⇒ Un ministre israélien appelle à arrêter Mahmoud Abbas si l'ONU vote en faveur d’un Etat palestinien

⇒ Benyamin Netanyahou dit qu’il va s’occuper "personnellement" des actes de certains colons en Cisjordanie

Israël affirme que le plan de Donald Trump sur Gaza apportera "paix et prospérité" après le vote à l'ONU

Le bureau du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a salué ce mardi le plan de paix du président américain Donald Trump pour Gaza, au lendemain de l'adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU de la résolution américaine qui endosse cette feuille de route. 

"Nous pensons que le plan du président Trump mènera à la paix et à la prospérité car il insiste sur la démilitarisation complète, le désarmement et la déradicalisation de Gaza", indique un communiqué du bureau du Premier ministre. "Israël tend la main à tous ses voisins, porteurs de paix et de prospérité, et les appelle à normaliser leurs relations avec Israël et à se joindre à lui pour expulser le Hamas et ses partisans de la région", ajoute-t-il.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a voté lundi pour le plan de paix de Donald Trump à Gaza, prévoyant en particulier le déploiement d’une force internationale, sous la pression des Etats-Unis qui mettaient en garde contre le risque d’une reprise de la guerre. Treize de ses membres se sont prononcés en faveur de la résolution.

Réagissant également ce mardi, l'Autorité palestinienne a salué le vote de l'ONU et souligné "l'urgence de mettre immédiatement en œuvre sur le terrain cette résolution".

Le Hamas pour sa part a estimé lundi soir que le texte "ne répond (ait) pas aux exigences et aux droits politiques et humains" des Palestiniens. Il "impose un mécanisme de tutelle internationale sur la bande de Gaza, ce que notre peuple, ses forces et ses composantes rejettent", a écrit le mouvement.

Un ministre israélien appelle à arrêter Mahmoud Abbas si l'ONU vote en faveur d’un Etat palestinien

Le ministre israélien de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, figure de l’extrême droite, a appelé lundi à l’arrestation du président palestinien Mahmoud Abbas et à l’assassinat de hauts responsables palestiniens dans le cas où le Conseil de sécurité de l'ONU se prononcerait en faveur d’un Etat palestinien.

"S’ils accélèrent la reconnaissance de cet Etat fabriqué, si l'ONU le reconnaît, vous […] devez ordonner des assassinats ciblés de hauts responsables de l’Autorité palestinienne, qui sont des terroristes à tous les égards (et) ordonner l’arrestation d’Abou Mazen" (surnom de Mahmoud Abbas), a déclaré Itamar Ben Gvir devant des journalistes en apostrophant le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou. "Nous avons une cellule dans la prison de Ketziot (dans le sud d’Israël, NDLR) prête pour lui, pour être reçu dans des conditions similaires à celles de tous les terroristes en prison". "Ce peuple, le soi-disant peuple palestinien inventé, ne doit pas avoir d’Etat", a-t-il encore déclaré.

L’Autorité palestinienne, que dirige Mahmoud Abbas, a dénoncé des "propos incendiaires" reflétant "une politique officielle de l’Etat occupant (Israël, qui occupe la Cisjordanie et la bande de Gaza, NDLR), qui substitue la force à l’état de droit, bafoue la légitimité internationale et s’appuie sur l’impunité".

Cisjordanie : Benyamin Netanyahou dit qu’il va s’occuper "personnellement" des actes de certains colons israéliens

"Je prends très au sérieux les émeutes violentes fomentées par une poignée d’extrémistes qui ne représentent pas les colons en Judée-Samarie (la Cisjordanie, ndlr) et qui tentent de se faire justice eux-mêmes", a déclaré le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou dans un communiqué lundi soir. "Je compte m’occuper personnellement de cette question et convoquer les ministres concernés dès que possible pour répondre à ce phénomène grave", a ajouté Benyamin Netanyahou, à la tête d’un des gouvernements les plus à droite de l’histoire d’Israël.

Il a fait ces déclarations après une attaque ayant visé le village palestinien de Jabaa, près de Bethléem, apparemment en riposte à l’évacuation par les autorités israéliennes d’un avant-poste de colons dans la même zone. Un peu plus tôt, l’armée israélienne avait annoncé être intervenue pour tenter d’arrêter des suspects après avoir reçu des informations sur une descente de "plusieurs dizaines de civils israéliens ayant incendié et vandalisé des maisons et des véhicules". Le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) a recensé en octobre un pic des "attaques de colons ayant causé des victimes, des dommages matériels ou les deux" en près de deux décennies de collecte de données en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967.

© Anadolu via AFP

Benyamin Netanyahou à la Maison-Blanche le 29 septembre 2025, lors d'une conférence de presse conjointe avec Donald Trump.
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Guerre en Ukraine : la capture de Pokrovsk, une victoire qui coûterait cher à la Russie

Après des mois d’un inimaginable bain de sang, la bataille pour la ville de Pokrovsk s’approche dangereusement de son épilogue. Confrontées à des infiltrations incessantes de troupes russes par le sud et la menace d’un encerclement par le nord, les forces ukrainiennes apparaissent dans une position de plus en plus précaire pour assurer la défense de la cité. La prise de cette localité - comme celle de la ville jumelle de Myrnohrad avec laquelle elle formait un ensemble d’environ 100 000 habitants avant la guerre - serait la plus importante enregistrée par l’armée russe depuis celle d’Avdiivka en février 2024. Une conquête qui ne manquerait pas d’être mise à profit politiquement par Vladimir Poutine, alors qu’il a fait de la capture du Donbass son objectif numéro un.

Difficile néanmoins de faire abstraction de l’hécatombe consentie par ses forces pour en arriver là. "La conquête de Pokrovsk serait plus une victoire politique que militaire, abonde le général Nicolas Richoux, ancien commandant de la 7e brigade blindée. Sur le plan militaire, c’est un effort disproportionné par rapport aux gains." A Pokrovsk comme dans le reste du pays, les pertes enregistrées par l’armée russe sont abyssales. Rien qu’en octobre, on en compterait au moins 25 000 (morts, blessés, disparus), principalement dans cette ville, a annoncé Volodymyr Zelensky devant la presse le 7 novembre. Quelques jours plus tôt, les renseignements britanniques en recensaient plus de 350 000 dans l’ensemble du pays depuis le début de l’année. Cela, pour une progression d’un peu moins de 3 500 kilomètres carrés - soit environ la moitié d’un département français.

"Militairement, sa valeur s’est fortement réduite"

Sur le plan stratégique, Pokrovsk a en outre vu son intérêt baisser au fil du temps. Autrefois plaque tournante de premier plan pour approvisionner le front grâce à ses nombreux axes logistiques, la ville a vu ce rôle décliner au fur et à mesure de l’avancée russe. "Avec le rapprochement de la ligne de front, c’était devenu un cul-de-sac, confirme le général Richoux. Militairement, sa valeur s’est fortement réduite." Résultat, les Ukrainiens n’ont eu d’autres choix au cours des derniers mois que de trouver des voies d’approvisionnement alternatives, pour couvrir les besoins de leurs troupes engagées dans ce secteur. Réduisant du même coup l’importance du hub constitué par Pokrovsk dans la conduite des opérations.

La capture de la ville n’en resterait pas moins un coup dur pour les forces ukrainiennes, qui continuent résolument à s’y accrocher. Pourrait-elle ouvrir la voie à une brèche plus large dans leurs défenses ? A ce stade, le scénario d’une percée des forces russes au-delà des frontières de la ville semble encore improbable, pointent les observateurs militaires. "Les forces russes manquent d’élan et leur mode de combat actuel ne leur permettra pas d’en gagner, souligne, dans un récent post, Michael Kofman, chercheur principal au Carnegie Endowment for International Peace. L’infiltration [des Russes] permet une offensive progressive, mais ne peut aboutir à des percées opérationnelles significatives." Les Ukrainiens disposent par ailleurs de lignes de défense où se replier et réorganiser leurs forces. "La défense de Pokrovsk avait créé des élongations dans le dispositif ukrainien, ajoute le général (2S) Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la Revue Défense nationale. Un possible retrait des Ukrainiens sur des positions arrières leur permettrait de consolider la ligne de front."

Ceinture de forteresses

De fait, même en cas de prise de Pokrovsk, la route vers la conquête de l’ensemble du Donbass - environ 10 % sont toujours sous contrôle ukrainien - s’annonce encore longue et coûteuse pour les forces russes. Depuis la prise d’Avdiivka en février 2024, à une quarantaine de kilomètres plus à l’est, il leur a fallu pas moins de 21 mois pour parvenir jusqu’à Pokrovsk. Et le plus dur reste à venir. Plus au nord, l’Ukraine dispose encore de sa "ceinture de forteresses", sa principale ligne de défense fortifiée dans l’oblast de Donetsk depuis 2014. Composée de plusieurs villes bastions dont Sloviansk et Kramatorsk, deux cités distantes d’une dizaine de kilomètres l’une de l’autre, qui rassemblaient avant le conflit près de 300 000 habitants, elle constitue encore un obstacle majeur que les Russes n’ont pas les moyens de franchir dans un avenir proche.

Reste une inconnue de poids : l’impact qu’aurait la conquête de la ville sur Donald Trump qui, à plusieurs reprises cette année, n’a pas hésité à faire pression sur l’Ukraine pour la pousser à rendre les armes. "La Russie craint énormément les décisions radicales que pourraient prendre les Etats-Unis en cas d’échec sur le champ de bataille, a résumé Volodymyr Zelensky début novembre. C’est pourquoi il est crucial pour elle de tout faire pour s’emparer de Pokrovsk, quel que soit le moyen, afin de revendiquer une victoire militaire." Un moyen pour le chef du Kremlin d’essayer de renforcer sa position dans les négociations en vue d’un cessez-le-feu réclamé par le président américain. Et peut-être lui faire oublier que la partie est encore loin d’être gagnée.

© afp.com/Iryna Rybakova

Photo prise le 25 mars 2025 et publiée le 26 par le service de presse de la 93e brigade mécanisée des forces terrestres ukrainiennes montrant une vue de la ville de Pokrovsk, sur la ligne de front, en Ukraine
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Gaza : force internationale, Etat palestinien… Ce que dit la résolution américaine adoptée à l'ONU

Le Conseil de sécurité de l'ONU a voté lundi 17 novembre pour le plan de paix de Donald Trump à Gaza, prévoyant en particulier le déploiement d’une force internationale, sous la pression des Etats-Unis qui mettaient en garde contre le risque d’une reprise de la guerre.

Treize de ses membres se sont prononcés en faveur de la résolution. Le président américain s’est félicité d’une "des approbations les plus importantes de l’histoire des Nations Unies". Donald Trump a remercié les pays siégeant au Conseil de sécurité, y compris la Russie et la Chine, qui se sont abstenues.

Plusieurs fois modifiée lors de négociations sensibles, la résolution "endosse" le plan du président américain qui a permis, depuis le 10 octobre, un cessez-le-feu fragile entre Israël et le Hamas dans le territoire palestinien. Le texte, vu par l’AFP, donne mandat jusqu’au 31 décembre 2027 à un "Comité de la paix", organe de "gouvernance de transition" jusqu’à la réforme de l’Autorité palestinienne. Ce comité doit être présidé par Donald Trump.

La résolution "autorise" aussi une "force de stabilisation internationale" (ISF) chargée notamment de la sécurisation des frontières avec Israël et l’Egypte, de la démilitarisation de Gaza, du désarmement "des groupes armés non étatiques", de la protection des civils et de la formation d’une police palestinienne. La composition de cette force n’est pas évoquée.

L’éventualité d’un Etat palestinien mentionnée

Contrairement aux premières versions, l’éventualité d’un Etat palestinien est mentionnée. Après la réforme de l’Autorité palestinienne, "les conditions pourraient finalement être en place pour un chemin crédible vers une autodétermination palestinienne et un statut d’Etat", dit le texte.

Un avenir clairement rejeté par Israël. "Notre opposition à un Etat palestinien sur quelque territoire que ce soit n’a pas changé", a insisté dimanche le Premier ministre Benyamin Netanyahou.

Pour Stéphane Dujarric, le porte-parole du secrétaire général de l'ONU, l’adoption de la résolution américaine est "une étape importante dans la consolidation du cessez-le-feu" à Gaza, ravagée par deux années de guerre provoquée par l’attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien du 7 octobre 2023.

Le Hamas a estimé que le texte, soutenu par l’Autorité palestinienne, "ne répond (ait) pas aux exigences et aux droits politiques et humains" des Palestiniens. Il "impose un mécanisme de tutelle internationale sur la bande de Gaza, ce que notre peuple, ses forces et ses composantes rejettent", a écrit le mouvement.

Réticences

Pour la France, qui a voté en faveur de cette résolution, elle "répond aux besoins les plus urgents des populations et permet de soutenir les efforts de paix en cours". "Nous nous sommes assurés que le texte […] inclue des éléments importants pour nous, et notamment des références à la perspective d’un État palestinien", a ajouté une source diplomatique.

La Russie, qui a fait circuler un texte concurrent, avait justifié cette initiative par le fait que la résolution américaine n’allait pas assez loin sur la perspective d’un Etat palestinien, affirmant un "engagement indéfectible" en faveur de la solution à deux Etats. L’ambassadeur russe, Vassili Nebenzia, a regretté que "le Conseil donne son aval à une initiative américaine sur la base de promesses de Washington, accordant le contrôle total de la bande de Gaza au Comité de la paix".

D’autres Etats membres ont exprimé des réticences, s’inquiétant d’un manque de clarté dans les mandats du Comité de la paix et de l’ISF. Face à ce qu’ils ont qualifié de "tentatives de semer la discorde", les Etats-Unis avaient redoublé d’efforts ces derniers jours pour obtenir un feu vert. "Voter contre cette résolution, c’est voter pour un retour à la guerre", a notamment lancé Mike Waltz avant le scrutin.

© Getty Images via AFP

Les membres du Conseil de sécurité de l'ONU votent sur une résolution américaine sur Gaza, le 17 novembre 2025.
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Boualem Sansal libéré : une année dévastatrice… pour l’Algérie

Alger garde la face. En acceptant le transfert de son otage Boualem Sansal en Allemagne, mercredi 12 novembre, le régime présidé par Abdelmadjid Tebboune s’est imaginé réaliser un joli coup diplomatique : le voilà se délestant d’un prisonnier encombrant, sans céder directement à la France, et en faisant, qui plus est, un pied de nez spectaculaire à son meilleur ennemi, l’ancien ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau.

Bien joué ? Pas vraiment. Si l’enchaînement des événements peut donner l’impression d’une habileté géopolitique algérienne, il suffit de reculer le regard pour contempler le désastre. L’affaire Boualem Sansal, détenu pendant presque un an pour délit d’opinion, aura constitué, d’un bout à l’autre, une catastrophe pour l’Algérie. La "nomenklatura" du régime en a pâti personnellement. On désigne ainsi ces familles de dignitaires, quelques centaines de personnes liées au commandement de l’armée, du renseignement et du gouvernement, titulaires de passeports diplomatiques. Le rétablissement des visas les concernant, décidé par Emmanuel Macron le 6 août dernier, conséquence de relations envenimées en partie par l’emprisonnement de Boualem Sansal, est vécu avec amertume à Alger, selon des sources concordantes.

La population algérienne paye fort le prix du bras de fer

Les entourages des gouvernants ne peuvent plus se rendre avec la même fluidité qu’avant à Paris, pour y passer le week-end ou quelques jours de vacances. Comme le quidam, les voilà obligés de faire la queue dans les consulats, où ils courent le risque d’être vus et brocardés. Plus globalement, la crise entre la France et l’Algérie a abouti à une baisse marquée des visas touristiques accordés par Paris, moins 30 %, a signalé le président français dans sa lettre du 6 août. La population algérienne, privée de voyage en France, paye fort le prix du bras de fer entre les deux pays.

Et que dire de l’image de l’Algérie dans le monde ? En emprisonnant pendant un an un écrivain malade, atteint d’un cancer, à cause de ses convictions, Alger a donné à voir un régime liberticide, s’inspirant de l’Iran et de ses Occidentaux emprisonnés sous de faux prétextes, afin d’être utilisés comme des otages valant rançon. Le vote du conseil de sécurité de l'ONU, le 31 octobre, en faveur de la marocanité du Sahara occidental a concrétisé cette débâcle. Achevant probablement de convaincre les stratèges du régime que l’opération Sansal devait prendre fin. On a connu des manœuvres diplomatiques plus maîtrisées.

© afp.com/FRANCOIS GUILLOT

L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal à Paris, le 29 octobre 2014
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MBS à la Maison-Blanche : les attentes irréalistes de Donald Trump

A 40 ans, Mohammed ben Salmane ne se déplace pas si facilement. Ces derniers mois, le prince héritier saoudien multiplie les faux bonds : il n’était pas à New York, en septembre, pour la conférence sur la Palestine qu’il coprésidait avec Emmanuel Macron. Il n’était pas non plus à Charm el-Cheikh, en octobre, pour assister à la conclusion du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, aux côtés du gratin des dirigeants arabes et européens. En coulisses, certains diplomates occidentaux lient ses absences répétées à la santé fragile de son père de 89 ans, le roi Salmane, dont la mort pourrait ouvrir une lutte de succession, en l’absence physique de son héritier. Tous s’accordent, aussi, pour désigner MBS comme le plus imprévisible des dirigeants.

Ce mardi 18 novembre, le prince saoudien ne ratera toutefois pas son rendez-vous à la Maison-Blanche. MBS n’a pas remis les pieds aux Etats-Unis depuis le meurtre de Jamal Kashoggi, opposant saoudien et chroniqueur du Washington Post, dans le consulat d’Istanbul en octobre 2018. Les renseignements américains le jugent responsable de l’assassinat, mais son statut de Premier ministre d’Arabie saoudite le protège de toute arrestation à Washington. D’autant que Donald Trump joue de sa proximité avec ce jeune prince si riche, à qui il a réservé le premier voyage de son second mandat, en mai dernier. "MBS revient à Washington avec le statut de pilier de la politique américaine au Moyen-Orient, souligne Michael Wahid Hanna, directeur du programme Amérique à l’International Crisis Group. Il est un interlocuteur clé de l’administration Trump sur de nombreux dossiers prioritaires, dont Gaza, le Liban, la Syrie, l’Iran et le Soudan."

Avec cette visite à Washington, Trump réhabilite en grande pompe ce prince que Joe Biden avait qualifié de "paria" en 2020. Pour l’occasion, MBS se déplace avec une cour de 1 000 personnes, d’après Al-Arabiya, et devrait annoncer des investissements pharaoniques dans l’industrie américaine. Des accords sur le nucléaire civil, l’intelligence artificielle et les avions de chasse F-35 flottent aussi dans l’air. Le souverain saoudien va-t-il, pour autant, satisfaire tous les désirs de son hôte du jour ? Peu probable.

La normalisation Israël-Arabie saoudite, priorité de Trump

Le président américain rêve ouvertement de ce qu’il appelle "le deal du siècle" : la normalisation des relations diplomatiques entre Israël et l’Arabie saoudite, gardienne des lieux saints de l’Islam. Un tel coup diplomatique ouvrirait la voie à une reconnaissance de l’Etat hébreu par l’ensemble du monde arabo-musulman. "C’était déjà un objectif de Trump lors de son premier mandat, ça l’était pour Joe Biden pendant quatre ans et cela reste une priorité du second mandat de Trump, affirme Julie Norman, professeure de relations internationales à l’University College London. Apparemment, les Saoudiens restent ouverts à cette possibilité mais ils y mettent bien davantage de conditions à présent, surtout vis-à-vis des Palestiniens."

Sur ce dossier, comme tant d’autres, le 7 octobre 2023 a tout changé : dans sa guerre contre le Hamas, Israël a rasé 80 % de la bande de Gaza et tué plus de 67 000 personnes (d’après le ministère de la Santé lié au Hamas), mettant à cran les sociétés arabes. MBS, qui caressait l’idée d’un rapprochement officiel avec Israël en septembre 2023 lors d’une interview sur Fox News, a dû faire marche arrière. Après un long silence, le prince saoudien est allé jusqu’à qualifier de "génocide" l’action d’Israël à Gaza. "Avec son optimisme habituel, Trump a annoncé une normalisation Israël - Arabie saoudite d’ici la fin de l’année… De manière réaliste, ce ne sera pas le cas", estime Julie Norman.

La semaine dernière, Michael Ratney, ambassadeur des Etats-Unis à Riyad de 2023 à début 2025, racontait au think tank CFIS comment cette idée avait surtout pris forme en 2022, "alors que les relations américano-saoudiennes étaient au plus bas" : pour relancer le partenariat historique entre les deux pays, il fallait un accord global incluant une défense militaire mutuelle, le développement du nucléaire civil en Arabie saoudite et une reconnaissance saoudienne d’Israël. Mais l’attaque terroriste du 7 octobre et la guerre qui a suivi ont, selon lui, repoussé l’échéance. "Après le début de la guerre à Gaza, qui a imposé cette catastrophe si horrible et si visible aux Palestiniens, il est devenu de plus en plus difficile pour les Saoudiens d’avancer sur cette question, explique le diplomate américain. Bien sûr, la normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite aurait d’énormes avantages pour tout le monde, mais cette idée reste impopulaire chez les citoyens saoudiens, ce que leurs dirigeants savent bien."

Tant que Netanyahou sera là…

Contrairement aux Emirats arabes unis ou à Bahreïn, deux pays du Golfe qui ont normalisé leurs relations avec Israël en 2020, l’Arabie saoudite doit tenir compte de son opinion publique, avec 35 millions d’habitants qui ne sont pas tous millionnaires… Loin de là. "Les Saoudiens ont répété, encore et encore, que ce n’était pas le moment, souligne Michael Ratney. Le cessez-le-feu reste instable à Gaza, le chemin vers la paix est très incertain et les Saoudiens ont des exigences limpides : ils veulent voir l’armée israélienne se retirer complètement de la bande de Gaza — ce qui est loin d’être le cas —, et un engagement clair du gouvernement israélien en faveur d’un Etat palestinien — ce qui n’est pas du tout à l’ordre du jour. Le président Trump a une forte personnalité et une relation personnelle avec MBS suffisante pour que la normalisation avec Israël se produise, mais ce ne sera pas pour bientôt."

Car le principal obstacle à toute normalisation s’appelle Benyamin Netanyahou. Toute sa carrière politique, depuis 1996 et son premier mandat de chef du gouvernement, le Premier ministre israélien a bataillé contre un éventuel Etat palestinien. Il l’a redit dimanche 16 novembre, à la veille de la visite de MBS à Washington : "Notre opposition à un Etat palestinien sur tout territoire à l’Ouest du [fleuve] Jourdain existe, est valable et n’a pas changé d’un iota. Je repousse ces tentatives depuis des dizaines d’années et je continuerai de le faire contre les pressions extérieures et intérieures."

Au-delà de ses propres convictions, la présence de Netanyahou à la tête du gouvernement israélien bloque aussi tout rapprochement de la part de MBS, qui connaît la haine dont le Premier ministre de l’Etat hébreu fait l’objet dans le monde arabo-musulman. "Il n’y aura pas de normalisation avec l’Arabie saoudite tant qu’Israël garde ce gouvernement, dont la politique palestinienne est définie par une poignée d’extrémistes, annexionnistes et suprémacistes, regrette l’ancien diplomate israélien Nimrod Novik. Les leaders du monde arabe savent que leurs populations, en particulier les jeunes, ont été radicalisées par les images de Gaza. Tant qu’Israël ne change pas de direction sur la question palestinienne et ne s’engage pas en faveur d’une solution à deux Etats, il n’y aura pas de normalisation." Donald Trump devra sans doute attendre les prochaines élections israéliennes, dans moins d’un an, pour décrocher son "deal du siècle" dans la région.

© afp.com/MANDEL NGAN

Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane (G), rencontre le président américain Donald Trump le 20 mai 2017 à Ryad
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En plein processus de paix, le Hamas suspecté de stocker des armes à l’étranger

Un écueil de plus dans la mise en œuvre du plan de paix de Donald Trump ? Alors que l’une de ses étapes consiste en une démilitarisation du Hamas, le groupe islamiste responsable des attaques du 7-Octobre s’emploierait, selon la télévision publique israélienne KAN, à déplacer des réserves d’armes dans différents pays africains, dont le Yémen. Il tenterait également d’en acquérir de nouvelles.

Voilà qui compliquerait un peu plus une équation déjà ardue alors que le Conseil de sécurité de l’ONU doit voter ce lundi 17 novembre sur un projet de résolution relatif à la force internationale susceptible d’être déployée dans la partie de la bande de Gaza encore contrôlée par le Hamas (soit 47 % du territoire). Alors que le cessez–le–feu est entré en vigueur début octobre, la Maison-Blanche peinerait à obtenir des engagements fermes de la part de ses alliés quant à leur participation à cette coalition, dont l’une des missions consistera en la démilitarisation du territoire, et donc du Hamas.

60 % des tunnels intacts

Ce dernier, bien qu’il ait signé l’accord de paix, semble tout faire pour retarder l’échéance. Le mois dernier, l’un des membres de son bureau politique, Mohammed Nazzal, a ainsi déclaré à Reuters : "Je ne peux pas répondre par oui ou par non [NDLR : sur la question du désarmement]. Franchement, cela dépend de la nature du projet. Le projet de désarmement dont vous parlez, qu’est-ce que cela signifie ? A qui les armes seront-elles remises ?"

De son côté, Israël, qui contrôle 53 % de la bande de Gaza, celle située au-delà de la "ligne jaune", estimait récemment que 60 % des tunnels du Hamas étaient encore opérationnels. Ses troupes s’emploient à leur destruction, soit en les faisant exploser, soit en injectant à l’intérieur du béton liquide. Outre les détails de la démilitarisation du Hamas, la question de la future gouvernance de la bande de Gaza reste un point, pourtant crucial, encore très obscur.

© afp.com/Eyad BABA

Des combattants du Hamas se rassemblent avant la libération de deux otages israéliens à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 22 février 2025
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Une première depuis près de 20 ans : le déficit de l'Espagne sera bientôt moins élevé que celui de l'Allemagne

L'Espagne en pleine forme économique. Pour la première fois depuis près de 20 ans, le déficit public du pays de la péninsule ibérique devrait dépasser celui de l'Allemagne sur l'année 2025. Selon les projections de la Commission européenne publiées ce lundi 17 novembre, d'ici au 31 décembre, ce chiffre atteindrait ainsi 2,5 % du PIB espagnol, soit moins que les 3,1 % du PIB allemand anticipés par Bruxelles. Une situation inespérée pour Madrid, après une longue période d'austérité liée aux crises financière et immobilière dans le pays au tournant des années 2010.

Une forte croissance post-Covid-19

Comment expliquer cette tendance ? Depuis la fin de la pandémie de Covid-19, l'Espagne connaît un véritable renouveau en matière économique. A l'instar d'autres pays aux finances mises à mal par la crise il y a 15 ans (Grèce, Portugal...), la quatrième puissance européenne est portée par une forte croissance. Depuis 2022, celle-ci a grimpé de 3,9 % en moyenne par trimestre... contre 0,3 % en Allemagne. "Nous avons également des perspectives positives jusqu'en 2028, avec une croissance robuste, équilibrée et soutenue sur des bases solides", s'était félicité mi-septembre Carlos Cuerpo, le ministre espagnol de l'Économie.

Cette nouvelle diminution du déficit public constituerait donc la cinquième baisse consécutive en la matière en Espagne. Le résultat d'une longue politique de relance de l'autre côté des Pyrénées, à tous niveaux. Pour combler en urgence ses lacunes financières, Madrid a d'abord emprunté 41 milliards d'euros au sein du fonds de sauvetage mis en place par l'UE au plus fort de la crise de la zone euro. Une décennie plus tard, l'Espagne se retrouve par ailleurs seconde bénéficiaire du plan de relance européen "NextGenerationEU", paquet d'investissements d'un montant de 800 milliards d'euros et destinés à renforcer l'économie européenne après l'épidémie de Covid-19. Au total, le pays doit donc percevoir 163 milliards d'euros de subventions et de prêts dans le cadre de ce projet.

Rôle du blocage politique au Parlement

Outre ces aides européennes, l'Espagne peut aussi compter sur un retour en force démographique. Si, comme observé ailleurs en Europe, sa natalité reste en berne, le gouvernement socialiste de Pedro Sánchez assume un recours massif à l'immigration légale sur le territoire espagnol pour dynamiser le marché du travail. Ainsi, 105 000 nouveaux habitants y ont été recensés au troisième trimestre 2025, faisant approcher la population du pays des 50 millions d'habitants. Sur un autre plan, l'économie espagnole a pu compter sur le retour en force des touristes. Sur les huit premiers mois de 2025, leur fréquentation a atteint des niveaux historiques, avec un total de 66,8 millions de visiteurs étrangers.

Dernier élément, sur le plan politique cette fois : confronté à un Parlement qui ne lui est pas acquis, Pedro Sánchez n'a pas pu faire adopter un nouveau budget depuis 2023. Conséquence : le gouvernement poursuit sa politique sur la base du plan de finances voté il y a deux ans. D'importants investissements publics n'ont de ce fait pas pu être votés... et ne se répercutent pas sur l'ampleur du déficit. Cette fragilité politique n'inquiète pas les investisseurs : face à ses bons résultats économiques, l'Espagne a vu en septembre sa note relevée par l'agence Standard and Poor's de A à A+.

Une dette toujours importante

Malgré ces avancées indéniables, certains points noirs ternissent toutefois le bilan financier espagnol. Avec, en premier lieu, l'état de la dette. Celle-ci culmine toujours à plus de 103 % du PIB, soit bien davantage qu'en Allemagne (plus de 64 % du PIB). Certes, aujourd'hui, les taux d'emprunt espagnols se situent en deçà des valeurs affichées par d'autres grandes puissances, comme la France – elle-même engluée dans un endettement abyssal (plus de 114 % du PIB). Mais le taux d'endettement massif espagnol demeure une fragilité. "Le ratio dette/PIB de l'Espagne reste trop élevé, ce qui réduira considérablement sa marge de manœuvre en cas de récession", explique, auprès du Financial Times, l'ex-ministre espagnol de l'Industrie Miguel Sebastián. "C'est un problème."

Autre paramètre inquiétant : l'augmentation du taux de pauvreté dans le pays. Et ce, en dépit de certaines mesures prises par le gouvernement, comme l'augmentation du salaire minimum, augmenté de 61 % depuis l'arrivée au pouvoir de Pedro Sánchez, en 2018. D'après des chiffres d'Eurostat relayés par El Pais ce lundi, le taux de pauvreté en Espagne aurait grimpé de 11,3 % de la population en 2023 à 13,6 % en 2024, soit 6,7 millions de personnes.

Au niveau global, l'inversion du rapport de force au niveau déficitaire avec l'Allemagne s'explique enfin par les orientations décidées par le gouvernement allemand ces derniers mois. A rebours de la rigueur budgétaire généralement de mise à Berlin, le chancelier Friedrich Merz mise sur d'importants investissements pour relancer la croissance allemande – aujourd'hui atone – financer sa défense et rénover certaines de ses infrastructures, devenues parfois vieillissantes.

© afp.com/Pierre-Philippe MARCOU

Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez lors d'une session parlementaire au Congrès à Madrid (Espagne), le 18 juin 2025
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Guerre en Ukraine : ce que contient l'accord "historique" conclu entre Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky

Le président français a accueilli ce lundi 17 novembre son homologue sur la base de Villacoublay, au sud-ouest de Paris, où des industriels ont présenté les fleurons de l'armement tricolore au dirigeant du pays en guerre depuis 2022 avec la Russie. Ils ont signé une "déclaration d'intention qui porte sur la coopération relative à l'acquisition par l'Ukraine d'équipements de défense français".

100 Rafale et des systèmes de défense aérienne

Selon l'Elysée, l'accord se projette sur un horizon d'une dizaine d'années et porte sur de possibles contrats à venir pour l'acquisition de quelque "100 Rafale", avec leurs armements associés", ainsi que huit systèmes de défense aérienne SAMP-T nouvelle génération, en cours de développement. Sont aussi concernées quatre systèmes de radar, "de nouvelles acquisitions de bombes propulsées (AASM Hammer)", et des drones d'observation, d'attaque ou d'interception, a précisé la présidence française.

Le président ukrainien avait déjà signé le mois dernier une lettre d'intention en vue d'acquérir 100 à 150 avions de chasse suédois Gripen. Ce changement d'approche permet de planifier le renforcement à long terme de la défense ukrainienne après une éventuelle issue du conflit.

S'agissant des drones et des bombes guidées, Emmanuel Macron a évoqué "des engagements de production d'ici à la fin de l'année et sur les trois années qui viennent". Sur les Rafale, les délais s'annoncent plus longs, en raison des temps de négociation des contrats, de production et de formation des pilotes. S'agissant du financement, il reste à clarifier mais la France compte avoir recours à la fois à sa propre contribution budgétaire et aux mécanismes européens. Le président français a d'ailleurs relancé la piste de "l'endettement commun" pour que l'Union européenne puisse "continuer d'apporter à l'Ukraine un soutien financier prévisible et stable à long terme" - malgré la résistance allemande.

Cette neuvième visite du dirigeant ukrainien en France depuis le début de la guerre en février 2022 intervient alors que la situation sur le front est compliquée pour son pays, à l'orée de l'hiver. Dans la nuit de dimanche à lundi, des frappes russes ont tué au moins cinq personnes dans l'est de l'Ukraine, selon les autorités locales. Elle a lieu aussi au moment où l'Ukraine est ébranlée par un scandale de corruption ayant poussé deux ministres à la démission et forcé Volodymyr Zelensky à prendre des sanctions contre l'un de ses proches.

Visite de l'état-major de la "force multinationale Ukraine"

Après cette visite à Villacoublay, Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky se sont rendus au mont Valérien, à l'ouest de Paris, visiter l'état-major de la "force multinationale Ukraine" que Paris et Londres préparent pour qu'elle puisse être déployée dans le cadre d'un éventuel accord de cessez-le-feu et des "garanties de sécurité" à fournir à Kiev. Mis en place par la "coalition de volontaires", à laquelle participent, selon l'Elysée, 35 pays en incluant l'Ukraine, cet état-major "fonctionne" et est "dès à présent" capable "de déployer une force dès le lendemain d'un cessez-le-feu", assure-t-on côté français.

Les garanties de sécurité envisagées pour l'Ukraine, échafaudées depuis des mois par cette coalition, comprennent un soutien à l'armée de Kiev et des volets terrestre, maritime et aérien. Mais leur mise en œuvre reste conditionnée à un très hypothétique arrêt des combats.

Dans l'après-midi à l'Elysée, les deux dirigeants participeront à un "forum drones franco-ukrainien". Kiev entend utiliser cette année plus de 4,5 millions de drones, qui sont responsables de 70 % des destructions de matériels ennemis sur le front. Le pays a développé pour cela un agile réseau de production. L'Ukraine utilise également des drones pour abattre les drones Shahed lancés chaque nuit contre elle.

© afp.com/Sarah Meyssonnier

Le président français Emmanuel Macron, à droite, et le président ukrainien Volodymyr Zelensky, à sa gauche, le 17 novembre 2025, à Paris
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Corruption en Ukraine : l’Europe doit envisager l’après-Zelensky

En pleine guerre, des amis du président pillent le pays en détournant des sommes astronomiques ; pendant ce temps, les citoyens souffrent comme jamais sous les bombardements de l’agresseur russe. Le nouveau scandale de corruption qui secoue l’Ukraine est dévastateur pour Volodymyr Zelensky. Plusieurs inculpés sont des proches, voire des intimes du chef de l’Etat. L’Office national anticorruption leur reproche d’avoir amassé quelque 100 millions de dollars (85 millions d’euros) en contraignant les fournisseurs de compagnies publiques d’énergie à leur verser des pots-de-vin.

C’est ainsi que l’argent censé servir à réparer les centrales et les réseaux électriques attaqués sans relâche par l’armée russe a contribué à édifier des villas luxueuses pour des hommes gravitant autour du président. Les militaires meurent au front par milliers pour défendre quelques kilomètres carrés du territoire national. Leurs familles endurent des coupures incessantes d’électricité, de chauffage et d’eau courante à l’orée de l’hiver. Et quelques puissants bien connectés détournent les investissements destinés à protéger les infrastructures essentielles ! Ces révélations ont abasourdi la population.

Le scandale n’est pas seulement du pain bénit pour les campagnes de désinformation menées par la Russie. Il met en danger la position de Zelensky sur la scène politique intérieure. Rien n’indique, à ce stade, qu’il aurait lui-même profité des détournements de fonds mais au minimum, son manque de constance dans la lutte contre les malversations et ses erreurs de jugement dans les nominations de ses proches à des postes de responsabilité constituent des fautes lourdes. Pire, il semble qu’il a voulu protéger les criminels en tentant, au mois de juillet, de démanteler les institutions anticorruption créées dans la foulée de la révolution de Maidan en 2014. A l’époque, il a fallu les protestations indignées de la population et une levée de boucliers de plusieurs dirigeants européens pour le forcer à renoncer.

Zelensky a cherché à préserver sa réputation la semaine dernière en poussant deux ministres à démissionner et en sanctionnant son ancien associé d’affaires Timour Minditch, accusé d’être le cerveau du réseau ; manifestement alerté, l’homme a fui le pays juste avant le coup de filet du 10 novembre pour se réfugier en Israël. Le président a également annoncé une réforme de fond en comble de la gouvernance des énergéticiens ukrainiens et un audit complet de leurs finances.

Il en faudra beaucoup plus cependant au chef de l’Etat pour regagner la confiance de ses concitoyens, lui qui s’était fait élire en 2019 sur un programme d’éradication complète de la corruption qui ronge le pays depuis son indépendance en 1991. Alors que la septième année de sa présidence est déjà bien entamée - il a été élu pour cinq ans mais la constitution et le code électoral proscrivent les élections en période de loi martiale - c’est désormais sa survie politique qui est hypothéquée.

Complaisance coupable

L’affaire inquiète au plus haut point ses soutiens à l’étranger. Elle ne pouvait pas plus mal tomber au moment où l’Union européenne tergiverse sur l’octroi d’un méga prêt à l’Ukraine gagé sur les actifs russes gelés dans l’UE. Les caisses de Kiev sont censées être vides d’ici à quelques mois et le flux d’aide militaire occidentale a fondu depuis que Donald Trump a stoppé l’assistance américaine.

Signe de l’inquiétude européenne, le chancelier Friedrich Merz a appelé le président ukrainien à "poursuivre vigoureusement" le combat anticorruption. Désormais fournisseur numéro un d’aide financière et militaire à l’Ukraine (11,5 milliards d’euros prévus dans le budget 2026), le gouvernement allemand est sous le feu des critiques de l’opposition d’extrême droite qui lui reproche de dilapider l’argent public en le donnant à Kiev. Dans d’autres pays européens aussi, le soutien populaire à l’Ukraine est fragile.

Zelensky a montré qu’il avait du courage et de la détermination à revendre. Mais sa fermeté dans la guerre contre l’envahisseur russe s’est accompagnée d’une complaisance coupable dans l’autre combat essentiel, celui destiné à préserver l’intégrité de la démocratie ukrainienne. L’intérêt stratégique des Européens est d’empêcher une défaite de Kiev, qui donnerait les mains libres à Vladimir Poutine pour poursuivre ses agressions. Dans cette perspective, l’avenir de l’Ukraine indépendante et démocratique est un enjeu infiniment plus important pour le continent que le sort politique personnel de Volodymyr Zelensky.

© afp.com/JOHN THYS

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky fait une déclaration à la presse à son arrivée au sommet des dirigeants de l'Union européenne à Bruxelles, le 23 octobre 2025
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Derrière la rupture entre Donald Trump et Marjorie Taylor Greene, l’inquiétude de la base Maga

C’était l’une de ses plus ardentes supportrices, celle qui l’avait défendu contre vents et marées, embrassant toutes ses théories conspirationnistes et notamment le vol de l’élection présidentielle de 2020. Donald Trump a pourtant rompu avec fracas la semaine dernière avec l’élue de Géorgie Marjorie Taylor Greene. "Je ne sais pas ce qui arrive à Marjorie, c’est une femme bien. Je pense qu’elle s’est égarée", a-t-il déclaré dans le bureau Ovale avant d’ajouter sur son réseau Truth Social qu’il soutiendrait volontiers un candidat contre elle dans une primaire pour les élections de mi-mandat de 2026, lors desquelles tous les sièges de la Chambre des représentants seront remis en jeu. Et d’ajouter : "Maggie 'la Dingue' ne fait que SE PLAINDRE, SE PLAINDRE, SE PLAINDRE".

L’ombre du dossier Epstein

Le grief du président envers cette alliée des plus zélées, incarnation de la droite la plus radicale, tient pour partie à son insistance à ce que soit publiée l’intégralité du dossier Epstein - Marjorie Taylor Greene fait partie des quatre républicains ayant ajouté leurs voix aux démocrates pour que la Chambre des représentants examine cette semaine une proposition de loi forçant le ministère de la Justice à cette publication. Longtemps rétif à rendre publics ces dossiers relatifs aux abus sexuels perpétrés par le financier new-yorkais, qui s’est suicidé en prison en 2019 et dont il a longtemps été proche, Donald Trump a finalement effectué dimanche l’un de ces revirements dont il est coutumier : "Les républicains de la Chambre devraient voter pour publier le dossier Epstein, parce que nous n’avons rien à cacher et qu’il est temps de mettre ce canular démocrate derrière nous", a-t-il écrit sur Truth Social. "Certains 'membres' du Parti républicain sont 'utilisés', et on ne peut pas laisser cela se produire".

Cette décision apaisera-t-elle la base Maga ? C’est à voir. Car si le dossier Epstein agite celle-ci depuis longtemps, et cristallise ses doutes, il n’est pas le seul. Marjorie Taylor Greene accuse en effet depuis plusieurs semaines le président de consacrer trop de son temps aux questions de politique internationale, au détriment des problématiques des Américains. Une position soutenue par d’autres figures de la base trumpiste, dont l’influent ancien conseiller Steve Bannon, qui notait il y a quelques jours que le président avait reçu la semaine passée des officiels d’Asie centrale, de Hongrie et de Syrie. "Je n’ai pas de problème avec le fait qu’il reçoive le président syrien, mais ensuite, il aurait dû [consacrer une réunion] aux questions domestiques", a-t-il déclaré au New York Times.

Haro sur les visas aux étudiants chinois

D’autres mesures ne passent pas, notamment les visas octroyés à des milliers d’étudiants chinois, alors que Donald Trump avait fait campagne sur la priorité à l’emploi donnée aux Américains. Ce programme, appelé H-1B, a été mis sur pied à la demande d’entreprises de la tech, qui disent ne pas trouver les profils dont elles ont besoin. Donald Trump a à nouveau affirmé la semaine passée qu’il pourrait accorder jusqu’à 600 000 visas par an aux étudiants chinois, faisant réagir le gouverneur de Floride Ron DeSantis : "Pourquoi importerions-nous des travailleurs étrangers alors que nous avons notre propre population dont nous devons prendre soin ?" a-t-il déclaré à des journalistes, selon Florida Politics. Un autre cri d’indignation est venu de… Marjorie Taylor Greene, qui a écrit sur X que ces étudiants prendraient des opportunités aux étudiants américains.

Même discorde quant à l’aide accordée à l’Argentine. Le président a approuvé un plan d’aide de 20 milliards de dollars destiné à stabiliser le peso argentin et déclaré que les États-Unis achèteraient du bœuf argentin, provoquant l’inquiétude de nombreux éleveurs de bétail américains.

Un autre élu républicain dont Marjorie Taylor Greene est proche, Thomas Massie, représentant, comme elle, d’un Etat rural du Sud, le Kentucky, a été le plus virulent, déclarant la semaine dernière sur CNN : "Quand ils protègent les pédophiles, quand ils gaspillent notre budget, quand ils déclenchent des guerres à l’étranger, je suis désolé, mais je ne peux pas être d’accord avec cela." Comme pour Marjorie Taylor Greene, le président s’active pour le défaire lors des élections de mi-mandat.

© Getty Images via AFP

Marjorie Taylor Greene lors d'un meeting de campagne de Donald Trump, le 15 octobre 2024 à Atlanta.
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Chili : l’extrême droite se rapproche du pouvoir, 35 ans après la fin de la dictature de Pinochet

La communiste modérée Jeannette Jara et son rival d’extrême droite José Antonio Kast s’affronteront au second tour de la présidentielle chilienne, après être arrivés en tête dimanche 16 novembre du premier tour lors d’un scrutin dominé par les inquiétudes liées à la criminalité.

La candidate de la coalition de centre gauche au pouvoir recueille 26,71 % des suffrages, contre 24,12 % pour son rival ultraconservateur, selon des résultats officiels portant sur près de 83 % des bulletins dépouillés. Ils s’affronteront le 14 décembre. Avant le premier tour, les sondages ont toutefois prédit la défaite de Jeannette Jara au second tour en cas de qualification face à un candidat de droite ou d’extrême droite, en raison du report des voix.

Ces résultats "sont une très mauvaise nouvelle pour Jeannette Jara", commente pour l’AFP Rodrigo Arellano, analyste à l’Université du Développement du Chili. "Toutes les projections de son équipe tablaient sur plus de 30 %", explique-t-il, soulignant que "l’ensemble des candidats de l’opposition la devancent de près du double".

"Ne laissez pas la peur endurcir vos cœurs"

L’ancienne ministre du Travail a exhorté les électeurs à ne pas laisser la montée de la criminalité les pousser vers l’extrême droite. "Ne laissez pas la peur endurcir vos cœurs", a-t-elle déclaré.

Pour la première fois depuis la fin de la dictature d’Augusto Pinochet en 1990, la droite radicale pourrait revenir au pouvoir. "Nous allons reconstruire" le pays, a lancé José Antonio Kast.

L’extrême droite était aussi représentée par le député libertarien Johannes Kaiser, souvent présenté comme la version chilienne du président argentin Javier Milei. Il recueille 13,93 % des suffrages. L’économiste iconoclaste Franco Parisi a lui créé la surprise en terminant troisième avec 19,42 %, tandis que la candidate de la droite traditionnelle Evelyn Matthei obtient 12,70 %.

Bien que le pays, riche en cuivre et en lithium, demeure l’un des plus sûrs du continent, la criminalité y a sensiblement augmenté. Le taux d’homicides a augmenté de 2,5 à 6 pour 100 000 habitants en dix ans et 868 enlèvements ont été recensés l’an dernier, en hausse de 76 % par rapport à 2021, selon les autorités.

Cette poussée de la violence a éclipsé les aspirations de changement qui avaient porté au pouvoir en 2022 le président de gauche Gabriel Boric et sa promesse, finalement avortée, d’une nouvelle Constitution pour remplacer celle héritée de Pinochet.

Mur à la frontière

L’inquiétude des Chiliens tient notamment à l’arrivée de formes de criminalité organisée "jusque-là inconnues dans le pays, comme les assassinats commandités", note Gonzalo Müller, directeur du Centre d’études politiques du Chili. "Il manque de la poigne au Chili, on est trop laxistes […] Il faut fermer la frontière et renvoyer tous les sans-papiers", a déclaré à l’AFP Raul Lueiza, un ouvrier du bâtiment de 64 ans, après avoir voté dans un quartier populaire de Santiago.

La campagne a été dominée par les discours sécuritaires, auxquels Jeannette Jara elle-même s’est ralliée, sans vraiment convaincre. Membre du Parti communiste depuis l’adolescence, l’ancienne ministre du Travail de 51 ans a assuré pendant sa campagne n’avoir "aucun complexe en matière de sécurité", défendant notamment un contrôle migratoire renforcé.

José Antonio Kast, 59 ans, fils d’un ancien soldat allemand qui a servi pendant la Seconde Guerre mondiale puis a émigré au Chili, brigue la présidence pour la troisième fois. Son discours cible les 337 000 étrangers en situation irrégulière, en majorité des Vénézuéliens, dans un contexte d’inquiétude face à l’arrivée de groupes criminels étrangers. Une majorité de Chiliens associe la montée de la criminalité à l’immigration irrégulière. Il promet des expulsions massives, la construction d’un mur à la frontière, le renforcement de l’armement de la police et le déploiement de l’armée dans les zones critiques.

Plus de 15,6 millions d’électeurs étaient appelés à départager huit candidats, ainsi qu’à renouveler la Chambre des députés et la moitié du Sénat.

© Getty Images via AFP

Le candidat à la présidence Jose Antonio Kast s'adresse à ses partisans après le premier tour de l'élection présidentielle, le 16 novembre 2025, à Santiago, au Chili.
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L'Ukraine aura besoin de 70 milliards d'euros en 2026, l'UE présente ses options

A l’approche de l’hiver, l’armée russe continue de gagner du terrain sur le front ukrainien, en particulier dans la région de Zaporijia, au sud du pays, partiellement occupée par Moscou, où la Russie a revendiqué dimanche la prise de deux nouveaux villages. Mais la bataille a aussi lieu dans les airs : Moscou multiplie les attaques de missiles et de drones, comme cette nuit à l'est de l'Ukraine, où cinq personnes sont mortes. Les infrastructures énergétiques sont également en première ligne des frappes russes.

Volodymyr Zelensky et Emmanuel Macron se retrouvent ce lundi 17 novembre à Paris pour discuter des besoins militaires de Kiev et signer un accord de coopération en matière de défense aérienne. C’est la neuvième visite du président ukrainien en France depuis le début de la guerre. Elle intervient alors que Zelensky est affaibli en interne par un scandale de corruption, qui l’a forcé à prendre des sanctions contre l’un de ses plus proches collaborateurs.

Les infos à retenir

⇒ Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky signent une lettre d'intention pour l'achat futur par Kiev de jusqu'à 100 Rafale

⇒ L'Ukraine aura besoin de 70 milliards d'euros en 2026

⇒ La Russie continue de progresser dans l'est de l'Ukraine

L'Ukraine aura besoin de 70 milliards d'euros en 2026, l'UE présente ses options

L'Ukraine aura besoin l'an prochain de plus de 70 milliards d'euros pour financer sa guerre contre Moscou, que les 27 devront prendre en charge pour l'essentiel, selon un document de la Commission européenne détaillant trois options pour y parvenir. "L'ampleur du déficit de financement de l'Ukraine est significative", avertit la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, dans une lettre accompagnant ce document, consulté lundi par l'AFP.

L'Union européenne s'est engagée lors d'un sommet de ses dirigeants en octobre à financer l'effort de guerre de l'Ukraine pour la période 2026-2027. Selon les estimations du Fonds monétaire international (FMI), citées dans ce document, les besoins de financement de l'Ukraine vont atteindre, au total, au cours de cette période quelque 135,7 milliards d'euros, dont 51,6 milliards en soutien militaire pour la seule année 2026. Faute de soutien européen, l'Ukraine se retrouvera à court d'argent dès la fin du premier trimestre de l'an prochain, a averti la Commission européenne.

Face à l'urgence, Bruxelles propose trois options, dont une utilisation des avoirs gelés russes dans l'UE, clairement favorisée par plusieurs pays, dont l'Allemagne, en raison de son impact nul sur les finances publiques. Quelque 210 milliards d'euros d'avoirs de la banque centrale russe sont actuellement sous la garde de la société Euroclear, basée à Bruxelles. La Commission propose d'en utiliser quelque 140 milliards pour financer un prêt du même montant à l'Ukraine, qu'elle ne remboursera que si la Russie lui paie des réparations. Totalement inédite, cette solution se heurte toutefois à l'hostilité de la Belgique, qui redoute de se retrouver seule à payer les pots cassés en cas de problème, et à l'extrême méfiance ce la Banque centrale européenne (BCE), qui redoute ses effets sur les marchés financiers.

Les deux autres options n'ont pas cet inconvénient mais elles représentent un "impact" beaucoup plus important pour les Etats membres. La Commission européenne propose ainsi que les pays de l'UE financent directement l'Ukraine sous forme de dons, en fonction de leur propre Produit intérieur brut (PIB). Dans ce cas, un minimum de 90 milliards d'euros d'ici 2027 sera nécessaire, à condition que la guerre prenne fin en 2026, et que les autres pays alliés de l'Ukraine assument le reste, indique la Commission.

Autre solution, un emprunt européen, qui aurait l'avantage de limiter l'impact direct sur les budgets nationaux. Mais, avertit Bruxelles, les intérêts de cet emprunt devront être payés par les Etats membres. Ils devront également apporter des garanties solides, et donc représentant un coût pour leurs budgets, au cas où l'Ukraine ne serait pas en mesure de rembourser ce prêt, a précisé la Commission.

Le document présentant ces options sera sur la table des 27 lors d'un sommet crucial les 18 et 19 décembre à Bruxelles. La Belgique est sous pression de la part des autres pays de l'UE, et de la Commission européenne, pour accepter la solution la moins coûteuse, mais rien ne dit qu'elle cédera d'ici là. Un compromis pourrait alors être de mélanger les différentes solutions, au moins à court terme, en ayant recours à des dons directs et à un emprunt limité, indique encore ce document.

Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky signent une lettre d'intention pour l'achat futur par Kiev de jusqu'à 100 Rafale

En visite à Paris, Volodymyr Zelensky a signé ce lundi avec Emmanuel Macron une "déclaration d'intention" qu'il a qualifiée d'"historique", en vue de l'achat futur d'avions de combat français Rafale, de l'ordre d'une centaine, dont l'Ukraine se doterait ainsi pour la première fois, et de systèmes de défense aérienne nouvelle génération.

Selon l'Elysée, cet accord, qui se projette "sur un horizon d'une dizaine d'années", prévoit de possibles contrats à venir pour "l'acquisition par l’Ukraine d'équipements de défense français" neufs : "de l'ordre de 100 Rafale, avec leurs armements associés", ainsi que d'autres armements, dont le système de défense aérienne SAMP-T nouvelle génération en cours de développement, des systèmes de radar et des drones.

Volodymyr Zelensky avait renouvelé samedi son appel pour obtenir davantage de systèmes de défense aérienne, au lendemain de nouvelles frappes russes massives contre son pays. Le président ukrainien a déjà signé le mois dernier une lettre d’intention en vue d’acquérir 100 à 150 avions de chasse suédois Gripen.

Moscou revendique la prise de trois nouveaux villages dans l'est de l'Ukraine

Moscou a revendiqué lundi la prise de trois nouveaux villages sur la ligne de front orientale en Ukraine, où l'armée russe poursuit sa lente progression face à des forces ukrainiennes moins nombreuses. Le ministère russe de la Défense a déclaré sur Telegram que les forces russes avaient pris le contrôle des villages de Platonivka dans la région de Donetsk, de Dvoritchanské dans la région de Kharkiv et de Gaï dans celle de Dnipropetrovsk.

Dimanche, l’armée russe avait déjà revendiqué la prise de deux villages dans la région de Zaporijia, dans le sud de l’Ukraine, où la Russie continue également d’avancer, bien que le front y soit beaucoup moins actif que celui de l’Est, où se concentrent des combats.

L'Europe n'est pas prête à une attaque russe de drones, selon un commissaire européen

L'Europe n'est pas prête à faire face à une attaque massive de drones russes et doit impérativement intégrer les capacités ukrainiennes sous peine de faire une "erreur historique", a assuré lundi le commissaire européen à la Défense Andrius Kubilius. "Nous ne sommes pas prêts à détecter et neutraliser les drones russes", a-t-il déploré dans un discours à Vilnius. "Les Russes apprennent vite. Et nous ?", s'est-il interrogé.

La guerre en Ukraine a bouleversé les règles du combat, a-t-il encore souligné. "Les guerres de demain ne se gagneront pas avec des chars et de l'artillerie, mais avec des drones et des missiles", a-t-il ainsi assuré, appelant à apprendre de l'expérience ukrainienne.

La défense à l'est de l'Europe et dans les pays baltes doit dans ces conditions se faire avec l'Ukraine, a-t-il encore expliqué. "C'est la seule façon pour nous d'apprendre de l'Ukraine, non seulement comment fabriquer des drones, mais aussi comment construire tout un 'écosystème'", a-t-il martelé.." "Si nous ne faisons pas cela, nous commettrons une erreur historique, qui nous affaiblira, et qui affaiblira l'Ukraine", a averti le commissaire européen.

Une attaque russe fait cinq morts dans l’est de l’Ukraine

Des frappes russes ont tué au moins cinq personnes dans l'est de l'Ukraine, ont annoncé les autorités locales lundi 17 novembre, faisant état d'importants dégâts dans des zones résidentielles, notamment dans une école maternelle.

Trois personnes sont décédées dans des frappes nocturnes de missile sur la ville de Balakliya qui ont endommagé une école maternelle, des immeubles résidentiels et des véhicules, a affirmé lundi sur Telegram le gouverneur de la région de Kharkiv (nord-est), Oleg Synegoubov. "A l'heure actuelle, nous savons que trois personnes ont perdu la vie. Quinze autres personnes ont été blessées, dont quatre enfants", a-t-il indiqué à la mi-journée.

Des photos publiées par les services de secours ukrainiens montrent un sol jonché de débris et des pompiers tentant de contrôler les flammes qui s'échappent de la façade d'un immeuble. Deux personnes ont également été tuées à Nikopol dans le sud-est du pays dans des frappes d'artillerie russes

© afp.com/Anatolii STEPANOV

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le président ukrainien Volodymyr Zelensky lors d'une conférence de presse à Kiev, le 20 septembre 2024
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Affaire Jeffrey Epstein : le nouveau revirement de Donald Trump

Dans une volte-face, Donald Trump a déclaré dimanche 16 novembre qu’il soutenait un vote à la Chambre des représentants américaine pour la publication du dossier du délinquant sexuel Jeffrey Epstein. "Les républicains de la Chambre devraient voter pour publier le dossier Epstein, parce que nous n’avons rien à cacher et qu’il est temps de mettre ce canular démocrate derrière nous", a écrit sur sa plateforme Truth Social le président, qui était jusque-là opposé à l’idée.

"Le ministère de la Justice a déjà rendu publiques des dizaines de milliers de pages sur 'Epstein', et s’intéresse à plusieurs agents démocrates" concernant leur "relation" avec celui-ci, a ajouté Donald Trump, citant "Bill Clinton, Reid Hoffman, Larry Summers, etc".

La Chambre des représentants doit examiner cette semaine une proposition de loi qui forcerait le ministère de la Justice à publier le reste du dossier du riche financier new-yorkais, mort en prison avant son procès. Donald Trump a été accusé de chercher à empêcher un vote pour dissimuler des éléments l’impliquant dans cette affaire, ce que l’intéressé a démenti.

La position qu’il tenait avant son revirement a semé la division dans le camp républicain, habituellement loyal. Le milliardaire a pris ses distances avec de proches alliés issus de son mouvement "MAGA" (Make America Great Again), dont des parlementaires comme Marjorie Taylor Greene, à laquelle il a retiré ce week-end son soutien pour les élections de 2026. "Certains 'membres' du Parti républicain sont 'utilisés', et on ne peut pas laisser cela se produire", a-t-il lancé. "La Commission de surveillance de la Chambre peut avoir tout ce à quoi elle a légalement droit, JE M’EN FICHE !", a encore affirmé le président, qui avait promis pendant sa campagne des révélations fracassantes, puis tenté de clore le dossier une fois revenu au pouvoir.

"De très mauvaises relations" avec Jeffrey Epstein

L’affaire a été relancée la semaine dernière par la publication de courriers électroniques de Jeffrey Epstein, que Donald Trump a fréquenté quand ils étaient des figures de la jet-set new-yorkaise, avant de se brouiller avec lui. Avec sa complice Ghislaine Maxwell comme rabatteuse, Jeffrey Epstein faisait venir des mineures dans ses résidences notamment à New York et en Floride pour, sous le prétexte de massages, les agresser sexuellement. Il est mort en prison en 2019, par suicide selon les autorités. Ghislaine Maxwell purge, elle, une peine de 20 ans de prison pour exploitation sexuelle.

Donald Trump "savait à propos des filles" agressées sexuellement et a même "passé plusieurs heures" avec l’une d’elles, affirment des emails de Jeffrey Epstein récemment dévoilés par des parlementaires démocrates. "Je ne sais rien de cela. (Sinon) cela aurait été dit il y a longtemps", a assuré le président américain vendredi. "Jeffrey Epstein et moi avons entretenu de très mauvaises relations pendant de nombreuses années", a-t-il ajouté.

Dans ces courriers électroniques figurent aussi des échanges avec Larry Summers, qui a été conseiller économique de Barack Obama et a présidé la prestigieuse université Harvard. Bill Clinton a pour sa part fréquenté le financier new-yorkais dans les années 1990 et 2000.

Après ces révélations, Donald Trump a réclamé une enquête fédérale contre Larry Summers, l’ancien président Clinton et l’investisseur-entrepreneur Reid Hoffman, notamment. En juillet, le ministère de la Justice et la police fédérale (FBI) avaient pourtant annoncé qu’ils n’avaient "pas découvert de preuves sur lesquelles fonder une enquête contre des personnes jusqu’ici non poursuivies" dans l’affaire Epstein. Les deux institutions avaient aussi jugé qu’il ne serait "pas pertinent" de rendre public le "dossier Epstein", suscitant l’incompréhension, voire la colère, de nombreux partisans "MAGA".

© afp.com/ROBERTO SCHMIDT

Le président américain Donald Trump s'adresse aux journalistes avant de monter à bord d'Air Force One, le 16 novembre 2025, à l'aéroport international de Palm Beach, en Floride
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Guerre en Ukraine : Rubicon, la redoutable unité d’élite de drones de Vladimir Poutine

En cette sombre journée d’automne, à proximité de Pokrovsk, épicentre des combats où les forces de Moscou déversent quotidiennement leur effroyable déluge de feu, un drone russe file en ligne droite le long d’un chemin de terre. Sur la vidéo en vue subjective qu’il transmet à son opérateur, surgissent des carcasses calcinées de blindés ukrainiens : un International Maxxpro fourni par les Etats-Unis, un BMC Kirpi turc, un Roshel Senator canadien… Derrière ces destructions, le Rubicon Center, une unité d’élite russe spécialisée dans les drones, qui, pour l’occasion, a partagé les images sur sa chaîne Telegram. Cette vidéo est toutefois loin d’être la seule. Plusieurs sont publiées quotidiennement avec, à chaque fois, le résultat des frappes conduites sur le front par ses pilotes.

De son vrai nom Rubicon Center of Advanced Unmanned Technologies (Centre Rubicon des technologies avancées sans pilote), cette entité d’un nouveau genre a été créée en octobre 2024 sur instruction du ministre russe de la Défense, Andreï Belousov. L’objectif : muscler les capacités de Moscou dans l’utilisation de ces aéronefs dont les vrombissements retentissent aujourd’hui partout sur le front. "Il s’agit d’une structure hybride qui, au-delà d’opérer sur le front et de former des pilotes, développe de nouvelles tactiques et de nouvelles technologies, souligne Michael Gjerstad, chercheur à l’International Institute for Strategic Studies (IISS). En cela, elle tranche avec la culture militaire russe traditionnelle, connue pour sa rigidité et sa lenteur." Surtout, sa relative indépendance lui donne les mains libres pour innover.

En dépit de la discrétion de Moscou quant à la nature de l’organisation, une enquête de Radio Free Europe/Radio Liberty (RFERL) a révélé que celle-ci bénéficierait de son propre quartier général au Patriot Park, un parc à thème militaire au service de la propagande du régime, situé en banlieue ouest de Moscou, et serait dirigée par le colonel Sergei Budnikov, ancien chef d’état-major de la 9e brigade d’artillerie. "Rubicon dispose d’un centre de recherche et développement interne qui lui permet de moderniser et perfectionner tous types de drones, pointe, à Kiev, Maxim Sheremet, le fondateur de la société ukrainienne Drone Space Lab. Les systèmes qui en sont issus sont ensuite produits dans leurs propres usines, afin de pouvoir les déployer à grande échelle sur le front." Son accès privilégié au marché chinois lui garantit en outre tous les composants nécessaires à la production.

Solide réputation

Avant Pokrovsk, le Rubicon Center avait déjà fait ses armes dans la région russe de Koursk, où son rôle avait été décisif pour repousser l’incursion ukrainienne de l’été 2024. Grâce à leurs drones à fibre optique, insensibles aux brouilleurs habituellement utilisés pour perturber le signal radio de ces engins volants, ses opérateurs étaient parvenus à semer le chaos dans les arrières ukrainiens.

De quoi se forger une solide réputation. "Je n’envie pas nos unités qui se trouvent là où ils opèrent", avait résumé Kyrylo Veres, le commandant du régiment de drones ukrainien K-2, l’un des plus redoutables du pays, lors d’une interview en juillet dernier. "Ils sont aujourd’hui les plus efficaces de Russie dans leur domaine, abonde Maxime Sheremet. Non seulement ils ont copié la structure de nos propres unités de drones, mais ils disposent en plus d’un budget illimité." Ce nouvel instrument représente pour le Kremlin un moyen de sérieusement concurrencer les capacités de l’Ukraine, qui avait été la première à généraliser l’usage de ces engins sans pilote sur le front au début du conflit.

Au point de constituer aujourd’hui un élément clé de la stratégie militaire russe. "Rubicon est connu pour sa capacité à entraver la rotation des unités ukrainiennes, note Michael Gjerstad de l’IISS. Son utilisation des drones rend les opérations de ravitaillement extrêmement difficiles pour les Ukrainiens." Et affaiblit de facto la solidité de leurs lignes de défenses chargées de repousser les envahisseurs. D’après les données compilées par LostArmour, un groupe de recherche en open source pro-Kremlin, les opérateurs de Rubicon auraient ainsi détruit plus de 11 000 cibles en 2025. Près de 40 % d’entre elles seraient des drones adverses, 16 % des radars et moyens de communication, et 14 % de véhicules non blindés utilisés principalement pour assurer la logistique.

Autre proie dans le viseur de Rubicon : les pilotes de drones ukrainiens, alors que ces engins sont aujourd’hui responsables d’environ 80 % des pertes dans le camp russe. "Dans certains secteurs où les forces ukrainiennes manquent d’effectifs et où la défense est principalement assurée par les drones, cela représente une vraie menace", relève Michael Gjerstad. Ce qui en fait une cible prioritaire des forces de Kiev. Début novembre, le renseignement militaire ukrainien a annoncé avoir frappé l’une de ses bases dans la ville d’Avdiivka avec l’un de ses drones kamikaze chargé d’une centaine de kilos d’explosifs, éliminant au passage plusieurs de ses officiers et opérateurs. Avant cela, un drone ukrainien s’était déjà écrasé en mai sur le site hébergeant son quartier général non loin de la capitale russe. La chasse ne fait que commencer.

© AFP

Sur cette photo diffusée par l'agence d'Etat russe Sputnik, le président russe Vladimir Poutine inspecte les exercices militaires conjoints russo-biélorusses "Zapad-2025" sur un terrain d'entraînement dans l'oblast de Nijni Novgorod, le 16 septembre 2025.
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Financement de l’effort de guerre en Ukraine : le salut viendra-t-il de la Norvège ?

Pour réarmer l’Ukraine, l’UE a un plan. Et pas n’importe lequel : elle envisage d’accorder à Kiev un prêt exceptionnel de 140 milliards d’euros, qui serait financé à partir des avoirs russes gelés par la Banque Centrale européenne. Problème : pour cela, elle doit pouvoir offrir à Euroclear - l’institution financière belge qui en détient la majeure partie - des garanties solides qu’elle sera remboursée si les avoirs russes venaient à être rapatriés à Moscou.

Or, au vu des divisions à l’œuvre dans l’UE, et des positions pro-Poutine de certains chefs d’Etat européens comme Viktor Orban, rien n’est moins sûr. Comme l’explique Le Monde, il suffirait, par exemple, que la Hongrie s’oppose au renouvellement des sanctions, qui intervient tous les six mois, pour que ce scénario de rapatriement des avoirs devienne réalité. Pour parer à cette éventualité, à laquelle la Belgique refuse de se risquer, l’UE a donc besoin d’un garant pour ce prêt. Et la Norvège semble être le candidat idéal.

Utilisation du fonds souverain norvégien

C’est en tout cas ce qu’ont avancé deux économistes norvégiens - Havard Alland et Knut Anton Mork - dans une tribune publiée fin octobre sur le site international Project Syndicate. Leur idée est la suivante : s’appuyer sur le fonds souverain pétrolier dont dispose la Norvège - d’une valeur de plus de 1 700 milliards d’euros - comme garantie au "prêt de réparation" de l’Ukraine.

Grâce au fonds pétrolier, la Norvège dispose de la note triple A la plus forte d’Europe et même du monde, ce qui en fait le seul pays en Europe capable d’assumer le passif éventuel lié au nouveau prêt ukrainien, sans que cela affecte sa notation de crédit

Havard Halland

Concrètement, la Norvège pourrait servir de filet de sécurité dans plusieurs scénarios : si l’un des pays des 27 ne vote pas pour le renouvellement du gel des avoirs russes, si la Russie verse une indemnité à l’Ukraine pour les dommages infligés (ce qui provoquerait un retour de ses avoirs), ou à l’issue d’une action en justice. Les deux derniers scénarios étant considérés comme "hautement improbables" par l’économiste Havard Halland.

La Norvège partante, sous conditions

En Norvège, cette idée est vue d’un bon œil par la majorité des partis politiques, mais plusieurs membres du gouvernement ont toutefois tenu à temporiser, relate Courrier International. Interrogé sur le sujet mercredi 12 novembre, le Premier ministre travailliste Jonas Gahr Store déclarait ainsi : "J’ai vu qu’on spéculait sur le fait que la Norvège puisse mettre à disposition son fonds pétrolier - dans lequel sont amassées les recettes provenant de l’extraction du pétrole et du gaz au large de ses côtes - comme garantie à un type de prêt de l’UE à destination de l’Ukraine […] Ce n’est pas d’actualité", a-t-il assuré à la chaîne de télévision TV2.

En parallèle, son ministre des finances Jens Stoltenberg, de passage a Bruxelles, n’a quant à lui pas fermé la porte à une éventuelle garantie du royaume, mais à certaines conditions. Une Norvège "garante de l’ensemble du montant, ce n’est pas envisageable", a confié l’ancien secrétaire général de l’Otan à la radio télévision publique NRK. "Mais nous verrons si nous pouvons contribuer en fonction de ce que proposera l’UE", a-t-il ajouté.

Option la plus crédible pour Bruxelles

Cette idée fait désormais son chemin jusqu’à Bruxelles, où elle doit être examinée début décembre, afin d’adopter une position commune et de formuler à Oslo une proposition plus concrète. La Première ministre du Danemark, qui préside en ce moment le Conseil de l’UE, s’y est de son côté déjà dite très favorable. D’autant que les autres options étudiées par Bruxelles sont loin de faire l’unanimité…

Outre le "prêt de réparation" de l’UE, Bruxelles a en effet envisagé deux autres possibilités pour financer la défense de l’Ukraine. L’une consisterait à contracter un emprunt commun au nom des 27 Etats membres, option déjà décriée par Berlin qui y voit une entrave aux règles budgétaires. De l’autre, imposer une contribution Etat par Etat, s’appuyant sur les budgets nationaux, alternative déjà écartée par plusieurs pays qui peinent à boucler leurs budgets, dont la France. L’option du prêt exceptionnel semble donc la plus plausible à l’heure actuelle.

Reste à voir comment sa garantie pourra être assurée, et quel rôle la Norvège - qui, rappelons-le, n’est pas membre des 27 - sera prête à jouer pour prendre part à cet effort de guerre. Comme l’a rappelé le premier ministre norvégien dans une récente interview au Grand Continent, la Norvège est déjà le pays qui apporte le soutien le plus important à l’Ukraine en termes de PIB par habitant, avec une contribution de 7 milliards d’euros prévue pour 2026.

Mais aller encore plus loin ne serait pas absurde : la Norvège s’est nettement enrichie depuis le début du conflit en Ukraine, étant devenue désormais le premier fournisseur de gaz de l’UE. Havard Halland, l’un des économistes à l’origine de la proposition d’utiliser le fonds souverain, rappelle que le pays nordique a réalisé plus de 108 milliards d’euros de profits entre 2022 et 2024. "Or notre contribution à l’aide à l’Ukraine, prévue jusqu’en 2030, n’atteint que 23 milliards d’euros, soit une fraction de ces profits", détaille ce dernier, mettant au passage en avant l’enjeu sécuritaire pour la Norvège, qui partage près de 200 kilomètres de frontière avec la Russie.

© afp.com/Cornelius Poppe

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky et les Premiers ministres de la Suède, de l'Islande, de la Norvège, de la Finlande et du Danemark lors d'une conférence de presse à Oslo, le 13 décembre 2023
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"Il n'y aura jamais d’État palestinien", assure Israël

Ce lundi 17 novembre, le Conseil de sécurité des Nations unies doit se prononcer sur un projet de résolution américaine endossant le plan de Donald Trump pour la bande de Gaza. Ce plan prévoit d’accorder un mandat jusqu’à la fin 2027 à un "comité de la paix" et d’autoriser le déploiement d’une "force de stabilisation internationale".

Il évoque également la possibilité d'un Etat palestinien, contre lequel le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a rappelé son opposition.

14h03

Au Liban, les Casques bleus accusent l'armée israélienne de leur avoir tiré dessus

La Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) a accusé dimanche l'armée israélienne d'avoir ouvert le feu sur ses membres dans le sud du pays, sans faire de blessés, et a appelé Israël à cesser toute attaque contre les Casques bleus. La Finul œuvre avec l'armée libanaise à l'application de l'accord de cessez-le-feu ayant mis fin le 27 novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre le mouvement pro-iranien Hezbollah et Israël.

"Ce matin, les Forces de défense israéliennes (FDI) ont tiré sur des soldats de la paix de la Finul à partir d'un char Merkava situé près d'une position établie par Israël en territoire libanais", indique un communiqué de la Finul. Celle-ci précise que des mitrailleuses lourdes ont tiré près des soldats, mais qu'ils ont pu quitter les lieux en toute sécurité lorsque le char s'était retiré.

Ces tirs "constituent une violation grave de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies", a poursuivi la même source, en référence à la résolution de l'ONU qui a mis fin à la guerre de 2006 entre Israël et le Hezbollah et sert de base à l'accord de cessez-le-feu de novembre. En vertu de cette résolution, seuls l'armée libanaise et les Casques Bleus peuvent se déployer dans le sud du Liban, près de la frontière israélienne.

La Finul a exhorté "l'armée israélienne à cesser tout comportement agressif et toute attaque contre ou à proximité des soldats de la paix, qui s'efforcent de rétablir la stabilité que tant Israël que le Liban disent rechercher".

Les Nations unies et la France avaient dénoncé fin octobre des tirs israéliens à proximité de troupes de la Finul dans le sud du Liban, et en septembre la Force onusienne avait affirmé que des drones israéliens y avaient largué quatre grenades près de ses positions, Israël affirmant alors qu'il n'y avait eu "aucun tir intentionnel" contre elle.

Malgré l'accord de cessez-le-feu, l'armée israélienne occupe toujours cinq positions dans le sud du Liban, frontalier du nord d'Israël, et mène régulièrement des frappes sur le territoire libanais en affirmant viser le Hezbollah.

13h47

Avant un vote à l'ONU, Netanyahou réitère son opposition à tout Etat palestinien

Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, et plusieurs de ses ministres, ont réitéré leur opposition à un Etat palestinien, avant le vote prévu lundi au Conseil de sécurité de l'ONU sur un projet américain de résolution sur Gaza, qui en évoque la possibilité à l'avenir. Contrairement aux versions précédentes, le nouveau projet de résolution, qui endosse le plan de paix de Donald Trump pour Gaza, évoque l'avenir d'un possible Etat palestinien, auquel le gouvernement israélien s'oppose avec fermeté de longue date.

"Notre opposition à un État palestinien sur quelque territoire que ce soit n’a pas changé", a dit le Premier ministre ouvrant dimanche un conseil des ministres. Il a affirmé n'avoir besoin en la matière de "leçons de personne". Le ministre d’extrême droite, Bezalel Smotrich, l'avait accusé samedi soir d'avoir fait "silence" depuis la reconnaissance de l'Etat de Palestine par la France et plusieurs autres pays en septembre. "Formulez immédiatement une réponse appropriée et ferme qui clarifiera au monde entier : il n'y aura jamais d’État palestinien sur les terres de notre patrie", a écrit M. Smotrich sur X.

Les ministres de la Défense, Israël Katz, et des Affaires étrangères, Gideon Saar, ont également martelé sur X leur refus de tout Etat palestinien.

19h24

Après la Finul, le Liban accuse à son tour Israël de construire un mur dans le sud et proteste auprès de l'ONU

Le Liban a annoncé samedi déposer plainte devant le Conseil de sécurité de l'ONU en raison de la construction d'un mur dans le sud du Liban par Israël, dont avait fait état la veille la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul).

Israël a rejeté les accusations de la Finul, parlant de "renforcement de la barrière physique" le long de la ligne de démarcation avec son voisin du nord, mais pas en territoire libanais.

Le bureau du président libanais Joseph Aoun a indiqué qu'il avait ordonné "de déposer une plainte urgente auprès du Conseil de sécurité des Nations unies contre Israël pour avoir construit un mur en béton à la frontière sud du Liban en dépassant la Ligne bleue", qui marque la frontière entre les deux pays. Il a demandé que la plainte "soit accompagnée de rapports émis par l'ONU réfutant le déni israélien de la construction du mur".

Vendredi, la Finul avait dit dans un communiqué avoir découvert en octobre "un mur de béton érigé" par l'armée israélienne "au sud-ouest de Yaroun". "L'enquête a confirmé que le mur traversait la Ligne bleue", "rendant plus de 4 000 mètres carrés de territoire libanais inaccessibles" aux habitants, avait-elle ajouté.

Depuis le début de la guerre déclenchée à Gaza par l'attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël le 7 octobre 2023, l'armée israélienne "a mis en oeuvre une série de mesures, notamment le renforcement de la barrière physique le long de la frontière nord", a déclaré à l'AFP un porte-parole militaire israélien. "Le mur ne traverse pas la Ligne bleue", a-t-il affirmé, disant que sa construction avait débuté en 2022.

© afp.com/Alex KOLOMOISKY

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu participe à une cérémonie commémorative nationale en hommage aux soldats tombés au combat pendant les deux années de guerre à Gaza, au cimetière militaire du Mont Herzl à Jérusalem, le 16 octobre 2025
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Hongrie : à l’approche des législatives, Viktor Orban se positionne en "faiseur de paix" contre l'opposition

Tout est parti d’un sondage, qui a donné des sueurs froides au parti d’extrême droite à la tête du pays. Alors que se profilent les élections législatives, en avril 2026, un institut indépendant publie des chiffres sur les intentions de votes… donnant la principale formation d’opposition, Tisza, parti conservateur pro-européen de Péter Magyar largement en tête devant le Fidesz de Viktor Orban. 18 points d’écart entre les deux partis. Un autre sondage, de l’institut Electoral Geography, place aussi Tisza en tête, de sept points cette fois devant le parti de gouvernement…

Des chiffres qui ont créé des remous dans les rangs du Fidesz à six mois des élections, et conduit le premier ministre à adopter une rhétorique beaucoup plus offensive contre l’opposition. Avec un angle d’attaque principal : la guerre en Ukraine. Pour rassurer des électeurs inquiets d’une importation du conflit voisin sur leur sol, Viktor Orban joue la carte de la "raison". Dans les meetings de campagne, il galvanise les foules sur fond de slogans "anti-guerre" et se défend même d’être "le seul pays d’Europe à défendre la paix".

"Anti-guerre" et "voix de la raison"

Il accuse d’ailleurs son principal opposant, Péter Magyar - un ancien fidèle de son parti, qui a subitement changé de camp en 2024 - de vouloir entraîner la Hongrie dans la guerre sans fin entre Moscou et Kiev et d’être le vassal de Bruxelles dans sa "course perdue" au réarmement. "Le Fidesz est le parti de la guerre et de la haine, tandis que Tisza œuvre pour la paix dans le pays et dans le monde", a rétorqué sur Facebook Péter Magyar, pour qui l’actuel premier ministre n’est autre que le "cheval de Troie" du Kremlin dans l’UE.

Pas de quoi décourager Viktor Orban, qui entend faire de ces élections législatives, une sorte de "référendum sur la guerre et la politique étrangère", analyse auprès du Guardian Dániel Róna, politologue et directeur du centre de recherche indépendant 21 Research Centre. Mais pour son homologue du think tank Electoral Geography, pas sûr que cette stratégie suffise pour convaincre des électeurs confrontés à l’inflation et à une crise des services publics. Des thématiques sur lesquelles Tisza est aujourd’hui plus populaire dans l’opinion hongroise.

L’intelligence artificielle au service du Fidesz

Toutefois, s’il est clair qu’il se concentre principalement sur la question ukrainienne, le parti de Viktor Orban redouble également d’efforts pour convaincre sur d’autres enjeux, avec des méthodes plus ou moins conventionnelles. A commencer par l’utilisation de l’intelligence artificielle pour décrédibiliser le principal parti d’opposition. Dans la presse locale, Péter Magyar apparaît ainsi sur une photo générée par IA, dans la posture d’un chien, détaille Libération. A quatre pattes, on l’aperçoit tenu en laisse par Manfred Weber, président du parti de droite (PPE) au Parlement européen et bête noire du gouvernement Orbán.

Mais ce n’est pas tout : sur les réseaux sociaux du directeur de campagne de Viktor Orban, Péter Magyarar apparaît également sur une vidéo générée par IA, dans laquelle il déclare réduire les pensions de retraite. Une première en Europe, où un parti de gouvernement n’avait jusqu’alors jamais utilisé un deepfake pour mettre dans la bouche de son adversaire des propos qu’il n’a jamais tenus. "Viktor Orban et son parti ont touché le fond avec des vidéos truquées par intelligence artificielle", a de son côté dénoncé Péter Magyar, annonçant qu’il comptait porter plainte. "Il y a un vrai risque pour la confiance dans la démocratie dans toute l’Europe", alerte dans Le Monde Zsuzsanna Végh, spécialiste de l’Europe centrale au German Marshall Fund, rappelant que la Hongrie sert régulièrement "de laboratoire des innovations illibérales" pour les partis d’extrême droite européens.

Soutien de Trump à la campagne d’Orban

Quant à la question ukrainienne, elle n’est jamais bien loin : des clips vidéo utilisant le narratif "Les pantins vont utiliser l’argent de nos impôts pour soutenir l’Ukraine" inondent également la toile. Et l’administration Trump est elle aussi entrée dans la danse pour soutenir Viktor Orban. Après avoir reçu ce dernier le 7 novembre à la Maison-Blanche, elle a annoncé dans la foulée couper les financements à Szabad Europa, un média indépendant hongrois, filiale du groupe Radio Free Europe.

Ces annonces interviennent alors que les dirigeants hongrois et américains sont en très bons termes. Les Etats-Unis viennent même d’octroyer à la Hongrie une exemption de l’interdiction d’importer du pétrole russe sous peine de sanctions, que Viktor Orban souhaite voir se prolonger. Il vient d'ailleurs d'annoncer ce dimanche saisir la Cour de justice de l’Union européenne contre la suppression des importations de gaz russe décidée par le bloc.

© afp.com/SAUL LOEB

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban le 7 novembre 2025, à Washington, aux Etats-Unis
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